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Débats du Sénat (Hansard)

1re Session, 44e Législature
Volume 153, Numéro 214

Le mardi 18 juin 2024
L’honorable Raymonde Gagné, Présidente


LE SÉNAT

Le mardi 18 juin 2024

La séance est ouverte à 14 heures, la Présidente étant au fauteuil.

Prière.

[Traduction]

DÉCLARATIONS DE SÉNATEURS

Le Mois de la fierté

L’honorable Kim Pate : Honorables sénateurs, joyeux Mois national de l’histoire autochtone et joyeux Mois de la fierté! Prenons un moment pour penser à ce que nous pouvons faire pour continuer à préserver et à favoriser l’égalité et les droits durement acquis, mais aussi pour songer à tout ce qu’une société diversifiée, inclusive et égalitaire pourrait faire pour nous tous, mais surtout pour les communautés autochtones, bispirituelles et arc-en-ciel.

Cette année marque le 50e anniversaire du soulèvement de Stonewall, qui a donné un élan à la libération gaie et au mouvement de la fierté et qui a été commémoré dès l’année suivante par une marche de la fierté.

Il y a deux ans, j’ai eu le privilège et la responsabilité de rencontrer Martin Boyce, l’un des derniers émeutiers de Stonewall encore vivants — il n’en reste qu’une poignée, chers collègues — et de prendre la parole avec lui.

Nous avons discuté de l’époque où le fait de révéler publiquement le sexe de la personne aimée pouvait vous valoir un casier judiciaire et un séjour en prison. La plupart d’entre nous se souviennent qu’à l’époque, il fallait absolument demeurer dans le placard si on voulait éviter les préjugés, la victimisation et les calomnies, quand ce n’était pas une thérapie de conversion, souvent synonyme de violence, de viol et parfois même de mort. Nous avons aussi discuté des difficultés personnelles associées à la vie en société et aux tribunaux, mais aussi dans sa propre maison ou son lieu de travail.

Les droits actuels n’ont pas été accordés librement; ils ont été acquis de haute lutte. Les droits fondamentaux des membres de la communauté 2ELGBTQIA+ ont été effacés par les systèmes hétérosexistes, qui leur faisaient subir descente après descente et tentaient d’en faire des criminels et des marginaux, de les prendre pour cible et de les exterminer. Malgré les avancées des dernières décennies, nous assistons à de nouvelles tentatives pour supprimer nos droits et nos protections juridiques, que ce soit ici ou ailleurs dans le monde, et pour nous opprimer.

J’avais 10 ans lorsque les rapports sexuels entre personnes de même sexe ont été décriminalisés, mais il a fallu des décennies avant que la société nous accepte. Lorsque j’étais adolescente, la plupart d’entre nous cachions notre homosexualité, sauf à ceux en qui nous avions confiance, comme mes mentors et amis Jim Egan et Jack Nesbit.

Jim faisait preuve d’amabilité et de compassion tout en essuyant les remarques désobligeantes qu’on leur jetait au visage, à Jack, à leurs amis et à lui, parce qu’ils étaient gais et, pire encore, parce qu’ils l’étaient ouvertement. Leur combat a fini par donner des résultats, mais ils n’ont jamais réussi à être considérés comme des conjoints.

Le Mois de la fierté nous donne l’occasion de réfléchir à tout le chemin parcouru depuis le soulèvement de Stonewall, la purge des homosexuels dans l’armée et la fonction publique, et j’en passe.

Nous pouvons aussi nous réjouir du fait que, le 20 juillet 2005, le Canada a été le quatrième pays à légaliser les mariages entre personnes du même sexe, et que, grâce à divers organismes, comme Rainbow Railroad, le Canada accueille maintenant des personnes qui fuient la persécution à l’étranger.

À l’occasion du Mois de la fierté, engageons-nous collectivement à défendre et à maintenir les progrès accomplis afin que le Canada continue d’accepter, de soutenir et de protéger les membres de notre communauté.

Chi-meegwetch, honorables collègues. Je vous remercie.

[Français]

Le Congrès mondial acadien

L’honorable Réjean Aucoin : Chers collègues, permettez-moi aujourd’hui de vous parler d’un événement de grande envergure qui aura lieu dans ma province du 10 au 18 août prochain : le Congrès mondial acadien.

Cet événement majeur qui célèbre la culture, l’histoire et les traditions des Acadiens se déroulera cette année dans le sud-ouest de la Nouvelle-Écosse, qui comprend la région d’Argyle et de la baie Sainte-Marie, dont je vous ai parlé la semaine dernière.

Dans la région d’Argyle, on compte de nombreux villages qui se feront un plaisir de vous accueillir durant le congrès : l’Île des Surette, Quinan, Wedgeport, Pubnico, Pointe-du-Sault et Buttes‑Amirault. Cette région, connue sous le nom de Cap Sable, a été colonisée par les Français dès 1740.

Depuis sa première édition en 1994, le Congrès mondial acadien s’est imposé comme un rendez-vous incontournable pour la communauté acadienne dispersée à travers le monde depuis la déportation de 1755. Il se déroule tous les cinq ans dans différentes régions où la présence acadienne est importante : la Péninsule acadienne, la Louisiane, le sud-est et le nord-est du Nouveau‑Brunswick et, cette année, la Nouvelle-Écosse.

Cet événement unique en son genre rassemble des milliers de participants venus de divers horizons pour partager, échanger et renforcer les liens qui les unissent. Le programme riche et varié du congrès comprend des activités culturelles, des conférences, des spectacles, des expositions et des cérémonies officielles.

Zachary Richard, célèbre auteur-compositeur de la Louisiane, donnera la conférence d’ouverture et le groupe acadien Salebarbes, des Îles de la Madeleine, y donnera un spectacle.

Le congrès est aussi une occasion pour la diaspora acadienne de renouer avec ses racines. Les rassemblements familiaux, appelés « retours aux sources », permettent aux participants de redécouvrir leur histoire familiale, de rencontrer des parents éloignés et de renforcer le sentiment d’appartenance à la grande famille acadienne; les familles d’Entremont, Muise, d’Eon, Amirault, Babineau, Granger, Léger, Gallant, Breaux et bien d’autres y seront.

Le Congrès mondial acadien et la Fête nationale de l’Acadie, célébrée le 15 août, sont notre manière de vous dire, même si le peuple acadien n’a plus de pays, comme le dit si bien la Sagouine, de l’auteure Antonine Maillet : « On est toujours là. »

Le congrès offre une tribune pour discuter des enjeux contemporains, comme la protection des droits linguistiques, le développement économique des régions acadiennes et la valorisation du patrimoine culturel.

Honorables sénateurs et sénatrices, je vous invite donc en Nouvelle-Écosse, du 10 au 18 août 2024, pour célébrer avec moi et mes compatriotes et goûter au chaleureux accueil que les Acadiens vous réservent. Merci.

Des voix : Bravo!

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Benjamin Moron-Puech. Il est l’invité de l’honorable sénateur Cormier.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

[Traduction]

Le Mois national de l’histoire autochtone

L’honorable Judy A. White : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui pour souligner le Mois national de l’histoire autochtone. Ce mois donne à tous les habitants du Canada l’occasion d’en apprendre davantage sur les cultures, les traditions, les coutumes et les langues des Premières Nations, des Inuits et des Métis tout en réfléchissant à notre histoire commune et à ses répercussions persistantes sur les communautés autochtones. La voie vers une véritable réconciliation nécessite que la population soit sensibilisée au passé colonial du Canada et à ses relations avec les Premières Nations, les Métis et les Inuits, ainsi qu’au traitement qui leur a été réservé. Si nous ne confrontons pas ces réalités difficiles, nous ne pourrons pas bâtir un avenir meilleur et véritablement inclusif.

Le mois de juin est également l’occasion de célébrer les histoires, les réalisations, le courage et la résilience des peuples autochtones, qui vivent sur cette terre depuis des temps immémoriaux. C’est l’occasion de reconnaître les importantes contributions économiques, politiques, culturelles et environnementales que les peuples autochtones continuent d’apporter par leur leadership, leur militantisme et leurs triomphes personnels. En particulier, je voudrais souligner la nécessité de tirer des leçons des connaissances traditionnelles et des gardiens du savoir afin de conserver des connaissances précieuses qui peuvent éclairer et améliorer nos pratiques contemporaines, y compris notre relation avec l’environnement naturel.

(1410)

Sur une note personnelle, la semaine dernière, j’ai eu le plaisir d’organiser, conjointement avec mes collègues sénateurs autochtones et notre Présidente, une célébration du Mois national de l’histoire autochtone sur la Colline du Parlement. Ce fut une soirée vraiment merveilleuse, qui a permis de célébrer la richesse et la diversité des cultures des Premières Nations, des Métis et des Inuits par l’entremise de divers spectacles, d’expositions d’art et, bien sûr, de la nourriture.

Chers collègues, je voudrais également profiter de ce moment pour vous rappeler que le 21 juin est la Journée nationale des peuples autochtones. Cette journée a été choisie parce qu’elle marque le solstice d’été, la journée la plus longue de l’année. En conséquence, de nombreuses communautés autochtones se réunissent ce jour-là pour célébrer leur culture, leurs coutumes et leur patrimoine. Ces dernières années, j’ai eu la joie de célébrer cette journée dans ma propre communauté, à Flat Bay, par des cérémonies de l’aube, des récits, des chants et des danses.

En conclusion, j’espère que tous les Canadiens, d’un océan à l’autre, prendront le temps, ce mois-ci, de reconnaître et de célébrer l’histoire, le patrimoine, la résilience et la diversité des Premières Nations, des Inuits et des Métis de tout le pays, tout en continuant à en apprendre davantage sur notre passé collectif.

Wela’lin. Merci.

Visiteurs à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Jim Cuddy, O.C., et d’Anne Lindsay. Ils sont les invités de l’honorable sénatrice McBean.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!

James Gordon Cuddy, O.C.

L’honorable Marnie McBean : Honorables sénateurs, j’interviens aujourd’hui pour parler de l’immense pouvoir de la musique.

La musique a la capacité d’évoquer des émotions, de créer des liens et d’influencer la culture. Elle transcende les barrières linguistiques en réunissant des personnes d’origines et d’expériences différentes. Au-delà du simple divertissement, la musique peut inspirer le changement social, favoriser la création de communautés et servir de témoignage historique.

Nous avons parmi nous aujourd’hui quelqu’un qui, par sa musique et ses paroles, accompagne des millions de Canadiens depuis quatre décennies. Cofondateur et chanteur du groupe Blue Rodeo, Jim Cuddy est une figure imposante et une pierre angulaire du paysage canadien du rock et de la musique country.

Si la voix distinctive de Jim et ses textes empreints de sincérité lui ont valu un public fidèle et les éloges de la critique, c’est comme auteur-compositeur qu’il se démarque. Il a composé des chansons qui trouvent un écho profond auprès du public. Des succès comme « Try », « 5 Days in May » et « Lost Together » sont de véritables hymnes qui témoignent de son talent à saisir la complexité des émotions humaines. Sa musique reflète souvent l’expérience canadienne et porte sur des thèmes tels que l’amour, la perte et le caractère unique de l’identité canadienne.

Outre ses activités au sein de Blue Rodeo, Jim Cuddy poursuit une carrière solo couronnée de succès et est souvent accompagné par de grands musiciens tels que Colin Cripps et Anne Lindsay.

Anne Lindsay s’est imposée comme l’une des instrumentistes les plus captivantes et les plus polyvalentes du Canada. Grâce à son style unique au violon, elle crée des sons éclectiques qui illustrent la riche texture culturelle de notre pays. Quand Anne joue, le même instrument peut avoir le son du violon classique, du violon de la côte Est ou de la guitare électrique.

L’influence de Jim Cuddy s’étend bien au-delà de ses enregistrements. Il utilise régulièrement sa tribune pour défendre les arts et les nouveaux artistes musicaux. Il soutient sans réserve les Forces armées canadiennes, le sport amateur et d’innombrables autres œuvres de bienfaisance. Il ne ménage littéralement aucun effort pour redonner à la collectivité. J’ai participé avec lui à de nombreuses randonnées cyclistes caritatives où, après avoir parcouru plus de 100 kilomètres, il est descendu de son vélo pour monter en scène donner un concert de bienfaisance absolument parfait, qui a enchanté des milliers de cyclistes épuisés.

En reconnaissance de son talent artistique, de son dévouement et de son engagement, Jim Cuddy a reçu de nombreux prix, dont 13 prix Juno en tant qu’artiste solo et 12 prix Juno avec Blue Rodeo. Il a été intronisé au Panthéon de la musique canadienne et il a été fait Officier de l’Ordre du Canada.

En outre, on a annoncé la semaine dernière que Jim et Greg Keelor, son compagnon de longue date du groupe Blue Rodeo, seront intronisés au Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens. Apparemment, cette intronisation est très spéciale pour eux et pour beaucoup d’autres gens.

Pour tout ce qu’il a fait pour le Canada, honorables sénateurs, veuillez vous joindre à moi pour remercier et féliciter mon ami Jim Cuddy.

Des voix : Bravo!

Visiteur à la tribune

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, je vous signale la présence à la tribune de Marion Bethel, rapporteuse du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes des Nations unies. Elle est l’invitée de l’honorable sénatrice McPhedran.

Au nom de tous les honorables sénateurs, je vous souhaite la bienvenue au Sénat du Canada.

Des voix : Bravo!


AFFAIRES COURANTES

L’étude sur les questions concernant la sécurité et la défense dans l’Arctique

Sixième rapport du Comité de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants—Dépôt de la réponse du gouvernement

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement au sixième rapport du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants, intitulé La sécurité dans l’Arctique menacée : Des besoins urgents dans un paysage géopolitique et environnemental en évolution, déposé auprès du greffier du Sénat le 28 juin 2023.

(Conformément à l’article 12-23(4) du Règlement, cette réponse et le rapport initial sont renvoyés d’office au Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants.)

Le Sénat

Préavis de motion tendant à autoriser l’accès aux photographes à la cérémonie de la sanction royale

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, je donne préavis que, à la prochaine séance du Sénat, je proposerai :

Que des photographes autorisés puissent avoir accès à la salle du Sénat pour photographier la prochaine cérémonie de la sanction royale, d’une manière qui perturbe le moins possible les travaux.

[Français]

L’Association parlementaire Canada-Afrique

La mission bilatérale en République du Cameroun, du 13 au 17 novembre 2023—Dépôt du rapport

L’honorable Amina Gerba : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire Canada-Afrique concernant la mission bilatérale en République du Cameroun, tenue à Yaoundé, au Cameroun, du 13 au 17 novembre 2023.

[Traduction]

La mission d’observation en marge du sommet de l’Union africaine en Éthiopie et la mission bilatérale en République-Unie de Tanzanie, du 16 au 23 février 2024—Dépôt du rapport

L’honorable Amina Gerba : Honorables sénateurs, j’ai l’honneur de déposer, dans les deux langues officielles, le rapport de l’Association parlementaire Canada-Afrique concernant la mission d’observation en marge du sommet de l’Union africaine en Éthiopie et la mission bilatérale en République-Unie de Tanzanie, tenues à Addis-Abeba, Dar Es Salam, Dodoma et Zanzibar, du 16 au 23 février 2024.

[Français]

Énergie, environnement et ressources naturelles

Autorisation au comité de siéger en même temps que le Sénat

L’honorable Paul J. Massicotte : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-5a) du Règlement, je propose :

Que le Comité sénatorial permanent de l’énergie, de l’environnement et des ressources naturelles soit autorisé à se réunir le mardi 18 juin 2024, à 18 h 30, même si le Sénat siège à ce moment-là, et que l’application de l’article 12-18(1) du Règlement soit suspendue à cet égard.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)


[Traduction]

PÉRIODE DES QUESTIONS

La défense nationale

Les Forces armées canadiennes

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, il manque environ 16 000 militaires dans les Forces armées canadiennes. À l’heure actuelle, 10 000 soldats ne reçoivent pas la formation adéquate qui leur permettrait d’être déployés dans le cadre de missions. Les métiers propres à la marine, en particulier, manquent cruellement de main-d’œuvre. Comme nous l’avons appris en décembre, monsieur le leader, un technicien de la marine quitte la marine tous les deux jours. Les gens quittent l’armée en grand nombre. Le recrutement ne suit pas le rythme de l’attrition. Les personnes qui partent sont celles qui ont de l’expérience et qui ont assuré le bon fonctionnement de l’armée, monsieur le leader.

(1420)

En mars, le ministre de la Défense nationale du gouvernement Trudeau a déclaré que les forces sont dans une « spirale de la mort » en ce qui concerne le recrutement et la rétention. C’est une citation directe, monsieur le leader, « une spirale de la mort ». Quelles mesures précises sont prises pour mettre fin à cette spirale de la mort?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Il s’agit d’une question importante, alors merci de l’avoir posée.

Ce qui fait le succès des forces armées, c’est leur détermination, leur résilience et la qualité de leurs effectifs. Voilà pourquoi le gouvernement étudie différents moyens d’accroître le recrutement et le maintien en poste des militaires, à court et à long terme.

L’automne dernier, le gouvernement a publié la Directive pour la reconstitution des Forces armées canadiennes et la Stratégie de maintien des effectifs des Forces armées canadiennes, il a annoncé que les résidents permanents pouvaient désormais s’enrôler et il a confirmé qu’il s’employait à faire prendre de l’expansion aux forces armées afin qu’elles puissent continuer à servir le Canada. Le gouvernement doit puiser dans un plus vaste bassin de candidats et il continuera de chercher d’autres moyens de diversifier les forces armées et de leur faire prendre de l’expansion.

Pour revenir à votre question, sénateur, la nouvelle politique de défense, qui a pour nom « Notre Nord fort et libre », prévoit d’importants investissements dans les forces armées, lesquels s’ajoutent aux dépenses dont j’ai déjà parlé, comme les 100 millions de dollars pour améliorer l’accès des familles de militaires aux services de garde, les 295 millions de dollars pour la stratégie sur le logement et ainsi de suite, tout cela pour attirer encore plus de recrues.

Le sénateur Plett : Dernièrement, j’ai entendu dire qu’en tout et pour tout, l’année dernière, l’Aviation royale canadienne aurait compté moins d’une cinquantaine de pilotes. Il manque aussi de personnel au sol.

Vous serait-il possible de vous renseigner et de nous indiquer si c’est exact, monsieur le leader? Si oui, que fait le gouvernement Trudeau, si tant est qu’il fasse quoi que ce soit, pour remédier à la situation?

Le sénateur Gold : Bien que je sois dans l’impossibilité de confirmer les chiffres exacts, la situation est difficile dans l’ensemble des forces armées, et pas seulement là, dans la GRC aussi, et dans plusieurs autres secteurs dont nous dépendons grandement.

Le gouvernement continue de chercher des moyens d’attirer plus de recrues, mais surtout de garder les effectifs déjà en poste. Je ne manquerai pas d’en glisser un mot au ministre.

[Français]

Les finances

Le coût de la vie

L’honorable Claude Carignan : Monsieur le leader, on apprenait ce matin par le biais d’un rapport qu’il y a eu une hausse de 32 % des visites en 2023. On parle de deux millions de visites par mois, et on s’attend à un million de plus en 2024, donc trois millions de visiteurs par mois. Je ne parle pas du tourisme à Montréal, mais des banques alimentaires, monsieur le leader.

L’organisme estime que c’est maintenant 25 % des Canadiens qui vivent sous le seuil de la pauvreté. C’est évidemment le résultat de neuf ans de politiques de Justin Trudeau. Cette semaine, nous allons encore voter sur des budgets inflationnistes, soit les projets de loi C-59 et C-69. Quand le gouvernement va-t-il comprendre que ses politiques budgétaires ne font rien d’autre que d’aggraver la pauvreté au Canada, et quand va-t-il s’inspirer de politiques de gros bon sens?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie pour la question. Les chiffres que vous avez partagés avec nous sont non seulement décevants, mais inacceptables dans un pays comme le nôtre. Le gouvernement reconnaît les défis auxquels font face les Canadiens et les Canadiennes. Le gouvernement n’accepte cependant pas la façon dont vous avez conclu que c’est à cause des politiques économiques de ce gouvernement. Ce que le gouvernement fait et va continuer de faire dans ses budgets, c’est de fournir de l’aide non seulement aux Canadiens individuellement, mais aussi aux organismes qui donnent du soutien à nos concitoyens qui en ont besoin.

Le sénateur Carignan : Merci. Le Fonds monétaire international a déclaré qu’après avoir augmenté les impôts sur le gain en capital, le Canada devra maintenant augmenter la TPS. Sénateur Gold, est-ce que votre gouvernement a effectivement l’intention d’augmenter la TPS, de combien, et quand?

Le sénateur Gold : Évidemment, vous n’étiez pas ici hier, ou ma réponse n’était peut-être pas à votre goût. J’ai répondu hier que, selon l’information que j’ai, le gouvernement n’a aucune intention d’augmenter la TPS.

[Traduction]

La sécurité publique

La législation sur les armes à feu

L’honorable Marty Deacon : Sénateur Gold, à la fin de l’année dernière, au cours des audiences de notre comité sur le projet de loi C-21, le ministre LeBlanc a présenté par écrit des garanties concernant le tir sportif.

Alors que nos athlètes de tir sportif se préparent aux Jeux olympiques de 2024, à Paris, on me pose beaucoup de questions par rapport à ce projet de loi. Le ministre LeBlanc a déclaré :

Je tiens à assurer le Comité que des consultations auront lieu afin d’établir clairement le processus d’exemption pour les tireurs sportifs d’élite [...] cette exemption doit s’appliquer à ceux qui représentent actuellement le Canada et à ceux qui s’entraînent [...] Il doit y avoir une voie d’accès pour la prochaine génération.

La question que j’aimerais vous poser aujourd’hui est la suivante : le gouvernement a-t-il déjà établi une exemption dans les règlements et, dans l’affirmative, a-t-il accordé cette exemption à nos athlètes à tous les niveaux de compétition?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : À ce que je comprends, sénatrice, on travaille encore à l’élaboration des règlements liés au projet de loi C-21. Cela dit, je suis convaincu que le ministre LeBlanc honorera sa promesse.

La sénatrice M. Deacon : Merci. Compte tenu des travaux en cours, avez-vous une idée de la date à laquelle nous pourrons dire aux athlètes que la mesure est en place pour qu’ils puissent en prendre connaissance?

Le sénateur Gold : Je ne suis pas au courant de l’échéancier, sénatrice. Je vais certainement soulever la question auprès du ministre.

Le Bureau du Conseil privé

Les nominations au Sénat

L’honorable Pat Duncan : Ma question s’adresse elle aussi au leader du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, le Nunavut n’est représenté par aucun sénateur depuis la retraite de notre collègue Dennis Patterson. Il n’y a que deux représentants fédéraux par territoire. Il est essentiel d’avoir une représentation complète ici et à l’autre endroit.

Les deux membres du Nunavut du Comité consultatif indépendant sur les nominations au Sénat ont été nommés en février dernier. Pourriez-vous nous présenter un rapport d’étape concernant la nomination d’un sénateur du Nunavut?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question. En raison de la nature du processus — qui, comme vous le savez, est ouvert et transparent, mais auquel je ne participe pas —, il m’est impossible de vous fournir un rapport d’étape en ce qui concerne votre question.

Selon ce que j’ai compris, chers collègues, la plupart des comités chargés d’examiner les demandes et de procéder à des recommandations ont été constitués, et plusieurs ont terminé leurs travaux.

Je peux assurer au Sénat que le gouvernement sait qu’il y a des postes vacants et est déterminé à les pourvoir en temps opportun, mais nous devrons malheureusement attendre une annonce pour savoir exactement à quelle date le sénateur sera nommé.

La sénatrice Duncan : Sénateur Gold, avec une faible population dispersée sur un vaste territoire, un seul siège vacant aux échelons supérieurs peut entraîner des difficultés. Cette situation complique le travail de la fonction publique.

Le commissaire adjoint du Nunavut n’a pas été nommé ni le juge en chef, d’ailleurs. Or, n’importe quel poste vacant est un poste essentiel pour les assemblées législatives.

Pouvez-vous nous dire où en sont ces nominations, ou pouvez‑vous demander à ce qu’elles soient portées au haut de la liste des priorités?

Le sénateur Gold : Je vous remercie de votre question et de souligner l’importance — au Nunavut et partout ailleurs — de pourvoir les postes de cadres supérieurs en temps opportun et de trouver les meilleurs candidats possible. Je vais certainement porter cette question à l’attention du ministre.

[Français]

Le patrimoine canadien

Les langues officielles

L’honorable Jean-Guy Dagenais : Ma question s’adresse au leader du gouvernement. J’ai voté en faveur du projet de loi C-13 sur les langues officielles en voulant donner une chance à votre gouvernement d’améliorer les choses. Malheureusement, je commence à le regretter, surtout ce matin, quand j’ai appris que, selon Postes Canada, le français n’est plus obligatoire pour devenir facteur au Québec. Après la gouverneure générale et la lieutenante‑gouverneure du Nouveau-Brunswick qui ne parlent pas français dans notre pays supposément bilingue, ce sont maintenant les facteurs du Québec. Imaginez un citoyen de Belœil, une ville francophone à plus de 95 %, qui pourrait éventuellement se faire demander :

[Traduction]

Pourriez-vous vous signer ici pour confirmer la réception de cette lettre?

[Français]

Où en sommes-nous avec l’application de la Loi sur les langues officielles? Est-ce que j’ai sous les yeux une autre démonstration du peu d’importance que le gouvernement libéral accorde à l’usage du français au pays, et surtout au Québec?

(1430)

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Pour une fois, cher collègue, je n’ai aucun problème avec la prémisse de votre question, qui est tout à fait légitime, compte tenu de l’importance de nos deux langues officielles au Canada.

Je crois que le projet de loi C-13, que vous avez mentionné au début de votre question, est un important pas en avant pour ceux et celles qui ont le français comme langue maternelle partout au pays, pas seulement pour ceux et celles qui se trouvent en situation linguistique minoritaire. Cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de travail à faire pour qu’un plus grand nombre de Canadiens et de Canadiennes, surtout ceux et celles qui occupent des postes dans lesquels ils doivent répondre à des questions du public, soient en mesure de maîtriser le français, et le gouvernement est totalement d’accord avec ce point de vue.

Le sénateur Dagenais : Pouvez-vous nous expliquer pourquoi les Québécois francophones ne verraient pas dans cette décision de Postes Canada une autre forme de l’arrogance du gouvernement fédéral à leur endroit? Qui va faire respecter leurs droits de peuple fondateur, qui sont enchâssés dans la Constitution, si votre premier ministre continue de ne pas prendre ses responsabilités envers le bilinguisme?

Le sénateur Gold : Le gouvernement du Canada est très fier des efforts qu’il fait pour la promotion du bilinguisme au Canada, tout en respectant les compétences provinciales, comme chaque gouvernement doit le faire. Le gouvernement va continuer de travailler sur ce sujet important.

[Traduction]

Les finances

Le coût de la vie

L’honorable Leo Housakos : Sénateur Gold, après neuf ans sous la gouverne de Justin Trudeau, de plus en plus de Canadiens quittent le pays pour s’en aller aux États-Unis. Selon les données du recensement, plus de 126 000 personnes ont quitté le Canada pour les États-Unis en 2022, ce qui correspond à une augmentation de 70 % depuis une dizaine d’années. Faites le compte : c’était l’année précédant l’arrivée au pouvoir du premier ministre dépensier et constamment embourbé dans les scandales que nous connaissons. Avec ses hausses d’impôt néfastes pour l’emploi et les investissements, votre gouvernement se propose maintenant de faire fuir encore plus de Canadiens. Vous allez sans doute vous mettre à énumérer toutes les merveilleuses choses que nous devons à votre gouvernement, mais à un moment donné, les réserves s’épuisent. Le gouvernement a déjà fait doubler les loyers, les paiements hypothécaires et les mises de fonds. Vos déficits records ont fait grimper en flèche les taux d’intérêt. L’an dernier, les banques alimentaires ont dû aider 2 millions de personnes en un seul mois et, en 2024, on s’attend à ce que 1 million de personnes de plus y aient recours. Allez-vous sérieusement me dire que vous êtes fier de tout cela?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : J’ai sérieusement l’intention de contester votre allégation selon laquelle le gouvernement fédéral a fait doubler les loyers au Canada. Vous qui connaissez bien le milieu des affaires, vous devriez savoir, avec tout le respect que je vous dois, que c’est carrément absurde. Tous les étudiants qui se respectent, et je ne parle même pas des spécialistes, savent que de nombreux facteurs extérieurs et intérieurs influent sur notre quotidien. En fait, l’inflation diminue actuellement; les cibles sont atteintes. Il reste encore du travail à faire, et j’espère que les Canadiens auront droit à d’autres allégements des taux d’intérêt, qui sont élevés depuis la fin de la pandémie.

Le sénateur Housakos : L’inflation est encore plus proche de 3 % que de 2 %, sénateur Gold. C’est un fait.

Sénateur Gold, ce n’est ni moi ni Pierre Poilievre qui le disons. Après neuf ans sous la gouverne de Justin Trudeau, le Canada est en voie de connaître son pire déclin du niveau de vie en 40 ans. C’est l’Institut Fraser qui l’affirme. Le Canada a connu la pire croissance du revenu par personne que sous n’importe quel premier ministre depuis les années 1930. C’est ce qu’affirme le Financial Post. Et neuf familles de la classe moyenne sur dix paient désormais plus d’impôts sur le revenu que jamais. C’est également l’Institut Fraser qui l’affirme.

Sénateur Gold, même vous pouvez admettre, d’après vos calculs, que Justin Trudeau n’en vaut pas le coût.

Le sénateur Gold : Vous avez le droit de citer les sources que vous voulez, qu’un grand nombre de sénateurs connaissent bien, comme le Financial Post, dois-je le rappeler. Je dirai très brièvement, sinon carrément, sénateur Housakos, que je ne suis pas d’accord avec vos prémisses ni avec vos conclusions.

L’infrastructure et les collectivités

Le logement abordable

L’honorable Yonah Martin (leader adjointe de l’opposition) : Les chiffres que je vais citer proviennent de Statistique Canada. Lundi, Statistique Canada a signalé une nouvelle baisse des investissements dans le secteur de la construction résidentielle : ils ont chuté de 2,7 % en avril par rapport au mois de mars. Les investissements dans la construction de maisons unifamiliales ont chuté de 4,7 %, et cette baisse touche la quasi-totalité des provinces et territoires. On note aussi une baisse des investissements dans les immeubles multilogements pour les familles dans six provinces et un territoire. Bien que le premier ministre Trudeau ait promis, il y a neuf ans, de réduire le coût du logement, les loyers et les hypothèques ont doublé. Dans ma province, la Colombie-Britannique, des gens vivent dans des véhicules récréatifs et d’autres véhicules stationnés dans des haltes routières parce qu’ils n’arrivent pas à trouver de logement.

Monsieur le leader, alors que votre gouvernement a annoncé des milliards de dollars pour le logement, comment se fait-il que la situation s’aggrave au lieu de s’améliorer?

Le sénateur Plett : Bravo!

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je me souviens que lorsque j’ai déménagé à Vancouver en 1975, j’ai payé plus cher pour un appartement minable que je ne l’ai jamais fait dans ma vie — avant ou après — et c’était bien avant votre gouvernement ou l’actuel gouvernement.

Le fait est que, comme nous le savons tous, l’offre et la demande dans le marché du logement sont une question compliquée. De toute évidence, les faits n’intéressent pas les sénateurs de l’autre côté de l’allée.

Le fait demeure que les mises en chantier sont en hausse dans ma ville et dans d’autres villes; ils sont en baisse ailleurs. L’investissement et le capital suivent les circonstances opportunes, et celles-ci sont fonction d’une myriade de choses. Même si cela ne correspond pas aux arguments des notes dont vous semblez maintenant dépendre, les faits demeurent les faits, peu importe les beaux discours.

La sénatrice Martin : Il ne s’agit pas de beaux discours, sénateur, mais de données de la Société canadienne d’hypothèques et de logement et de Statistique Canada. Celle-ci a indiqué qu’en dépit d’une augmentation en mai, elle s’attend à une pression à la baisse sur les mises en chantier pour le reste de l’année 2024.

Monsieur le leader, si c’est le cas, la crise du logement n’est pas près de s’améliorer. Le gouvernement Trudeau est-il d’accord avec la position de la Société canadienne d’hypothèques et de logement?

Le sénateur Plett : C’est honteux.

Le sénateur Gold : Les projections de la Société canadienne d’hypothèques et de logement et l’aide qu’elle apporte aux Canadiens sont importantes. Je crois que tous les Canadiens espèrent — et j’espère que c’est le cas de votre parti — que la situation s’améliorera et que les Canadiens auront accès à des logements abordables et décents.

Le Bureau du Conseil privé

Les nominations au Sénat

L’honorable Wanda Thomas Bernard : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, dans l’histoire du Sénat du Canada, seuls trois hommes noirs canadiens ont été sénateurs. Deux d’entre eux ont exercé leurs fonctions de façon très honorable. L’honorable Calvin Ruck a siégé pendant deux ans, et beaucoup dans cette enceinte se souviendront de l’honorable Donald Oliver, qui a siégé pendant 23 ans. Étant donné qu’il y a actuellement 10 sièges vacants au Sénat, nous pouvons raisonnablement supposer qu’il y aura de nouvelles nominations au Sénat au cours des mois d’été, et nous savons que la représentation est importante.

Sénateur Gold, quand pouvons-nous espérer voir un autre homme noir nommé à ce poste?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question. Je ne suis pas en mesure de savoir qui a posé sa candidature dans chacune des provinces, ni comment l’analyse des candidatures par le comité s’est déroulée, ni qui pourrait déjà figurer sur une liste de candidats fournie au premier ministre.

Ce que je peux dire — je le dis avec fierté, et j’espère que nous en sommes tous fiers —, c’est que le gouvernement en place, grâce à son processus de nomination, a contribué à créer le Sénat le plus diversifié de l’histoire de notre pays, quelle que soit la mesure ou quel que soit l’indicateur utilisé, qu’il s’agisse de la diversité des compétences, de l’origine nationale ou d’autres éléments de ce genre. Je suis persuadé que le gouvernement continuera à traiter l’importance d’une bonne représentativité...

La sénatrice Bernard : Merci, sénateur Gold. Je suis tout à fait d’accord avec vous pour dire que le Sénat n’a jamais été aussi diversifié. Cependant, je suis à court de réponses pour mon petit-fils qui me demande sans cesse : « Mamie, est-ce qu’un homme noir peut être sénateur? ».

(1440)

Le sénateur Gold : C’est une excellente question, et nous devrions faire en sorte que les générations suivantes puissent aspirer à occuper d’importants postes de responsabilité non seulement au Sénat, mais dans tous les domaines.

À cet égard, je partage vos espoirs et vos souhaits pour votre petit-fils. J’espère qu’il aura une réponse encourageante, mais je ne sais tout simplement pas quand cela arrivera.

Les pêches et les océans

Les produits du phoque

L’honorable Iris G. Petten : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat.

Sénateur Gold, pour la première fois depuis sa mise en place, il y a 15 ans, l’interdiction visant le commerce des produits du phoque imposée par l’Union européenne est en cours de révision. C’est une bonne nouvelle. Le rapport de notre comité, intitulé Assurer l’avenir de la chasse au phoque : passons à l’action, contient cette citation de Zoya Martin, directrice des pêches et de la chasse au phoque au gouvernement du Nunavut :

[I]l est nécessaire d’investir réellement et efficacement dans une campagne éducative au Canada et dans le monde entier afin de corriger la désinformation et les mensonges sur la chasse au phoque.

Selon l’article de CBC sur la révision de l’interdiction des produits du phoque imposée par l’Union européenne, le manque d’information et la mésinformation feraient partie des raisons pour lesquelles cette interdiction est toujours en vigueur. Il faut aussi se pencher sur cette question au Canada.

Le gouvernement s’engagera-t-il à prendre des mesures pour donner suite à la recommandation no 5 de notre rapport sur la chasse au phoque, qui recommande une campagne nationale de sensibilisation?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Merci pour votre question, madame la sénatrice, et pour votre travail dans ce dossier.

Le gouvernement a beaucoup d’estime pour le travail du Sénat et pour son étude et il examine activement les recommandations contenues dans le rapport du Sénat. Je dois ajouter que le gouvernement reconnaît que le Canada a la possibilité d’être un leader dans l’industrie des produits du phoque, qui, à mesure qu’elle se développe, apportera la prospérité à de plus en plus de communautés de pêcheurs au pays.

La sénatrice Petten : Sénateur Gold, le gouvernement présentera-t-il à l’Union européenne une proposition en faveur de l’abrogation de l’interdiction ou soutiendra-t-il au moins les propositions des territoires dans leurs efforts visant à faire abroger l’interdiction d’une manière ou d’une autre?

Le sénateur Gold : Merci.

Soyons clairs : le gouvernement appuie la croissance du marché des produits du phoque canadiens et il prendra les mesures appropriées à cet égard. Il continuera à travailler en étroite collaboration avec les dirigeants de l’industrie, les chasseurs et les communautés autochtones afin d’explorer les possibilités de développer davantage le marché des produits du phoque canadiens.

Le patrimoine canadien

Les contrats de services

L’honorable Tony Loffreda : Sénateur Gold, ma question porte sur le coût des forfaits de téléphonie cellulaire.

Le Canada a toujours été l’un des endroits où avoir un téléphone cellulaire coûte le plus cher. Nous savons que le gouvernement s’est fixé comme priorité de faire baisser le coût des forfaits de téléphonie cellulaire. Récemment, Statistique Canada a rapporté que le coût a diminué de 50 % depuis 2018. Lundi dernier, lors de la 23e édition du Sommet canadien des télécommunications, le ministre Champagne a dit que nous nous devons de mieux informer les gens sur l’existence des forfaits plus économiques. Ce n’est peut-être pas au gouvernement d’assurer la promotion gratuite des entreprises de télécommunications, mais des Canadiens éprouvent des difficultés financières.

Ne serait-il pas logique que le gouvernement fasse la promotion de ces mesures d’économie et informe les Canadiens de ces possibilités?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de la question, monsieur le sénateur.

Le gouvernement a assurément pris plusieurs mesures pour informer les Canadiens qu’il existe maintenant des forfaits plus économiques et de meilleures offres de téléphonie cellulaire au pays. Sensibiliser davantage les Canadiens aux façons d’économiser sur les forfaits serait certes approprié.

À ce sujet, je prends un instant pour souligner que le gouvernement a pris des mesures concrètes pour faire baisser le coût des forfaits de téléphonie cellulaire de 25 %. C’est en fait un engagement qui a été surpassé. En décembre 2023, Statistique Canada a rapporté que le coût des forfaits a diminué de 50 % depuis décembre 2018.

Le sénateur Loffreda : Le gouvernement convient-il que les compagnies de téléphone devraient permettre aux Canadiens de changer leur forfait sans stress ni pénalité? Ne serait-il pas également logique que les compagnies aident les consommateurs à trouver des forfaits et des offres avant la fin de leur contrat?

L’offre de forfaits moins chers n’est qu’une partie de la solution. Les Canadiens doivent aussi être en mesure de changer de forfait ou de fournisseur sans encourir de pénalité financière majeure.

Le sénateur Gold : En un mot : oui. Les Canadiens qui souhaitent passer à un forfait Internet ou à un forfait de téléphonie plus abordable se heurtent souvent à des pratiques décourageantes de la part des entreprises de télécommunications, telles que des frais d’annulation, qui peuvent empêcher les Canadiens d’économiser de l’argent, ou de longues attentes au téléphone avec de la musique de fond insupportable pour les « divertir ».

C’est pourquoi, dans le budget de 2024, le gouvernement propose d’apporter des modifications législatives à la Loi sur les télécommunications afin d’interdire aux fournisseurs de services de facturer des frais de transfert aux consommatrices et aux consommateurs.

L’emploi et le développement social

Le programme national d’alimentation dans les écoles

L’honorable Sharon Burey : Ma question s’adresse au représentant du gouvernement au Sénat du Canada et porte sur la mise en œuvre du programme national d’alimentation dans les écoles.

On nous a dit qu’il y aurait des accords bilatéraux avec les provinces et les territoires pour les transferts de fonds, avec un objectif de mise en œuvre dès l’année scolaire 2024-2025. Sénateur Gold, jusqu’à présent, le gouvernement a-t-il signé des accords avec les provinces et les territoires pour le programme national d’alimentation dans les écoles? Sinon, quand pensez-vous que ces accords seront signés?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de poser cette question et d’évoquer ce programme très important pour les enfants et leur famille.

À l’heure actuelle, je n’ai pas connaissance d’un accord qui aurait été signé avec les provinces et les territoires. Cependant, le gouvernement s’attache à faire en sorte que le programme soit mis en œuvre dès que possible. Comme je l’ai dit à l’occasion des débats sur le budget, le gouvernement fédéral collaborera avec les gouvernements provinciaux, territoriaux et autochtones pour déployer le programme national d’alimentation dans les écoles, et le financement commencera dès l’année scolaire 2024-2025.

La sénatrice Burey : Sénateur Gold, l’année dernière, il y avait 30 écoles du comté de Windsor-Essex sur la liste d’attente en vue d’une approbation pour l’accès au Programme d’alimentation saine pour les élèves de l’Ontario. Le programme national d’alimentation dans les écoles devrait rejoindre 400 000 élèves à l’échelle du Canada. La mise en œuvre de ce programme est vitale pour plus de 36 000 élèves du primaire de la région de Windsor-Essex.

Les programmes d’alimentation dans les écoles ont un impact positif sur la présence en classe, sur la réussite et sur les résultats en santé. Les enfants du pays ne peuvent plus attendre. Sénateur Gold, pouvez-vous donner le nombre d’écoles au Canada qui sont présentement en attente d’une approbation et dire quelles mesures sont prises...

Le sénateur Gold : Merci de votre question.

Je ne suis pas en mesure de vous donner le nombre d’écoles en attente d’une approbation dans les régimes provinciaux, notamment de l’Ontario, mais je peux dire que le gouvernement fait tout en son pouvoir pour déployer ce programme en partenariat avec les provinces, les territoires et les pouvoirs autochtones. Je suis convaincu que le gouvernement remplira sa promesse, chers collègues, comme il l’a fait au sujet des accords sur l’éducation préscolaire et la garde des enfants qui ont été conclus.

Les affaires mondiales

Le Corps des Gardiens de la révolution islamique

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Monsieur le leader, peu après l’horrible attentat du 7 octobre perpétré par le Hamas contre Israël, le ministre LeBlanc a déclaré qu’il avait demandé à ses responsables de la sécurité de mettre à jour leurs conseils sur l’inscription du Corps des Gardiens de la révolution islamique d’Iran sur la liste des entités terroristes. En janvier, lors d’une cérémonie en l’honneur des victimes du vol PS752, le premier ministre a prétendu que son gouvernement « [chercherait] des moyens d’inscrire le CGRI de manière responsable sur la liste des entités terroristes ».

En date de la semaine dernière, six ans se sont écoulés depuis que la Chambre des communes a adopté une motion demandant l’inscription immédiate du Corps des Gardiens de la révolution islamique. Rien n’a été fait, monsieur le leader. Pourquoi les Canadiens ne devraient-ils pas considérer les promesses du gouvernement Trudeau comme des paroles creuses lorsqu’il n’est même pas en mesure de tenir cette promesse?

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat) : Je vous remercie de votre question.

Vous avez tout à fait raison de souligner le rôle très nocif que joue l’Iran dans le monde, non seulement dans le contexte du conflit dans la bande de Gaza, mais aussi dans le Nord d’Israël et ailleurs par l’entremise de son mandataire, le Hezbollah.

Comme on le sait, le gouvernement a pris de nombreuses mesures afin de sanctionner un nombre croissant de fonctionnaires associés au gouvernement iranien. Comme l’a dit le premier ministre, le gouvernement cherche des moyens d’inscrire, de façon responsable, le Corps des Gardiens de la révolution islamique dans la liste des entités terroristes, et il continue d’explorer des façons appropriées de le faire.

Le sénateur Plett : Monsieur le leader, hier, la sénatrice Miville‑Dechêne vous a demandé des renseignements de base sur les sanctions imposées à l’Iran par votre gouvernement. Est-ce que des actifs ont été gelés? Est-ce que des personnes faisant l’objet de sanctions ont été expulsées du Canada? Comme d’habitude, votre réponse était loin d’être satisfaisante, sénateur Gold. Monsieur le leader, si vous ne connaissez pas les réponses à ces questions, pouvez-vous vous engager à les obtenir et à les présenter au Sénat?

(1450)

Le sénateur Gold : Les mesures prises par le gouvernement à l’égard des individus et des organisations au Canada qui agissent à l’encontre des intérêts nationaux et des activités contraires à l’intérêt national menées au Canada seront mises en œuvre par le gouvernement de manière appropriée et responsable.

Dépôt des réponses à une question inscrite au Feuilleton

L’agriculture et l’agroalimentaire—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Agriculture et Agroalimentaire Canada, y compris l’Agence canadienne du pari mutuel, la Commission canadienne des grains et le Conseil des produits agricoles du Canada.

L’Agence de promotion économique du Canada atlantique—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Agence de promotion économique du Canada atlantique.

L’Agence canadienne de développement économique du Nord—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Agence canadienne de développement économique du Nord.

Le revenu national—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Agence du revenu du Canada.

L’Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Développement économique Canada pour les régions du Québec.

Les pêches, les océans et la Garde côtière canadienne—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Pêches et Océans Canada, y compris la Garde côtière canadienne.

Les services aux Autochtones—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Services aux Autochtones Canada, y compris Pétrole et gaz des Indiens du Canada.

La défense nationale—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Défense nationale, le Centre de la sécurité des télécommunications, le Comité externe d’examen des griefs militaires, la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire et l’Ombudsman de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes.

L’environnement et le changement climatique—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Environnement et Changement climatique Canada, l’Agence d’évaluation d’impact du Canada et Parcs Canada.

L’emploi, le développement de la main-d’œuvre et les langues officielles—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Emploi et Développement social Canada, Normes d’accessibilité Canada et le Centre canadien d’hygiène et de sécurité au travail.

L’Agence fédérale de développement économique pour le Sud de l’Ontario—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Agence fédérale de développement économique pour le Sud de l’Ontario.

L’Agence fédérale de développement économique pour le Nord de l’Ontario—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Agence fédérale de développement économique pour le Nord de l’Ontario.

Les finances—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Ministère des Finances Canada et le Bureau du surintendant des institutions financières.

Le développement international—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Affaires mondiales Canada et Investir au Canada.

La santé—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Santé Canada, l’Agence de la santé publique du Canada, l’Agence canadienne d’inspection des aliments, les Instituts de recherche en santé du Canada et le Conseil d’examen du prix des médicaments brevetés.

Les relations Couronne-Autochtones—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada.

Le logement, l’infrastructure et les collectivités—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Infrastructure Canada.

L’immigration, les réfugiés et la citoyenneté—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada et la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada.

L’innovation, les sciences et l’industrie—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Innovation, Sciences et Développement économique Canada, y compris les organismes de services spéciaux, la Commission du droit d’auteur du Canada, l’Agence spatiale canadienne, le Conseil national de recherches Canada, le Conseil de recherches en sciences naturelles et en génie du Canada, le Conseil de recherches en sciences humaines du Canada et Statistique Canada.

La justice et le procureur général—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Ministère de la Justice, la Commission canadienne des droits de la personne et le Service canadien d’appui aux tribunaux administratifs.

L’énergie et les ressources naturelles—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Ressources naturelles Canada, la Régie de l’énergie du Canada, la Commission canadienne de sûreté nucléaire et l’Administration du pipe-line du Nord.

L’Agence du développement économique du Pacifique—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Développement économique Canada pour le Pacifique.

Le patrimoine canadien—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Patrimoine canadien, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, Bibliothèque et Archives Canada, la Commission des champs de bataille nationaux et l’Office national du film du Canada.

Le Bureau du Conseil privé—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Bureau du Conseil privé.

Le Service des poursuites pénales—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Service des poursuites pénales du Canada.

L’Agence du développement économique du Canada pour les Prairies—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

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La sécurité publique, les institutions démocratiques et les affaires intergouvernementales—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Sécurité publique Canada, l’Agence des services frontaliers du Canada, le Service canadien du renseignement de sécurité, le Service correctionnel du Canada, la Commission des libérations conditionnelles du Canada et la Gendarmerie royale du Canada.

Les services publics et l’approvisionnement—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

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Les femmes, l’égalité des genres et la jeunesse—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Femmes et Égalité des genres Canada.

Le Conseil du Trésor—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et l’École de la fonction publique du Canada.

Les transports—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Transports Canada et l’Office des transports du Canada.

La sécurité publique, les institutions démocratiques et les affaires intergouvernementales—Le Secrétariat des conférences intergouvernementales canadiennes—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Secrétariat des conférences intergouvernementales canadiennes.

La protection civile—La Commission de la fonction publique—Le Bureau de la sécurité des transports—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Commission de la fonction publique du Canada et le Bureau de la sécurité des transports du Canada.

Les anciens combattants—La publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) dépose la réponse à la question no 39, en date du 23 novembre 2021, inscrite au Feuilleton et Feuilleton des préavis au nom de l’honorable sénateur Plett, concernant la publicité gouvernementale sur Facebook et Instagram — Anciens Combattants Canada et le Tribunal des anciens combattants (révision et appel).


ORDRE DU JOUR

Les travaux du Sénat

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, conformément à l’article 4-12(3) du Règlement, j’informe le Sénat que, lorsque nous passerons aux affaires du gouvernement, le Sénat abordera les travaux dans l’ordre suivant : l’étude du vingt-quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles, suivie de tous les autres articles dans l’ordre où ils figurent au Feuilleton.

Projet de loi corrective de 2023

Adoption du vingt-quatrième rapport du Comité des affaires juridiques et constitutionnelles

Le Sénat passe à l’étude du vingt-quatrième rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles (projet de loi S-17, Loi visant à corriger des anomalies, contradictions, archaïsmes ou erreurs relevées dans les lois et règlements du Canada et à y apporter d’autres modifications mineures et non controversables ainsi qu’à abroger certaines dispositions ayant cessé d’avoir effet, avec des amendements), présenté au Sénat le 13 juin 2024.

L’honorable Mobina S. B. Jaffer propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui en tant que présidente du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles pour parler de deux amendements proposés dans le vingt-quatrième rapport du comité, sur le projet de loi S-17, Loi visant à corriger des anomalies, contradictions, archaïsmes ou erreurs relevées dans les lois et règlements du Canada et à y apporter d’autres modifications mineures et non controversables ainsi qu’à abroger certaines dispositions ayant cessé d’avoir effet.

Le projet de loi S-17, Loi corrective 2023, a été étudié en comité le 12 juin 2024, conformément à l’ordre de renvoi du 30 mai 2024.

[Français]

Ce projet de loi s’inscrit dans le cadre du programme de correction des lois, qui vise à corriger les anomalies, les incohérences, la terminologie désuète ou les erreurs qui se sont glissées dans les lois fédérales.

[Traduction]

Depuis la création du programme, en 1975, 12 lois correctives ont été adoptées, dont la plus récente en 2017. Le projet de loi S-17 est la 13e loi corrective.

[Français]

Pour rappel, le programme prévoit un processus accéléré pour faciliter l’adoption de modifications mineures et non controversées.

[Traduction]

Honorables sénateurs, un comité de chacune des Chambres étudie les propositions avant qu’un projet de loi soit présenté. Les propositions pour la loi corrective de 2023 ont été étudiées par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles en octobre dernier et le comité a déposé son 25e rapport le 12 décembre 2023 dans lequel il recommandait la correction, la suppression ou le retrait de certaines propositions. Le Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes a également étudié la proposition et fait des recommandations similaires en février de cette année. Le projet de loi S-17 a été présenté au Sénat le 19 mars 2024 et il reflète les recommandations qui découlent des études sur la proposition de loi corrective.

Le projet de loi originel visait à modifier 58 lois fédérales et 3 règlements connexes. Le comité sénatorial a tenu une réunion et reçu des fonctionnaires du ministère de la Justice dans le cadre de son étude sur le projet de loi S-17. Sur la recommandation des fonctionnaires, le comité a abrogé les articles 137 et 158 du projet de loi, qui modifiaient respectivement la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre et la Loi sur l’évaluation d’impact. Des modifications à ces dispositions ont également été inscrites dans le projet de loi C-69, Loi no 1 d’exécution du budget de 2024, présenté après le projet de loi S-17.

Au cours de leur témoignage, les fonctionnaires du ministère de la Justice ont indiqué que, depuis la présentation du projet de loi S-17, la Loi sur l’évaluation d’impact fait également l’objet d’un processus de modification distinct, par l’entremise de l’actuel projet de loi C-69, Loi no 1 d’exécution du budget de 2024, en réponse à une récente décision de la Cour suprême du Canada. Les dispositions du projet de loi C-69 modifieraient substantiellement l’article 69 de la Loi sur l’évaluation d’impact.

Le projet de loi C-69 modifie également la Loi sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre. En conséquence, le ministère de la Justice du Canada a recommandé que les articles 137 et 158 du projet de loi S-17 soient éliminés. Ainsi, le comité était convaincu qu’il était justifié de retirer ces articles du projet de loi S-17 afin d’éviter de possibles incohérences ou des modifications qui ne concordent pas avec les dispositions du projet de loi C-69.

Votre comité a adopté ce rapport avec ces deux amendements à l’unanimité.

Merci.

(1500)

[Français]

L’honorable Claude Carignan : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à l’étape du rapport sur le projet de loi S-17, dont le titre abrégé est Loi corrective de 2023.

Lors de son intervention à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-17 le 21 mars dernier, le sénateur Cotter a affirmé ceci :

Je dois dire, chers collègues, qu’il ne s’agit pas du projet de loi le plus passionnant que nous aurons à examiner dans cette enceinte.

Le sénateur Cotter avait bien raison, alors je serai bref.

Pour ma part, lors de mon intervention à l’étape de la deuxième lecture, j’ai insisté pour que le projet de loi S-17 soit étudié en comité malgré son caractère très particulier. En effet, ce projet de loi se distingue des autres projets de loi réguliers du gouvernement, en ce sens que le ministre de la Justice doit, dans le cas d’un projet de loi correctif, présenter un avant-projet de loi au Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles et au Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes pour que ceux-ci l’étudient. Ces comités ont donc étudié les mesures qui sont aujourd’hui contenues dans le projet de loi S-17 avant que celui-ci soit déposé le 19 mars dernier. Au total, ces deux comités n’ont eu que trois séances pour étudier ce projet de loi, qui comporte 165 articles et vient modifier 58 lois et 3 règlements connexes, ce qui représente tout de même un projet de loi costaud.

Chers collègues, si j’ai insisté pour que le projet de loi S-17 soit étudié en comité, c’est que je crois sincèrement que jamais le Sénat ne doit se soustraire à son obligation et à son devoir de pousser un peu plus loin sa réflexion et son analyse des projets de loi et de procéder à un second examen objectif. D’ailleurs, sans l’étude du projet de loi S-17 en comité et sans son adoption rapide à l’étape de la troisième lecture, les deux amendements dont a fait état la sénatrice Jaffer n’auraient probablement pas été déposés et adoptés, ce qui aurait, aux dires de la vice-présidente du comité, la sénatrice Batters, posé problème. Je la cite :

Si nous ne l’avions pas étudié ici, ce projet de loi aurait peut‑être déjà reçu la sanction royale et nous aurions […] des conséquences imprévues avec la loi d’exécution du budget.

Dans mon discours du 30 mai dernier à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi S-17, j’ai soulevé des préoccupations très spécifiques et techniques par rapport à ce projet de loi, et notre étude en comité m’a permis d’approfondir ces questions et d’avoir des réponses.

Je me questionnais notamment sur l’article 141 du projet de loi, qui propose de modifier le paragraphe 48(3) de la Loi sur les produits antiparasitaires pour remplacer l’expression « dwelling house », en français « maison d’habitation », par « dwelling-place », soit « local d’habitation » en français. Or, un document des analystes de la Bibliothèque du Parlement nous signalait que le terme « dwelling-place » ne semblait pas employé dans d’autres lois en anglais pour traduire le terme « local d’habitation ». C’est le cas notamment de l’article 109 de la Loi maritime du Canada et de l’article 46.13 de la Loi sur le pilotage, qui sont deux dispositions qui ne sont pas incluses dans le projet de loi S-17, mais qui faisaient partie des comparatifs.

Je me demandais aussi quelle était la différence entre les expressions « maison d’habitation » et « local d’habitation », étant donné que le terme « maison d’habitation » est utilisé dans 23 articles du Code criminel et est même défini à l’article 2. J’ai pu comprendre que le local d’habitation était plus large dans l’interprétation que la maison d’habitation, ce qui avait pour conséquence que, dans le cadre de la Loi sur les produits antiparasitaires, la nécessité d’avoir une exception à l’inspection sans mandat plus large était utile pour protéger les droits privés d’intrusion dans la vie privée ou dans la résidence d’habitation. Il s’agit d’une question importante qui a été posée aux fonctionnaires dans le but de nous assurer que le projet de loi S-17 ne vienne pas créer de confusion.

La réponse que j’ai reçue m’a permis de comprendre le raisonnement logique du gouvernement, mais m’a aussi laissé perplexe sur certains éléments. En effet, l’intention de cet article est d’harmoniser la loi dans son propre corpus de dispositions et de faire en sorte que les termes soient utilisés partout dans la même loi, en l’occurrence sur la question du local d’habitation. C’est donc la perspective d’une étude verticale de la loi qui a été analysée en silo, sans tenir compte des termes et expressions utilisés dans les autres lois, ce qui était l’exemple du Code criminel. L’étude en silo ne me semble pas une pratique qui donne des résultats probants.

D’ailleurs, c’est cette approche analytique en silo qui explique les deux amendements adoptés par le Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles. Comment expliquer autrement que le gouvernement, à 45 jours d’intervalle, dépose deux projets de loi qui se contredisent et s’opposent, ce qui force le gouvernement à modifier un des deux projets de loi qu’il vient tout juste de déposer? Une approche cohérente, concertée et horizontale aurait évité un tel cafouillage. À l’évidence, la main droite du gouvernement ne sait pas nécessairement ce que fait sa main gauche. C’est inquiétant, mais il en est ainsi.

Néanmoins, j’appuie le projet de rapport du Comité sénatorial permanent des affaires juridiques et constitutionnelles ainsi que le projet de loi qui sera adopté à l’étape de la troisième lecture. Je vous invite donc, chers collègues, à l’appuyer également. Merci.

Des voix : Bravo!

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée, et le rapport est adopté.)

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi modifié pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Cotter, la troisième lecture du projet de loi modifié est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

Projet de loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2023

Troisième lecture—Ajournement du débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Moncion, appuyée par l’honorable sénatrice McBean, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-59, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023.

L’honorable Lucie Moncion : Honorables sénateurs, j’ai le privilège de prendre la parole à l’étape de la troisième lecture à titre de marraine du projet de loi C-59, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023.

Comme vous le savez, cette proposition législative contribuerait à stimuler l’économie nationale en rendant la vie plus abordable pour les Canadiens, en favorisant la construction de logements supplémentaires et en générant des emplois de qualité.

Dans le cadre de ce discours, je ferai, dans un premier temps, un résumé des travaux du Comité sénatorial permanent des finances nationales, et dans un deuxième temps, j’aborderai les mesures que je n’ai pas eu la chance de couvrir à l’étape de la deuxième lecture de ce projet de loi.

D’emblée, j’aimerais prendre un moment pour remercier très sincèrement les membres du Comité des finances nationales qui, malgré un emploi du temps chargé en cette fin de session, ont mené une étude diligente et rigoureuse d’un projet de loi volumineux. Merci, chers collègues.

Dans le cadre de son étude, le Comité des finances nationales a entendu plusieurs témoins et examiné des mémoires issus de nombreuses parties prenantes, dont le Business Council of Alberta, l’Association canadienne des carburants, Ecojustice, l’Association canadienne des médecins pour l’environnement, le Centre québécois du droit de l’environnement, l’Association canadienne des produits de consommation spécialisés, et j’en passe. Il a aussi entendu les fonctionnaires provenant des différents ministères concernés par le projet de loi, ainsi que la Chambre de commerce du Canada.

L’étude préalable du projet de loi avait permis de cerner les principaux enjeux ainsi que d’approfondir la compréhension des différentes mesures proposées.

Lorsque le projet de loi a été renvoyé au comité après la deuxième lecture, le comité s’est davantage concentré sur les mesures ayant fait l’objet d’amendements à la Chambre des communes. Par ailleurs, l’une d’entre elles, portant sur la section modifiant la Loi sur la concurrence, soit la section 6 de la partie 5, a suscité des préoccupations chez certaines parties prenantes. Le comité a donc porté une attention particulière à ces préoccupations et aux conséquences potentielles de l’amendement en question.

[Traduction]

Avant d’entrer dans les détails de cet amendement et de la discussion ayant eu lieu au comité, je vais brièvement exposer les fondements du régime de concurrence et son fonctionnement au Canada.

(1510)

La Loi sur la concurrence est une loi-cadre économique fédérale qui a pour but de favoriser une plus grande concurrence au moyen de dispositions civiles et pénales qui luttent contre diverses formes de comportements anticoncurrentiels et nuisibles au sein du marché. La Loi sur la concurrence est administrée et appliquée par le Bureau de la concurrence, un organisme indépendant d’application de la loi qui protège et favorise des marchés concurrentiels en permettant aux consommateurs de faire des choix éclairés.

Au cours des dernières années, surtout depuis la consultation sur l’avenir de la politique de la concurrence au Canada qui a été lancée à la fin de 2022, de nombreux intervenants et membres du public ont exprimé des inquiétudes au sujet de la concentration croissante des entreprises au Canada, de la hausse des prix et du pouvoir disproportionné dont jouissent les grandes sociétés.

Les modifications proposées par le projet de loi C-59 touchent des secteurs soigneusement choisis qui peuvent contribuer directement à régler ces problèmes de longue date.

J’aimerais discuter du travail accompli par le Comité permanent des finances de la Chambre des communes et revenir sur les inquiétudes exprimées après l’adoption d’une série d’amendements à l’article 236 du projet de loi afin de mieux lutter contre l’écoblanchiment. Selon certains, la disposition ajoutée est trop vague et trop mal définie pour respecter les normes internationalement reconnues. Je rappelle qu’une bonne partie des témoins entendus par ce comité étaient favorables à ce qu’on resserre les critères énoncés à l’article 236 du projet de loi. C’est aussi ce qui ressortait des mémoires reçus par le Comité sénatorial permanent des finances nationales, dont celui de l’Association canadienne des médecins pour l’environnement, du Centre québécois du droit de l’environnement et d’Ecojustice.

Le Bureau de la concurrence a également recommandé au Comité permanent des finances de la Chambre des communes de resserrer ces critères, car il est bien conscient de l’ampleur que prend le problème de l’écoblanchiment au Canada. La première série d’amendements proposés par le comité de la Chambre s’inspirait des changements recommandés par les groupes environnementalistes, qui souhaitaient qu’on élargisse la portée des dispositions afin qu’elles englobent les prétentions environnementales en général et qu’on oblige les entreprises à dévoiler publiquement les preuves et les essais permettant d’étayer leurs affirmations. Un sous-amendement a ensuite été présenté afin que les entités qui affirment que leurs pratiques sont écologiques ne soient tenues de révéler la teneur des essais auxquels elles ont soumis leurs produits ou le fondement de leurs activités commerciales globales qu’en cas de doute de la part du Bureau de la concurrence et non au moment où elles font leur affirmation, le but étant d’éviter un surcroît de tracasseries administratives aux PME.

Par conséquent, le libellé de la série actuelle d’amendements établit un équilibre qui maintient l’intention et l’orientation des amendements, mais qui évite les conséquences et les fardeaux involontaires pour les entreprises. L’exigence concernant les éléments corroboratifs protège la concurrence en garantissant que les consommateurs peuvent se fier aux déclarations sur les entreprises et leurs activités.

Il convient également de noter que l’amendement et le sous-amendement à l’article 236 adoptés par le Comité permanent des finances de la Chambre des communes ont obtenu le soutien de tous les partis et ont ensuite été adoptés à l’unanimité par la Chambre des communes à l’étape de la troisième lecture. Dans une lettre envoyée au Comité sénatorial permanent des banques et du commerce le 31 mai 2024, puis au Comité sénatorial permanent des finances nationales, le Bureau de la concurrence traite explicitement des amendements en question. Il déclare :

Bien que nous ayons recommandé une étude plus approfondie, nous respectons la décision du Comité permanent des finances de la Chambre des communes d’apporter des modifications au paragraphe 236(1) sur cette question importante. Comme nous l’avons mentionné plus haut, il a pris cette décision après avoir entendu les différents intervenants. Les modifications ont finalement été adoptées à l’unanimité par la Chambre des communes en troisième lecture le 28 mai 2024.

Un peu plus loin dans la lettre, on lit ceci :

À notre avis, les propositions de modifications de la Loi sur la concurrence contenues dans le projet de loi C-59 représentent une mise à niveau tant attendue et nécessaire de notre cadre de droit de la concurrence qui permettra de mieux répondre aux besoins des Canadiens et Canadiennes.

Cette lettre et l’intervention subséquente du Bureau de la concurrence indiquent qu’avec le libellé actuellement proposé dans le projet de loi C-59, l’autorité indépendante du Canada en matière de concurrence est préparée et outillée pour remplir son mandat de défense et de protection des consommateurs canadiens et de promotion d’un marché concurrentiel et innovant au sein duquel les entreprises canadiennes peuvent prospérer.

À cet égard, les fonctionnaires du ministère de l’Innovation, des Sciences et de l’Industrie ont longuement témoigné devant le comité. Selon eux, l’introduction du nouveau concept de méthodologie reconnue à l’échelle mondiale dans la disposition sur l’écoblanchiment ne pose pas de problème, car la Loi sur la concurrence est un cadre raisonné et indépendant du marché. Les termes généraux de la loi sont d’abord précisés par le Bureau de la concurrence au moyen de lignes directrices élaborées avec les parties prenantes, puis par les tribunaux au moyen de la jurisprudence.

Plus important encore, le Bureau de la concurrence s’est engagé à examiner et à élaborer des lignes directrices pour intégrer les modifications proposées par le projet de loi C-59 et le projet de loi C-56 après avoir consulté les parties prenantes.

[Français]

Le Bureau de la concurrence s’efforcera de mettre en place un encadrement solide et prévisible pour garantir une mise en œuvre juste de la loi. Il est courant, notamment en droit de la concurrence, d’inclure dans le texte de loi une terminologie large et libérale, fondée sur des principes, qui sera ensuite définie et précisée par le Bureau de la concurrence à la lumière de consultations.

Bien que l’expression « méthode reconnue à l’échelle internationale » puisse sembler vague, une interprétation selon le sens ordinaire des mots ainsi que les mémoires des parties prenantes nous éclairent quant à l’intention du législateur derrière cette formulation. Par exemple, les parties prenantes se réfèrent dans leurs mémoires à des méthodes employées par l’Union européenne.

Pour assurer la compétitivité du Canada sur la scène internationale, il est essentiel d’adopter un cadre législatif offrant la flexibilité nécessaire pour intégrer les avancées mondiales en matière environnementale et ajuster nos directives, nos politiques et la réglementation en conséquence. Cette approche nous permet de rester à la pointe de meilleures pratiques et de demeurer réactifs face aux progrès réalisés ailleurs. En définitive, cela joue un rôle crucial dans notre capacité à rester compétitifs sur le marché mondial et à assurer un avenir prospère pour le Canada.

Pour répondre aux préoccupations des parties prenantes, le comité a formulé une importante observation. Je remercie le sénateur Dalphond de l’avoir proposée et je salue le travail du sénateur Gignac, qui a collaboré avec lui dans le cadre de cette démarche.

[Traduction]

Je tiens également à remercier la sénatrice Ross, qui a courageusement proposé un amendement pour remédier au problème. Je fais maintenant lecture des importantes observations que le comité a adoptées :

Le Comité souligne qu’une proportion significative d’acteurs industriels actifs au Canada ont fait de réels efforts pour soutenir le passage à une économie zéro émission nette et pour différencier leurs produits et leurs entreprises sur cette base. Ces efforts légitimes ne doivent pas être découragés ou entravés par crainte des conséquences involontaires de la poursuite d’actions d’écoblanchiment.

Votre comité estime qu’il est important que le Bureau de la concurrence procède à une consultation sérieuse afin d’établir des lignes directrices claires dans ce domaine, et que tout droit d’action privé soit éclairé par ces lignes directrices quant à ce qui peut être considéré comme trompeur dans le domaine de la protection de l’environnement.

En outre, bien que [le paragraphe] 236(1) du projet de loi C-59 souligne l’importance d’une méthodologie internationalement reconnue pour justifier de telles affirmations, le Comité estime que l’analyse devrait aussi inclure les meilleures pratiques qu’elles soient fédérales, ou de partout ailleurs au Canada, telles que celles définies par Environnement et Changement climatique Canada.

Ce constat, les interventions du Bureau de la concurrence suite à l’adoption de l’amendement et le travail effectué par le Comité sénatorial permanent des finances nationales devraient nous rassurer sur le fait que le projet de loi contient toutes les mesures de protection nécessaires pour assurer une mise en œuvre adéquate, particulièrement en ce qui concerne la section modifiant la Loi sur la concurrence.

(1520)

Les modifications à la Loi sur la concurrence prévues dans le projet de loi C-59 ne sont qu’un élément d’une réforme législative plus vaste du régime de la concurrence au Canada. À la suite d’une consultation menée par un ancien collègue, l’ancien sénateur Howard Wetston, la Loi no 1 d’exécution du budget de 2022, anciennement le projet de loi C-19, a apporté plusieurs modifications importantes. Par la suite, le projet de loi C-56 a également proposé diverses modifications à la Loi sur la taxe d’accise et à la Loi sur la concurrence, s’insérant ainsi dans le cadre de cette réforme. Par conséquent, le projet de loi C-59 représente la suite d’une réforme tant attendue, fondée sur le travail de notre ancien collègue. Je tiens à exprimer ma gratitude à l’ancien sénateur Wetston pour ses efforts inlassables. Il a été une force avant-gardiste dans la modernisation du régime de concurrence au Canada.

Passons maintenant aux observations sur l’abordabilité, notamment la deuxième observation adoptée par le comité au sujet de l’abordabilité, qu’il est également important de mentionner. Cette observation met en lumière de nombreuses dispositions du projet de loi et résume son esprit et son objectif, tout en soulignant l’importance de notre engagement à l’égard de l’atteinte de ces objectifs par des efforts concertés. Je remercie la sénatrice Pate d’avoir proposé l’observation suivante, qu’a également adoptée le comité :

Étant donné que le gouvernement a fait de l’accessibilité au logement et à la nourriture des priorités dans le projet de loi C-59, il doit s’assurer que ses décisions sont soutenues par une mise en œuvre adéquate des mesures d’équité fiscale proposées dans le projet de loi et qu’elles traitent efficacement de la sécurité du revenu et de l’inclusion pour les Canadiens en situation d’instabilité financière et les plus démunis.

[Français]

En ce qui concerne l’accessibilité à des logements abordables et les mesures visant à améliorer la qualité de vie des Canadiennes et des Canadiennes, je me permets de rappeler aux sénateurs certaines mesures importantes qui se trouvent dans le projet de loi C-59.

Le projet de loi permettrait d’instaurer le crédit d’impôt à l’investissement pour le captage, l’utilisation et le stockage du carbone, ainsi que le crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres.

Ces mesures sont conçues pour stimuler l’investissement afin de créer des emplois de qualité. Ils feront en sorte de placer notre pays dans le peloton de tête pour ce qui est d’attirer les investissements, tout en bâtissant une économie à la fois plus vigoureuse et à faibles émissions de carbone.

Par ailleurs, le projet de loi supprimerait temporairement la TPS sur la construction de logements locatifs neufs, construits pour ou par des coopératives d’habitation qui offrent des locations à long terme.

Le projet de loi C-56 avait mis en œuvre une telle mesure pour les nouveaux projets de logements locatifs. Le projet de loi actuel va donc encore plus loin en vue d’accroître davantage l’offre de nouveaux logements.

Je vais maintenant aborder certaines des mesures que je n’ai pas eu l’occasion d’aborder dans mon discours à l’étape de la deuxième lecture.

Pour ce qui est des restrictions des dépenses excessives d’intérêts et de financement, la partie 1a) de la partie 1 du projet de loi C-59 vise à mettre en place les règles de restrictions des dépenses excessives d’intérêts et de financement, ce qu’on appelle en anglais les règles « EIFEL ». Ces règles visent à prévenir l’érosion de l’assiette fiscale canadienne par le biais de déductions d’intérêts excessives. Elles visent les grandes entreprises multinationales et s’alignent sur les recommandations du rapport Action 4 du Plan d’action concernant l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices de l’OCDE. En adoptant ces règles, le Canada harmonise ses règles avec ses partenaires internationaux du G7, dont les États-Unis, le Royaume-Uni et plusieurs États membres de l’Union européenne.

Pour les dispositifs hybrides, la partie 1b) de la partie 1 du projet de loi C-59 vise aussi à prévenir l’érosion de l’assiette fiscale du Canada en neutralisant les avantages fiscaux de ces derniers. Les dispositifs hybrides sont des structures d’évitement fiscal transfrontalières qui exploitent des différences dans le traitement fiscal d’entités commerciales ou d’instruments financiers dans le droit de deux administrations ou plus, dans le but de générer une asymétrie de déductions ou de non-déductions ou encore une asymétrie de doubles déductions. Dans le premier cas, on parle d’une déduction relative à un paiement dans un pays sans revenu imposable pour le bénéficiaire dans un autre pays, et dans le second cas, on parle des déductions disponibles dans plusieurs pays relativement à une seule dépense.

En adoptant ces règles, le Canada harmonise les siennes avec ses partenaires internationaux du G20, dont les États-Unis, le Royaume-Uni et plusieurs États membres de l’Union européenne.

Parlons maintenant des transferts intergénérationnels d’entreprises, projet qui tenait à cœur au sénateur Forest. La partie 1d) de la partie 1 du projet de loi C-59 vise à faciliter le transfert intergénérationnel d’une entreprise tout en protégeant l’intégrité du régime fiscal.

Vous vous souviendrez sûrement du projet de loi C-208, Loi modifiant la Loi de l’impôt sur le revenu (transfert d’une petite entreprise ou d’une société agricole ou de pêche familiale), qui a été adopté par le Sénat en juin 2021 et a reçu la sanction royale le 29 juin 2021. Les règles instaurées par le projet de loi C-208 contiennent des mesures de protection inefficaces et s’appliquent en l’absence d’un transfert légitime à la prochaine génération. Le projet de loi C-59 vise à corriger ces lacunes, tout en conservant l’esprit et l’objet du projet de loi.

Plus précisément, le projet de loi C-59 garantirait que l’exception à la règle contre le dépouillement de surplus ne s’applique que lorsqu’un véritable transfert intergénérationnel d’entreprise a lieu.

Afin d’offrir une certaine souplesse aux contribuables qui souhaitent entreprendre un vrai transfert intergénérationnel, deux avenues sont possibles, soit le transfert immédiat, qui se concrétise sur une période de trois ans et qui est fondé sur des conditions de vente sans lien de dépendance, ou le transfert progressif sur une période de cinq à dix ans, fondé sur les caractéristiques traditionnelles du gel successoral. Le transfert immédiat offre plus de certitude plus tôt dans le processus, mais est assorti de conditions plus strictes, alors que la règle du transfert progressif offre une souplesse supplémentaire.

Maintenant, passons au partage de renseignements confidentiels sur les contribuables aux fins du régime canadien de soins dentaires. La partie 1o) de la partie 1 du projet de loi C-59 vise à modifier les lois fiscales afin de donner à Services publics et Approvisionnement Canada un accès aux renseignements confidentiels sur les contribuables, pour aider à mettre en place la prestation du Régime canadien de soins dentaires permanent. Emploi et Développement social Canada pourra retenir les services de Services publics et Approvisionnement Canada pour l’aider à administrer le Régime canadien de soins dentaires.

On se souviendra que le plan du gouvernement inclut la Prestation dentaire canadienne, qui verse aux familles ayant un revenu inférieur à 90 000 $ des paiements directs qui peuvent aller jusqu’à 1 300 $ par enfant de moins de 12 ans au cours des deux prochaines années, afin de couvrir le coût des soins dentaires de ces derniers.

Les fiducies collectives des employés, c’est un projet phare de la sénatrice Omidvar. La partie 1q) de la partie 1 du projet de loi C-59 vise à instaurer un cadre standard sur ce qui constitue une fiducie collective d’employés et son traitement fiscal associé. Ces règles définissent les employés qui sont admissibles comme bénéficiaires d’une fiducie collective d’employés (FCE) et établissent leurs droits à recevoir des distributions de la fiducie et à voter sur les affaires fondamentales de la fiducie. Cette partie contient également des dispositions pour empêcher que les anciens propriétaires de la société y participent en tant que bénéficiaires ou exercent une influence indue sur la gouvernance de la fiducie collective d’employés.

Pour ce qui est des institutions financières fédérales, la section 1 de la partie 5 du projet de loi C-59 vise à introduire des modifications législatives pour permettre aux institutions financières fédérales de tenir des assemblées de propriétaires uniquement virtuelles et pour autoriser l’introduction de conditions garantissant une participation adéquate.

Cette modification alignerait les lois régissant les institutions financières avec la Loi canadienne sur les sociétés par actions, qui permet aux sociétés constituées sous le régime fédéral de tenir des assemblées d’actionnaires uniquement virtuelles.

La section 5 de la partie 5 du projet de loi modifie la Loi canadienne sur les paiements pour élargir l’admissibilité à l’adhésion à Paiements Canada à trois types d’entités réglementées : les fournisseurs de services de paiement supervisés en vertu de la Loi sur les activités associées aux paiements de détail, les coopératives de crédit locales membres d’une société coopérative de crédit centrale et les exploitants de chambres de compensation désignées en vertu de la Loi sur la compensation et le règlement des paiements et supervisées par la Banque du Canada.

Cette mesure permettra aux coopératives de crédit locales et aux fournisseurs de services de paiement d’accéder aux systèmes de Paiements Canada, ce qui permettra d’améliorer leurs services de paiement électronique et d’offrir des transferts plus rapides et prévisibles vers et depuis des comptes non affiliés. Elle illustre également des progrès vers la modernisation des paiements, qui est soutenue par les parties prenantes.

(1530)

[Traduction]

L’insolvabilité des établissements publics d’enseignement postsecondaire : voilà mon projet. À la section 7 de la partie 5, le gouvernement propose de modifier la Loi sur la faillite et l’insolvabilité et la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies afin que les établissements postsecondaires ne puissent pas être poursuivis au titre de ces deux lois. Le gouvernement a sollicité l’avis des provinces, des territoires, des universités, des collèges, des spécialistes, des prêteurs et des autres parties intéressées afin de trouver des façons de mieux protéger l’intérêt public lorsqu’un établissement postsecondaire fait faillite ou devient insolvable.

Ces modifications proposent des solutions préventives à la détresse financière, et ces solutions tiennent compte, primo, du fait que ces établissements servent l’intérêt public et, secundo, du fait que l’éducation postsecondaire relève des provinces et des territoires.

Passons maintenant à la section 8 de la partie 5, qui porte sur le recyclage des produits de la criminalité, ou blanchiment d’argent, le financement des activités terroristes et le contournement des sanctions. Le gouvernement estime que son Régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes est suffisamment rigoureux pour bien protéger les Canadiens et l’intégrité du réseau financier national. L’Énoncé économique de l’automne 2023 proposait plusieurs modifications législatives visant à renforcer ce cadre.

En deux mots, le projet de loi C-59 propose les changements suivants :

Dans le cas du contournement des sanctions, il modifie la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes de manière à permettre au Centre d’analyse des opérations et déclarations financières du Canada, ou CANAFE, de lutter contre le contournement des sanctions et de transmettre l’information en sa possession aux forces de l’ordre.

En ce qui concerne l’efficacité opérationnelle, le projet de loi modifie le Code criminel afin de s’en prendre au blanchiment d’argent par des tiers, d’actualiser les dispositions sur les fouilles et les perquisitions en cas d’activités criminelles et d’étendre les ordonnances de communications de données financières aux actifs numériques.

À propos du blanchiment d’argent par voie commerciale, le texte modifie la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et la Loi sur les douanes de manière à élargir la portée des pouvoirs de réglementation de l’Agence des services frontaliers du Canada en matière de conformité et à lui permettre de mieux faire appliquer les lois.

Pour ce qui est des guichets automatiques privés, le projet de loi modifie la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes afin que les intermédiaires qui offrent des services de retrait en argent soient considérés comme des guichets automatiques privés.

Dans le dossier des crimes environnementaux, la mesure législative modifie la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes afin d’autoriser le CANAFE à transmettre de l’information issue du renseignement à Environnement et Changement climatique Canada et à Pêches et Océans Canada.

Au chapitre du renseignement stratégique, le projet de loi améliore les produits de renseignement utilisés par le CANAFE pour désigner les entités étrangères et corriger les divergences techniques.

Ces mesures permettront d’améliorer le Régime canadien de lutte contre le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes et de moderniser les techniques de prévention des crimes financiers.

[Français]

La section 9 de la partie 5 du projet de loi C-59 vise à modifier la Loi sur les arrangements fiscaux entre le gouvernement fédéral et les provinces, afin de clarifier l’intention du gouvernement de publier des détails sur les paiements liés aux principaux programmes de transferts pour s’acquitter de ses obligations en matière de publication. Ainsi, les Canadiens auront accès à des renseignements détaillés et à jour sur les paiements de péréquation et sur les autres transferts principaux aux provinces et aux territoires.

La section 10 de la partie 5 du projet de loi C-59 apporte des ajustements à la composition du conseil d’administration de l’Office d’investissement des régimes de pensions du secteur public et au processus de rappel de fonds. Selon la nouvelle mouture, le nombre d’administrateurs du régime passerait de 11 à 13 et les deux nouveaux sièges seraient occupés par des représentants syndicaux.

Honorables sénateurs, le projet de loi C-59 fait progresser des éléments clés du plan économique du gouvernement en concrétisant les principaux éléments de l’Énoncé économique de l’automne 2023. Il représente un pas important vers la réalisation de nos objectifs économiques et renforce notre engagement envers la prospérité et le bien-être de tous les Canadiens.

Le nombre de projets que je vous ai présentés vous donne une très bonne idée de l’ampleur de ce projet de loi et des éléments qu’il comprend.

Sur cette note, je vous remercie de votre attention.

L’honorable Clément Gignac : La sénatrice Moncion accepterait-elle de répondre à une question?

La sénatrice Moncion : Avec plaisir.

Le sénateur Gignac : Chère collègue, merci du leadership dont vous avez fait preuve dans ce dossier. Je vous remercie également de votre ouverture d’esprit lorsqu’on s’adresse à vous pour exprimer nos préoccupations afin d’être rassuré.

Une des mesures fiscales de ce projet de loi qui me préoccupe beaucoup concerne la taxe de 3 % sur les services numériques. Bien que la ministre des Finances ait déposé en décembre 2021 un avis de motion de voies et moyens, il a fallu attendre pratiquement deux ans et demi avant qu’un projet de loi soit déposé. Je crois que la ministre voulait négocier un accord multilatéral avec les autres pays de l’OCDE, ce qui n’a pas fonctionné. Le résultat, c’est que les entreprises se voient imposer une taxe de 3 % rétroactive pour deux ans. Dans la mesure où ce sont de grosses compagnies américaines qui sont visées, comme Netflix et Disney, qui jouissent de marges de profits de 30 %, personne ne versera de larmes. Toutefois, pour de plus petites entreprises, comme des agences de voyages, dont la marge de profit est de 6 %, une taxe de 3 % qui est rétroactive risque de leur faire mal.

Dans la mesure où l’ambassadeur américain au Canada a avisé notre gouvernement qu’il s’embarquait dans quelque chose de litigieux — il a même utilisé l’expression « big fight » en parlant de ce qui pourrait se produire —, pouvez-vous nous rassurer, surtout à l’aube d’un changement à Washington? Avez-vous des garanties que toutes ces mesures ne seront pas contestées et que, dans le fond, on ne sera pas obligé de modifier ce projet de loi?

La sénatrice Moncion : Je vous remercie de la question, sénateur Gignac. Vous me demandez de vous donner des garanties. Je ne pourrai jamais vous donner quelque garantie que ce soit, ni en tant que sénatrice ni d’un point de vue décisionnel.

Je vous remercie d’avoir rappelé la chronologie. À l’automne 2020, la taxe sur les services numériques avait été annoncée. Une espèce d’entente avait alors été conclue selon laquelle le gouvernement essaierait de négocier avec les différentes compagnies pour en arriver à un accord. En octobre 2021, le gouvernement a suspendu l’imposition de la taxe sur les services numériques jusqu’à la fin de l’année 2023. À la fin de 2023, le gouvernement a déposé son énoncé économique pour l’année 2023 et a quand même annoncé ses intentions. Cela donnait le temps aux entreprises de commencer à mettre de côté des provisions pour payer cette taxe.

Entre-temps, étant donné l’absence d’un calendrier ferme pour la mise en œuvre du pilier 1 justement, et puisque d’autres pays continuent de percevoir la taxe — car d’autres pays ont cette taxe en place —, le gouvernement propose de protéger les Canadiens et les Canadiennes en veillant à ce que les entreprises paient leur juste part d’impôt. C’est ce qui avait été entendu. Le projet publié dans une embauche en décembre 2021, avec les modifications apportées en 2023, entre en vigueur à compter du 1er janvier.

Je ne peux donc pas vous donner de garanties, et je viens de vous donner la chronologie des événements. Les entreprises pouvaient se préparer. Cela peut affecter les négociations avec le gouvernement et c’est lui qui devra transiger avec les entreprises en fonction de cette situation au moment où l’on tiendra des négociations. On sait que les négociateurs peuvent utiliser des tactiques d’intimidation pour amener un gouvernement à reculer devant des situations comme celle-là. Toutefois, je crois que le gouvernement est bien placé pour négocier un accord qui pourrait éventuellement être acceptable pour les deux pays, peu importe qui sera à la tête du pays.

Le sénateur Gignac : Merci de votre réponse. Je comprends que vous ne pouvez pas offrir de garanties. Vous serez d’accord pour dire que la pratique actuelle n’est certainement pas la meilleure. Le fait qu’un projet de loi ait un délai aussi important pour un avis de motion de voies et moyens n’est pas idéal. Il est vrai que les entreprises étaient au courant. Toutefois, quand je lis ce qui a été publié à l’époque, on disait que, dans l’intervalle, le gouvernement ferait cela, qu’il n’avait pas l’intention de déposer quoi que ce soit avant 2024, mais qu’il espérait négocier un traité avec les autres pays de l’OCDE.

Si je comprends bien, les entreprises comme Expedia et Booking auraient dû mettre de l’argent de côté ou auraient dû imposer une taxe de 3 % à leurs clients au cas où le gouvernement irait de l’avant avec le projet de loi, dans l’hypothèse où les pourparlers ne fonctionneraient pas avec les autres pays de l’OCDE. Une telle façon de faire n’est pas évidente pour les entreprises, en raison d’un délai aussi long pour le dépôt d’un avis de motion de voies et moyens par rapport au dépôt d’un projet de loi. Quand un projet de loi est déposé, on peut en débattre, entendre des témoins, soumettre des amendements et on peut agir. Dans un avis de motion de voies et moyens, on prend des notes, mais les choses peuvent changer.

Êtes-vous d’accord avec moi pour dire que cette façon de procéder n’est pas idéale et que cela porte préjudice aux entreprises?

(1540)

La sénatrice Moncion : Merci pour la question, monsieur le sénateur.

On peut débattre de ce sujet, à savoir que ce n’est peut-être pas la façon idéale de fonctionner, mais c’est la façon qui a été choisie par le gouvernement actuel.

D’après ce qu’on a vu dans les négociations avec l’Australie et l’Europe, il y a quand même eu des délais dans les négociations, mais les parties ont fini par se mettre d’accord et trouver des terrains d’entente. Je pense que le Canada en est rendu là avec son partenaire américain.

Ce n’est peut-être pas l’idéal, mais vous êtes un banquier, tout comme j’étais banquière, et vous savez qu’on n’avait pas le choix d’inclure des dispositions pour toutes sortes de choses et d’éventualités. J’imagine que les entreprises qui font une bonne comptabilité et qui savent que ces éventualités existent doivent mettre de côté des sommes pour se préparer à ces situations.

L’honorable Rosa Galvez : Chers collègues, je prends la parole aujourd’hui dans cette Chambre au sujet du projet de loi C-59, Loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2023.

Je concentrerai mes remarques sur l’article 236, qui modifie la Loi sur la concurrence, et sur l’importance de ces changements.

[Traduction]

De plus en plus souvent, des dispositions environnementales sont ajoutées aux projets de loi budgétaires. Le projet de loi C-59 ne fait pas exception. S’il en est ainsi, c’est parce que les risques climatiques et environnementaux entraînent des coûts importants. Pour s’attaquer à la pollution et au réchauffement planétaire tout en passant à une économie à faibles émissions de carbone, il faut une approche gouvernementale globale qui repose sur des mécanismes environnementaux s’inscrivant dans un cadre horizontal de mesures législatives et stratégiques.

Dans la mesure où les crises s’enchaînent, où la crise climatique sévit et où le Canada ne réduit ni ses émissions de gaz à effet de serre ni la pollution, le gouvernement fédéral doit redoubler ses efforts pour protéger les Canadiens.

Depuis 1990, après la mise en œuvre de plus de 10 plans d’atténuation des changements climatiques, le Canada n’a toujours pas atteint ses objectifs climatiques ni ses cibles de réduction des émissions.

L’ONU affirme ceci, ce qui est d’ailleurs indéniable :

Le verdissement d’image sape les efforts crédibles de réduction des émissions et de lutte contre la crise climatique. En usant d’un marketing trompeur et de fausses affirmations de durabilité, le verdissement d’image induit en erreur les consommateurs, les investisseurs [...]

 — c’est-à-dire les investisseurs responsables —

[...] entravant la confiance, l’ambition et l’action nécessaires pour provoquer un changement global et garantir une planète durable.

La section 6 de la partie 5 du projet de loi C-59 modifie la Loi sur la concurrence dans le but de moderniser le cadre concurrentiel. Les nouvelles dispositions ont été adoptées à l’unanimité à l’autre endroit. Chers collègues, je vous invite à voter en faveur du projet de loi C-59 tel qu’il a été amendé par la Chambre élue et à accepter le rapport avec les observations du Comité des finances nationales.

Le Bureau de la concurrence a depuis longtemps la capacité de faire respecter les dispositions relatives à l’écoblanchiment, c’est‑à‑dire les déclarations fausses ou trompeuses sur les avantages d’un produit pour l’environnement, qui ne sont pas fondées sur des essais appropriés et adéquats. Toutefois, les dispositions existantes ne permettaient de recueillir que quelques allégations d’écoblanchiment et, surtout, n’exigeaient pas que les entreprises fournissent des preuves à l’appui de certaines allégations environnementales. Cette situation a limité la capacité du Bureau de la concurrence à lutter efficacement contre l’écoblanchiment.

Au Canada, l’écoblanchiment est malheureusement un problème systémique. La semaine dernière, le Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes a clairement indiqué que les banques canadiennes prétendent être sur la voie de la carboneutralité, mais qu’elles investissent davantage dans les combustibles fossiles que dans les énergies renouvelables. Bref, les banques favorisent les investissements dans les combustibles fossiles plutôt que dans les énergies propres selon une proportion de quatre pour un, alors que ce devrait être l’inverse. Il faudrait réaliser de tels investissements d’ici 2030 pour respecter le scénario d’un réchauffement maximal de 1,5 degré Celsius.

Les membres du Comité de l’environnement de l’autre endroit ont rencontré des représentants d’Alliance nouvelles voies, une coalition de six entreprises produisant 95 % du pétrole extrait des sables bitumineux au Canada. Cette coalition a annoncé ses objectifs de carboneutralité pour 2050 et a fait pression sur le gouvernement pour qu’il approuve et subventionne un projet de captage et de séquestration du carbone. Le groupe affirme que ce projet l’aidera à atteindre la carboneutralité, en dépit des doutes exprimés par plusieurs scientifiques quant à la validité scientifique de cette technologie.

En outre, selon un rapport conjoint du Comité du budget du Sénat américain et du Comité de surveillance de la Chambre des représentants publié en avril dernier, les pétrolières mènent de vastes campagnes auprès du public où elles présentent le captage et le stockage du carbone comme une solution viable et disponible leur permettant de continuer à augmenter leurs émissions de gaz à effet de serre, alors qu’elles reconnaissent à l’interne qu’elles ne prévoient pas déployer la technologie à une échelle suffisante pour résoudre la crise climatique.

Ce rapport des États-Unis conclut également que le véritable objectif de l’industrie consiste à prolonger, peut-être indéfiniment, l’utilisation des combustibles fossiles. En se fondant sur ces faits, faut-il être surpris qu’une de nos cinq grandes banques et Alliance nouvelles voies fassent l’objet d’une enquête de la part du Bureau de la concurrence, ou qu’Alliance nouvelles voies fasse pression dans le but de faire amender cet article du projet de loi C-59?

L’écoblanchiment peut donner à une entreprise un avantage injuste lui permettant de ne rien changer à ses pratiques polluantes tout en tirant profit d’affirmations trompeuses sur sa gestion de l’environnement. Cela peut mettre des bâtons dans les roues des entreprises qui ne pratiquent pas l’écoblanchiment et qui, en fait, font le dur travail nécessaire pour se démarquer sur le marché.

Au fil du temps, l’écoblanchiment a érodé la confiance des consommateurs, qui sont plus enclins à rejeter les allégations environnementales, même celles qui sont en fait légitimes.

Un rapport de 2023 a révélé que 57 % des consommateurs canadiens ne croient pas la plupart des affirmations écologiques des marques. Il est donc avantageux pour les entreprises de rattraper le décalage entre les perceptions et de légitimer leurs prétentions en matière de développement durable et d’environnement.

Ce qui est encore plus inquiétant, c’est que les entreprises qui fabriquent des produits prétendument verts ou qui gèrent des entreprises et des installations prétendument vertes ont également l’habitude d’implanter ces entreprises polluantes dans des communautés défavorisées, notamment des communautés à faible revenu et racialisées, et, bien sûr, sur les terres des peuples autochtones. L’écoblanchiment met en danger non seulement l’environnement, mais aussi la santé publique. C’est notamment pour cette raison que nous avions besoin d’un cadre pour la prévention du racisme environnemental.

Les modifications apportées à la Loi sur la concurrence dans le projet de loi C-59 permettront aux consommateurs de reconnaître plus facilement les produits écologiques authentiques, ainsi que les entreprises qui appliquent des pratiques durables.

Selon un sondage réalisé en 2021, 49 % des consommateurs canadiens affirmaient faire des achats auprès d’entreprises qui soutiennent la protection de l’environnement, et 46 % des personnes interrogées affirmaient acheter davantage de produits biodégradables et écoresponsables. Chers collègues, il existe une forte demande et un marché en forte croissance pour les produits écologiques, et nous savons que les consommateurs peuvent stimuler le marché. Or, dans le contexte du marché écologique, cette capacité a jusqu’à présent été compromise par l’écoblanchiment.

Dans une lettre adressée à la présidente du Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie par le Bureau de la concurrence le 31 mai 2024, on peut lire ce qui suit :

Lorsque des entreprises donnent des indications environnementales pour promouvoir un produit ou un intérêt commercial, elles devraient être en mesure de les étayer. Les indications fictives sont fausses ou trompeuses et minent la concurrence sur le fond. Dans le contexte de l’écoblanchiment, le tort causé par des indications non fondées est encore plus pernicieux compte tenu de la menace existentielle posée par les changements climatiques et de la nécessité d’accélérer une transition verte.

La lettre ajoute ce qui suit :

L’obligation de corroborer les indications protège la concurrence en garantissant que les consommateurs peuvent se fier aux indications données au sujet des entreprises et de leurs activités. Elle protège les fabricants et les commerçants honnêtes et dignes de confiance qui sont en concurrence avec ceux qui donnent des indications concernant les répercussions environnementales de la production. De plus en plus, les consommateurs prennent des décisions d’achat fondées sur les répercussions environnementales de la production et, à ce titre, le préjudice causé par des indications non fondées concernant une entreprise ou l’activité d’une entreprise est tout aussi grave pour la concurrence que le préjudice causé par des indications non fondées concernant des produits individuels.

Ces modifications renforceront notre capacité à contrôler les indications trompeuses d’écoblanchiment.

(1550)

Je sais que quelques intervenants et certains membres du comité se sont demandé ce qui pourrait constituer une « méthode reconnue à l’échelle internationale » dans le contexte d’éléments corroboratifs suffisants et appropriés en ce qui concerne les avantages d’une entreprise ou de ses activités par rapport à ses prétentions environnementales. Ce terme n’est pas défini dans le projet de loi, mais je suis toutefois persuadée que les Canadiens et les entreprises canadiennes peuvent se fier au Bureau de la concurrence, au commissaire et au Tribunal de la concurrence.

Comme on l’a rappelé au comité, le Bureau de la concurrence a une excellente réputation, une réputation sans tache. Il est reconnu pour son professionnalisme, sa compréhension des lois et sa connaissance de ce qui se passe au Canada, aux États-Unis et ailleurs dans le monde.

En ce qui concerne la « méthode reconnue à l’échelle internationale », je souligne aussi qu’il en existe pour la plupart des prétentions environnementales, dont l’initiative Science Based Targets, qui est couramment utilisée pour les objectifs de carboneutralité; le Conseil des normes internationales d’information sur la durabilité, auquel on a couramment recours pour l’information relative aux changements climatiques; et le Groupe de travail sur la publication d’informations financières relatives à la nature, qui est d’usage courant pour ce type de communications. Ce ne sont que quelques exemples. On me dit qu’avec un peu de recherche, on pourrait trouver une quinzaine d’autres normes, dont celles de l’Organisation internationale de normalisation.

En outre, ce genre d’exigences en matière de justification ne sont pas uniques au Canada. La Californie a des exigences presque identiques, et l’Union européenne et le Royaume-Uni élaborent des règles et des orientations visant à réglementer et à exiger des preuves concernant certaines déclarations environnementales, notamment celles relatives à la carboneutralité et à l’absence d’effet sur le climat.

Enfin, je voudrais souligner que les modifications à la Loi sur la concurrence proposées paragraphe 236(1) ne constituent pas une attaque contre la liberté d’expression et ne visent pas non plus à favoriser l’écosilence. Si ces modifications peuvent amener les organisations à être plus prudentes lorsqu’elles font état de prétentions écologistes, il faut considérer qu’il s’agit d’une conséquence positive. Bref, aucune organisation ne doit faire d’allégations d’écoresponsabilité ou d’autres allégations qu’elle ne peut étayer par des preuves solides.

Il est encore possible de renforcer la Loi sur la concurrence et la réglementation sur l’écoblanchiment en général, mais je recommande que cette question soit examinée ultérieurement, notamment qu’on envisage de donner plus de pouvoir au commissaire, comme il l’a indiqué.

Alors que l’intensité des crises environnementales et sociales augmente, nous devons adopter une approche horizontale à l’égard des projets de loi budgétaires, et nous devons considérer tous les aspects du cycle budgétaire canadien sous l’angle du climat.

[Français]

Je soutiens cette approche législative visant à combler horizontalement les lacunes qui rendent notre environnement, notre économie et notre société vulnérables. C’est pour les raisons que je viens d’exposer que je soutiens le projet de loi C-59 et que je vous demande de voter en sa faveur. Merci. Meegwetch.

[Traduction]

L’honorable Colin Deacon : Honorables sénateurs, quelle belle journée d’intenses discussions sur la réforme des lois sur la concurrence le Sénat vient de connaître. Il s’agit à mon avis d’une très belle journée, et j’attends depuis longtemps le projet de loi C-59, qui met à exécution l’énoncé économique de l’automne 2023, parce qu’il contient plusieurs mesures qui permettront de resserrer la concurrence, de stimuler l’innovation, d’améliorer la productivité, mais surtout, de rendre le pays plus prospère. Je tiens toutefois à redire tout le mécontentement qu’a pu susciter le fait que la Chambre des communes nous renvoie non pas un, mais deux projets de loi complexes en quelques semaines à peine.

Le projet de loi C-59, qui fait 546 pages, a été déposé en novembre, soit il y a près de sept mois. Il nous a pourtant été renvoyé juste avant le projet de loi C-69, Loi no 1 d’exécution du budget de 2024, qui fait 686 pages et qui a été déposé il y a seulement deux mois. Je trouve irresponsable qu’on force le Sénat à étudier en quatrième vitesse des projets de loi aussi lourds de conséquences.

Cela étant dit, je suis ravi de pouvoir parler des trois changements législatifs apportés par le projet de loi C-59 qui, à mon avis, vont stimuler et l’innovation et l’économie. Je pense par exemple aux modifications apportées à la Loi canadienne sur les paiements et au crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres. J’y reviendrai dans un instant, car je tiens à parler d’abord des modifications importantes qui seront apportées à la Loi sur la concurrence et à la Loi sur le Tribunal de la concurrence.

Au cours des deux dernières années, le gouvernement a proposé les plus importantes modifications au cadre législatif sur la concurrence du Canada depuis l’entrée en vigueur de la Loi sur la concurrence, dans les années 1980. Pourquoi est-ce important? En octobre dernier, le Bureau de la concurrence a publié les résultats d’une analyse effectuée sur une période de 20 ans qui indiquent une baisse constante de la concurrence et une augmentation constante du niveau de concentration des entreprises partout au Canada. Il y a trop peu de concurrents dans un nombre croissant de secteurs, ce qui profite aux grandes entreprises, mais nuit aux consommateurs. Les consommateurs sont donc découragés parce que les profits et les prix ont augmenté de façon constante dans tous les secteurs où la concentration est élevée. Quant aux entrepreneurs qui tentent d’innover, ils sont découragés parce que la réglementation, qui devait à l’origine protéger les consommateurs, représente maintenant un trop coûteux obstacle à la participation. Cette barrière réglementaire protège les oligopoles contre d’éventuels nouveaux compétiteurs qui pourraient les menacer, et sans une vigoureuse concurrence, les oligopoles en place sont moins poussés à innover.

Nombreux sont ceux qui jugent essentiel que l’ensemble du gouvernement adopte à l’égard de la concurrence des politiques plus rigoureuses qui puissent : premièrement, contribuer à accroître les investissements des entreprises; deuxièmement, rendre les marchés plus équitables; troisièmement, réduire les prix pour les consommateurs.

Quelles sont les modifications proposées dans le projet de loi C-59 et pourquoi sont-elles importantes? La section 6 de la partie 5 prévoit plusieurs modifications majeures à la Loi sur la concurrence et à la Loi sur le Tribunal de la concurrence. Ces modifications sont les derniers éléments de ceux qui ont été examinés dans le cadre de la consultation sur l’avenir de la politique de concurrence au Canada menée par Innovation, Sciences et Développement économique Canada de novembre 2022 à mars 2023. Il s’agit d’une consultation qui — comme l’a mentionné la sénatrice Moncion — a été fortement encouragée par les travaux antérieurs du sénateur Howard Wetston.

Les modifications prévues par le projet de loi s’appuient sur les changements introduits dans le projet de loi C-19, Loi no 1 d’exécution du budget de 2022 — où il était question des accords sur la fixation des salaires et sur le non-débauchage — et le projet de loi C-56, Loi sur le logement et l’épicerie à prix abordable, qui a permis au Bureau de la concurrence de lancer des études de marché et a supprimé la défense fondée sur les gains en efficience.

J’appuie entièrement les modifications apportées par le gouvernement et le Comité permanent des finances de la Chambre des communes à la Loi sur la concurrence et à la Loi sur le Tribunal de la concurrence.

Les détracteurs font souvent remarquer que ces changements législatifs ont été faits de manière fragmentaire au cours des deux dernières années. À mon avis, cette critique ne tient pas compte du fait que les modifications ont été intensément axées sur l’attribution de pouvoirs considérables aux gendarmes de la concurrence.

Permettez-moi de vous fournir quelques données pour illustrer à quel point les choses allaient mal avant 2002. Les modifications apportées aux articles 92, 93 et 97 de la Loi sur la concurrence visent à changer la manière dont les fusions seront examinées, principalement de la manière suivante. Premièrement, les critères qui obligent les parties à envoyer un préavis de fusion au Bureau de la concurrence sont élargis.

Pour mettre les choses en contexte, Keldon Bester, boursier et chercheur au Centre pour l’innovation dans la gouvernance internationale, a identifié 16 000 fusions au Canada entre 2016 et 2022. Cependant, il a constaté que le bureau n’avait été informé que de 8 % de ces fusions et que les lois en vigueur n’avaient permis au bureau de contester que 33 de ces fusions d’une manière ou d’une autre. Au cours des six dernières années, 33 fusions sur 16 000 ont été contestées au Canada. Cela ne représente que 0,2 %.

Deuxièmement, la concentration du marché et la position dominante sur le marché seront désormais des facteurs explicites que le tribunal devra prendre en considération. Pour mettre les choses en contexte, l’Institut C.D. Howe a constaté que, depuis les années 1980, le tribunal n’a été saisi que de huit affaires portant sur une fusion. Sept d’entre elles concernaient des niveaux de concentration qui créaient ou préservaient des parts de marché supérieures à 60 % et quatre de ces fusions auraient créé des monopoles ou des quasi-monopoles. Pourtant, le tribunal n’a ordonné des mesures correctives que dans deux de ces affaires.

(1600)

Troisièmement, le délai dont disposera le commissaire pour contester une fusion qui n’a pas été précédée d’un avis passera d’un an à trois ans, ce qui donnera au Bureau de la concurrence la capacité de se pencher de façon plus générale sur les « acquisitions prédatrices » et aux fusions préjudiciables. L’achat de logiciels immobiliers par Dye et Durham constitue un exemple récent particulièrement scandaleux de cette situation. L’entreprise s’est bien tenue pendant un an, jusqu’à ce que le bureau ne soit plus habilité à agir. Au cours des mois qui ont suivi, l’entreprise a décuplé ses prix.

Quatrièmement, grâce au projet de loi, l’examen des fusions tiendra compte des effets de ces fusions sur le marché du travail. Ainsi, le tribunal sera tenu de considérer explicitement la diminution de la concurrence sur le marché du travail comme facteur dans l’examen d’une fusion.

Le projet de loi C-59 introduit également le droit d’action privé. Il s’agit d’une modification aux conséquences importantes, car, dans des circonstances précises, elle permettrait aux demandeurs privés de présenter au tribunal une demande pour exercer ce droit.

Fait important, le tribunal joue un rôle de gardien en ce qui a trait à ce nouveau droit et pourrait rejeter des demandes, en particulier si elles sont jugées frivoles ou vexatoires. Ce rôle de gardien n’est pas nouveau pour le tribunal. De plus, ce droit entrera en vigueur un an après que le projet de loi aura reçu la sanction royale.

Le projet de loi C-59 répond également aux demandes de plus en plus nombreuses visant à accorder aux consommateurs le droit de réparer les produits qu’ils achètent en élargissant les dispositions relatives au « refus de vendre » de la Loi sur la concurrence. Ces modifications s’ajoutent aux modifications à la Loi sur le droit d’auteur proposées dans les deux projets de loi sur le droit de réparer qui sont actuellement à l’étape de l’étude en comité au Sénat, soit les projets de loi C-244 et C-294. Je suis sûr que vous vous souvenez tous de mon discours passionnant sur le projet de loi C-244, qui porte sur les mesures techniques de protection.

Enfin, et c’est très important, le projet de loi C-59 comprend une réponse opportune à la décision choquante rendue par le Tribunal de la concurrence le 28 août 2023, dans laquelle il a accordé aux sociétés Rogers Communications et Shaw Communications 13 millions de dollars pour compenser leurs frais juridiques. Vous vous souvenez peut-être qu’en avril 2022, le Bureau de la concurrence avait entrepris de contester la fusion de Rogers et de Shaw en vertu de la Loi sur la concurrence du Canada, qui est complètement dépassée. Quand le bureau a perdu cette contestation, le tribunal lui a ordonné de payer les frais juridiques des parties qui allaient fusionner en raison de la vigueur avec laquelle il s’était opposé à la fusion en s’appuyant sur des preuves convaincantes. Je pense que cette décision a provoqué un vif émoi dans tout le pays parce qu’on s’est rendu compte que c’étaient les contribuables qui allaient payer ces frais juridiques.

À la suite de cette décision scandaleuse, j’ai été particulièrement heureux de constater que le gouvernement modifiait la Loi sur le Tribunal de la concurrence afin de garantir qu’à l’avenir, défendre vigoureusement la concurrence lors du règlement d’une affaire n’aboutisse pas au paiement des frais juridiques.

Voilà donc, dans les grandes lignes, les modifications proposées par le gouvernement dans le projet de loi C-59.

Par ailleurs, le Bureau de la concurrence a soumis plusieurs recommandations visant à renforcer le projet de loi C-59, dont la plupart ont été acceptées à l’étape de l’étude en comité à la Chambre des communes. Ces amendements visaient tout d’abord à éliminer les échappatoires législatives afin d’empêcher les entreprises de dissimuler des frais supplémentaires dans les prix partiels et d’encourager la transparence des prix. Nous avons tous vu que les prix partiels entraînent une hausse des prix pouvant atteindre 30 % par l’ajout de frais de commodité, de frais de traitement, de frais de nettoyage, de frais de villégiature, et j’en passe. L’objectif du bureau est simple : les entreprises devraient faire de la publicité et se faire concurrence sur la base de leur prix total.

Le deuxième amendement recommandait que les entreprises qui font valoir leurs intérêts au moyen de déclarations environnementales soient tenues de justifier ces déclarations si ces dernières sont contestées par le bureau. Je crois que notre collègue a été très claire à ce sujet.

Le troisième amendement prévoyait l’adoption d’une approche d’inversion du fardeau de la preuve pour que les entreprises soient tenues de prouver la légitimité de leurs remises si celles-ci sont contestées par le bureau.

Le quatrième amendement portait sur la mise en œuvre de nouvelles mesures correctives pour les fusions anticoncurrentielles spécifiquement destinées à rétablir ou à préserver le niveau de concurrence qui existait avant la fusion.

Je voudrais m’arrêter un instant sur ce point. Par le passé, l’économie canadienne garantissait une concentration accrue. Pourquoi? Parce que, jusqu’à maintenant, si on prévoyait qu’une fusion risquait d’affaiblir la concurrence de manière substantielle, la solution était simplement de retirer le mot « substantielle », et non le mot « affaiblir ». Il y avait une garantie que chaque fusion au Canada aurait pour effet de rendre l’industrie moins concurrentielle et plus concentrée. Avec la mise en œuvre de cet amendement, le niveau de concurrence avant le fusionnement doit être rétabli. C’est une très bonne chose et un grand changement.

Enfin, le comité des finances de l’autre endroit est allé plus loin que la demande initiale du Bureau de la concurrence en apportant un amendement à l’article 236 afin que la définition des pratiques commerciales trompeuses soit élargie pour inclure les déclarations relatives à l’environnement qui seraient évaluées en utilisant — et nous avons déjà entendu cela — une « méthode reconnue à l’échelle internationale ». Cet amendement vise à englober les déclarations relevant de l’écoblanchiment, mais la définition crée plutôt de l’incertitude parce qu’aucune méthodologie particulière n’existe. L’incertitude est tout sauf utile pour qui que ce soit, y compris le Bureau de la concurrence.

Au Comité sénatorial des finances nationales, la sénatrice Ross a présenté un amendement visant à supprimer ces trois mots, mais cet amendement a été rejeté. Je partage entièrement les inquiétudes présentées de manière très convaincante par les sénateurs Ross et Tannas et qui ont été citées dans les observations du comité. Cependant, je crois que les orientations seront clarifiées bien avant que cette disposition entre en vigueur, comme le Bureau de la concurrence s’est engagé à le faire dans une lettre adressée au comité.

Le fait que nous n’ayons pu découvrir et traiter cette question problématique qu’à la dernière minute est une démonstration supplémentaire des défis qui se posent lorsque le Sénat ne dispose pas de suffisamment de temps pour s’acquitter de ses responsabilités législatives.

Chers collègues, au cours des deux dernières années, de grands progrès ont été réalisés dans la réforme des lois en matière de concurrence. Je félicite le gouvernement de ses efforts. Cependant, nous sommes loin d’avoir terminé. Il nous faut encore une approche efficace et pangouvernementale pour éliminer les politiques, les programmes, les règlements et les lois qui nuisent à la concurrence dans chaque ministère et agence. Pourquoi? Parce que le Canada est le pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques avec le plus lourd fardeau réglementaire. Nous avons trop de règlements contraignants qui décrivent le processus qui doit être suivi plutôt que le résultat qui devrait être produit. Cela empêche l’innovation.

Il faut agir sans tarder à l’échelle nationale, au sein du gouvernement et de l’économie. Le 10 juin dernier, un chercheur de premier plan dans ce domaine, le professeur Thomas Ross, a offert un témoignage convaincant devant le comité de l’industrie de la Chambre des communes :

[...] la Loi sur la concurrence, le Bureau et le Tribunal s’occupent exclusivement d’une grande partie de la concurrence au Canada, mais pas de tout le domaine.

Des programmes, des politiques et des règlements obsolètes et anticoncurrentiels existent dans tous les recoins du gouvernement, et la compétitivité mondiale du Canada ne s’améliorera pas tant qu’on ne commencera pas à atténuer ce fardeau.

Je répète depuis longtemps qu’il est impossible de réglementer une entreprise de telle sorte qu’elle devienne centrée sur les consommateurs; seule la concurrence peut permettre d’atteindre cet objectif crucial. Voici un exemple qui m’est revenu à l’esprit aujourd’hui. En Australie, la politique nationale de la concurrence englobe tous les ordres de gouvernement et a mené à l’examen et à la modernisation de plus de 1 800 lois et règlements. Des paiements de transfert fédéraux permettent aux États et aux territoires d’être d’importants partenaires de ces efforts. Selon une estimation prudente, ce travail a entraîné une augmentation permanente de 2,5 % du PIB de l’Australie, ce qui correspond à environ 5 000 $ par ménage par année.

Rationaliser les lois et les règlements procure un retour sur investissement considérable. L’Australie l’a démontré, et le Canada peut en faire autant.

Toujours dans l’optique selon laquelle une concurrence accrue encourage l’innovation, la section 5 de la partie 5 du projet de loi C-59 modifie la Loi canadienne sur les paiements. Ces modifications permettront à de nouveaux membres de se joindre à Paiements Canada; c’est particulièrement le cas des fournisseurs de services de paiement supervisés par la Banque du Canada en vertu de la Loi sur les activités associées aux paiements de détail, qui constituait un élément important du budget de 2022.

Le processus d’accréditation des fournisseurs de services de paiement établi par la Banque du Canada a été élaboré de manière robuste et inclusive. Bon nombre des nouveaux participants soumis à la réglementation sont des entreprises de technologie financière canadiennes novatrices, qui introduisent dans les systèmes de paiement du Canada des innovations responsables et conformes à la réglementation. À noter que les systèmes de paiement du Canada gèrent chaque année quelque 20 milliards de transactions d’une valeur d’environ 10 billions de dollars.

Sont aussi visées les coopératives de crédit faisant partie d’une centrale, c’est-à-dire d’un regroupement qui administre l’infrastructure financière de ses nombreux établissements membres. Bien souvent, les coopératives de crédit sont les seules institutions financières présentes dans les régions rurales et éloignées, et elles pourront désormais se faire entendre directement par Paiements Canada. Elles pourront aussi compter sur le soutien en liquidités de la Banque du Canada.

(1610)

Les changements proposés à la Loi canadienne sur les paiements feront également en sorte que le Comité consultatif des intervenants de Paiements Canada ne puisse compter aucun membre de Paiements Canada en son sein. Grâce à ce changement, le comité pourra mieux représenter le point de vue de tous les utilisateurs du réseau de paiements, dont les marchands, lorsqu’il conseillera les dirigeants de Paiements Canada. Pour cet organisme, il s’agit d’un petit pas vers la saine gouvernance, et chacun sait que ce principe est essentiel à la crédibilité des réseaux de paiements.

Les reproches que j’ai à faire à Paiements Canada et à ses dirigeants sont surtout attribuables aux retards que connaît sans cesse la mise en service du système de paiement en temps réel. Parmi les pays du G7, le Canada est bon dernier pour ce qui est des paiements en temps réel, alors qu’il s’agit d’un élément crucial si l’on veut que les transactions financières des entreprises et des particuliers du Canada soient traitées en temps réel, que les mouvements de trésorerie soient plus fluides et que les fraudes soient détectées plus rapidement.

Même si le système de paiement en temps réel a vu le jour en 2015, Paiements Canada estime aujourd’hui qu’il sera fonctionnel seulement en 2026. Je me dois de rappeler que 56 autres pays ont réussi à bouger beaucoup plus rapidement, ce qui leur a permis d’éviter à leurs entreprises et à leurs citoyens de se retrouver en net désavantage concurrentiel, avec les coûts que cela suppose. Je me réjouis certes de voir qu’on progresse, mais je continue de me demander si on va finir par y arriver.

Enfin, je suis absolument ravi de voir que la partie 1 du projet de loi C-59 prévoit un crédit d’impôt à l’investissement dans les technologies propres, qui a été proposé pour la première fois dans l’Énoncé économique de l’automne 2022 et dans le budget de 2023. Il s’agit d’un crédit d’impôt remboursable destiné aux entreprises qui investissent dans les technologies propres, comme le captage du carbone, des systèmes de chauffage à faible émission de carbone, de l’équipement carboneutre et des filières énergétiques qui ne consomment pas de combustibles fossiles, comme l’éolien.

Comment cela fonctionne-t-il? Les entreprises qui investissent dans ces technologies peuvent profiter d’un crédit d’impôt remboursable pouvant atteindre 30 % des coûts d’investissement, ce qui leur permet de soutenir plus facilement des projets de technologies vertes qui pourraient autrement être trop coûteux. L’objectif du gouvernement fédéral étant de parvenir à la carboneutralité d’ici 2050, et d’avoir un réseau électrique carboneutre d’ici 2035, il est impératif que nous continuions à offrir des incitatifs qui accéléreront l’innovation.

Le gouvernement de la Nouvelle-Écosse s’attend à ce que ces crédits d’impôt génèrent, dans notre province, des mises en chantier d’une valeur de plus de 450 millions de dollars et créent environ 1 700 emplois directs et indirects pendant la période où ils seront offerts, principalement dans les régions rurales de la Nouvelle‑Écosse. En outre, ces projets devraient permettre aux Néo-Écossais de réaliser des économies tangibles en réduisant le coût moyen de l’électricité, ce qui permettra aux contribuables d’économiser environ 100 millions de dollars par an au cours des 25 prochaines années — c’est 100 millions de dollars par an grâce à la réduction des coûts de l’électricité. Les projets seront opérationnels d’ici la fin de 2025 et réduiront les émissions de gaz à effet de serre de la Nouvelle-Écosse de plus d’une mégatonne par an, ce qui contribuera à accélérer la transition du Canada vers la carboneutralité.

Chers collègues, chacune des initiatives du projet de loi C-59 fait appel à l’innovation pour améliorer la vie des Canadiens. Voilà pourquoi je suis très heureux de soutenir ce projet de loi — ravi, en fait.

Une autre chose m’est venue à l’esprit pendant l’allocution de la sénatrice Moncion. Vous vous souvenez peut-être qu’en 2021, il y a trois ans, nous avons débattu du projet de loi C-208, un projet de loi émanant d’un député de la Chambre des communes. Il visait à rendre équitables les transferts intergénérationnels de petites entreprises, d’exploitations agricoles ou d’exploitations de pêche familiales qui n’étaient pas admissibles à l’exonération cumulative des gains en capital à laquelle tous les autres Canadiens avaient accès. Ce projet de loi a fait l’objet d’une forte résistance de la part du gouvernement en juin 2021, mais le Sénat a tenu bon et a soutenu le projet de loi adopté par la Chambre des communes. Beaucoup d’entre nous ont ressenti une forte pression à ce moment‑là, car la ministre Freeland craignait que cela n’ouvre la voie à toute une série de transactions inappropriées et de transferts intergénérationnels inappropriés. En fait, elle s’est même opposée à la date d’entrée en vigueur.

Au bout du compte, deux ans et demi plus tard, il n’y avait pas beaucoup de preuves de fraude, mais elle a réussi à mettre en place des restrictions dans le projet de loi afin que de telles fraudes ne se reproduisent plus à l’avenir. Nous avons tenu bon. Nous avons fait notre travail et nous sommes restés indépendants face aux pressions exercées contre le projet de loi et, à mon avis, nous avons fait ce qu’il fallait. Il est merveilleux de voir que le gouvernement va enfin boucler la boucle, et nous pouvons être très fiers du travail que nous avons accompli.

Je félicite la sénatrice Moncion de son discours, de son travail, mais aussi de ce qu’elle a fait dans le dossier de la faillite et de l’insolvabilité des établissements d’enseignement postsecondaire. Il est bon de voir cela dans le projet de loi également, sénatrice Moncion. Félicitations.

Merci, chers collègues.

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

[Français]

Projet de loi sur la lutte contre l’ingérence étrangère

Présentation du dixième rapport du Comité de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants

Consentement ayant été accordé de revenir à la présentation ou au dépôt de rapports de comités :

L’honorable Jean-Guy Dagenais, vice-président du Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants, présente le rapport suivant :

Le mardi 18 juin 2024

Le Comité sénatorial permanent de la sécurité nationale, de la défense et des anciens combattants a l’honneur de présenter son

DIXIÈME RAPPORT

Votre comité, auquel a été renvoyé le projet de loi C-70, Loi concernant la lutte contre l’ingérence étrangère, a, conformément à l’ordre de renvoi du lundi 17 juin, 2024, examiné ledit projet de loi et en fait maintenant rapport sans amendement, mais avec des observations qui sont annexées au présent rapport.

Respectueusement soumis,

Le vice-président,

JEAN-GUY DAGENAIS

(Le texte des observations figure aux Journaux du Sénat d’aujourd’hui, p. 2949.)

Son Honneur la Présidente intérimaire : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion du sénateur Dean, la troisième lecture du projet de loi est inscrite à l’ordre du jour de la prochaine séance.)

[Traduction]

Projet de loi sur la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public

Projet de loi modificatif—Deuxième lecture—Ajournement du débat

L’honorable Ratna Omidvar propose que le projet de loi C-20, Loi établissant la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public et modifiant certaines lois et textes réglementaires, soit lu pour la deuxième fois.

 — Honorables sénateurs, j’ai le plaisir de parler du projet de loi C-20, Loi établissant la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public et modifiant certaines lois et textes réglementaires.

Ce projet de loi édicterait une loi distincte pour établir la commission d’examen et de traitement des plaintes du public, la CETPP, en tant qu’organisme d’examen civil indépendant de la GRC et de l’Agence des services frontaliers du Canada, l’ASFC. Pour la première fois dans notre histoire, les deux organismes chargés de l’application de la loi seraient soumis à l’examen d’un même organe d’examen externe. Ensemble, l’Agence des services frontaliers du Canada et la GRC sont les plus grandes agences gouvernementales canadiennes, à l’exception de l’armée. À l’heure actuelle, seule la GRC dispose d’un organe d’examen externe, c’est‑à-dire la Commission civile d’examen et de traitement des plaintes, la CCETP, que ce projet de loi vise à intégrer dans un organe d’examen s’occupant conjointement de l’Agence des services frontaliers du Canada et de la GRC.

Chers collègues, alors même que je fais ces remarques préliminaires, j’ai de la difficulté avec les nombreux acronymes qui forment une soupe à l’alphabet : la GRC, l’ASFC, la CCETP et la CETPP. Si vous me le permettez, je vais désigner la commission d’examen et de traitement des plaintes du public comme la « nouvelle commission », juste pour que ce soit plus simple pour moi. Par ailleurs, je vais souvent parler des « organismes » pour désigner l’Agence des services frontaliers du Canada et la GRC, mais je devrai parfois préciser de quel organisme il est question.

(1620)

Pendant la majeure partie de mon intervention, je vais fournir une mise en contexte avec trois acteurs principaux : la commission, l’Agence des services frontaliers du Canada et la GRC. De temps à autre, le ministre de la Sécurité publique entrera également en scène.

De façon générale, le projet de loi renforcera les mécanismes de reddition de comptes et rendra les parlementaires plus aptes à demander des comptes aux organismes et au ministre en ce qui concerne les plaintes et les examens systémiques des deux organismes.

N’oublions pas, honorables collègues, que nous comptons sur l’Agence des services frontaliers du Canada et sur la GRC pour protéger les citoyens et les résidents canadiens. Ce projet de loi aura pour effet de combler les lacunes causées par l’absence d’organisme d’examen externe pour l’Agence des services frontaliers du Canada, et il permettra au pays d’adopter dans ce domaine des normes aussi rigoureuses que celles de certains de nos alliés, notamment nos partenaires du Groupe des cinq.

Enfin, le projet de loi C-20 répond à une promesse de longue date qui remonte à 2015, alors que le gouvernement, qui en était à son premier mandat, s’était engagé à présenter une mesure législative pour créer un organisme d’examen de l’Agence des services frontaliers du Canada.

Permettez-moi de vous rappeler un chapitre très sombre de notre histoire, l’affaire Maher Arar. En 2002, M. Arar a été incarcéré à tort lors d’une escale aux États-Unis. Il a ensuite été expulsé vers la Syrie, où il a été affreusement torturé et traité de façon inhumaine, parce que, chers collègues, la GRC avait fourni aux autorités américaines des renseignements erronés qui impliquaient faussement M. Arar dans des activités terroristes.

Le tollé qui a suivi cette horrible épreuve a conduit à l’ouverture d’une enquête gouvernementale approfondie dirigée par le juge Dennis O’Connor. Les conclusions de l’enquête en 2006 ont exonéré sans équivoque M. Arar, et mis à nu les failles et les fautes graves dans les actions de la GRC et de l’Agence des services frontaliers du Canada.

L’un des résultats les plus importants de cette enquête a été la formulation de recommandations visant à prévenir de telles tragédies à l’avenir. Au premier rang de ces recommandations figure l’appel à la mise en place de solides mécanismes de contrôle indépendants pour les deux organismes. L’objectif de ces recommandations est clair : renforcer l’obligation de rendre des comptes, garantir le strict respect des normes juridiques et protéger les droits des personnes contre toute violation.

C’était en 2006. Près de 10 ans plus tard, en 2015, le Comité permanent de la sécurité publique et nationale a recommandé au gouvernement de mettre sur pied un organisme civil indépendant chargé des plaintes et de l’examen de toutes les activités de l’Agence des services frontaliers du Canada, étant donné que l’Agence existe depuis 2003 et n’a pas de mécanisme d’examen indépendant.

L’ancien sénateur Wilfred Moore a présenté les projets de loi S-222 et S-205 en 2014 et en 2015, respectivement, pour prévoir la nomination d’un inspecteur général de l’Agence des services frontaliers du Canada. Les deux projets de loi sont morts au Feuilleton. Cependant, comme certains d’entre vous se souviennent peut-être, le gouvernement s’était engagé à respecter l’objet du projet de loi S-205, qui a été adopté par le Sénat. Toutefois, le gouvernement n’approuvait pas le modèle proposé, notamment pour la nomination de l’inspecteur général.

Plus tard, en 2019, le gouvernement a présenté le projet de loi C-98. Il a été suivi par le projet de loi C-3 en 2023. Je me souviens très bien du sénateur Moore. Il s’assoyait juste là. C’était un sénateur remarquable. Je vous rappelle les projets de loi S-222 et S-205 pour montrer combien de bonnes idées législatives naissent ici, au Sénat, avant d’être adoptées par le gouvernement.

Les deux projets de loi sont morts au Feuilleton. Cette fois-ci, nous devons nous assurer de franchir la ligne d’arrivée.

Chers collègues, nous nous souvenons tous de nos interactions avec l’Agence des services frontaliers du Canada et la GRC. Chaque fois que je reviens au Canada après un voyage à l’étranger, j’ai toujours des échanges on ne peut plus amicaux, polis et efficaces avec les employés de l’Agence des services frontaliers. Chaque fois que je vois un agent de la GRC, cela m’emplit de fierté. Les agents de la GRC ont un travail stressant et ils veillent à la sécurité des frontières. Ils assurent notre sécurité en s’occupant de problèmes difficiles comme le terrorisme et la contrebande. Les fonctions qu’ils exercent ne sont pas faciles, et ils sont appelés à faire de grands sacrifices pour accomplir leur devoir. Rien dans ce projet de loi n’enlève à leur mérite.

Cependant, je suis la première à admettre que mon expérience n’est pas la même pour tout le monde. L’Agence des services frontaliers du Canada a fait l’objet d’examens à plusieurs reprises pour avoir porté atteinte aux droits individuels, ce qui soulève de sérieuses inquiétudes quant à ses pratiques et donne à penser qu’une surveillance accrue est nécessaire.

Un problème répandu et persistant concerne le traitement des détenus dans les installations de cette agence. Les rapports et les enquêtes ont révélé des cas de soins médicaux inadéquats, des conditions de vie médiocres et de longues périodes de détention souvent sans recours juridique en temps utile. De telles conditions, chers collègues, sont non seulement contraires aux droits fondamentaux de la personne, mais aggravent aussi les problèmes de santé physique et mentale des détenus.

Vous vous souvenez peut-être d’un cas important, celui de Lucia Vega Jimenez. Il s’agit d’une femme mexicaine sans papiers qui est morte en 2013 pendant qu’elle était détenue par l’Agence des services frontaliers du Canada. Vega Jimenez avait été arrêtée parce qu’elle avait prolongé son séjour au-delà de la date prévue par son visa. Elle avait été placée dans un centre de détention de l’Agence des services frontaliers du Canada à Vancouver. Elle s’est suicidée alors qu’elle était en attente d’expulsion, après avoir enduré des conditions difficiles doublées d’un soutien inadéquat en matière de santé mentale. Cet incident tragique a suscité l’indignation et mis en lumière les graves conséquences des politiques et pratiques de l’Agence des services frontaliers du Canada en matière de détention.

L’application arbitraire et discriminatoire des pouvoirs de l’Agence des services frontaliers du Canada constitue une autre source de préoccupation importante. Il y a eu de nombreuses allégations de profilage racial, selon lesquelles des individus de certaines origines ethniques, religieuses et raciales sont ciblés de manière disproportionnée pour des fouilles et des détentions. Ce phénomène a été mis en évidence dans le rapport du Comité sénatorial des droits de la personne sur l’islamophobie. Le rapport dit ceci :

Ahmad Attia (membre du conseil d’administration des services policiers de Peel, PDG d’Incisive Strategy) a souligné que les agents de l’[Agence des services frontaliers du Canada] disposent d’un grand pouvoir discrétionnaire, sans toutefois être très surveillés, et qu’ils « sont [ainsi] davantage susceptibles de commettre des abus par le biais de la discrimination systémique, mais aussi de préjugés personnels, dont les conséquences [sont] dévastatrices pour la communauté musulmane ».

Cela viole non seulement les principes d’égalité et de non-discrimination, mais érode également la confiance dans la capacité de l’agence à appliquer les lois de manière juste et équitable.

Chers collègues, au cœur de ce projet de loi on trouve la qualité humaine qu’est la confiance. Je serais la première à dire que certaines communautés ne font pas confiance aux forces de l’ordre canadiennes à l’heure actuelle pour de bonnes raisons. Il y a des allégations de racisme à l’encontre d’individus; il y a même des allégations de racisme systémique. Selon un sondage d’opinion publique réalisé en 2022, seulement un Canadien sur trois convient que la GRC traite les membres des minorités visibles et les Autochtones de manière juste. Nous devons rétablir cette confiance.

Personne n’est au-dessus de la loi, Cela inclut ceux qui sont responsables de l’application de la loi et de la sécurité aux frontières.

On confère de vastes pouvoirs à l’Agence des services frontaliers du Canada et à la GRC, des pouvoirs dont il ne faut pas abuser et qu’il ne faut pas utiliser à mauvais escient. Advenant le cas, nous nous attendons à ce que toute allégation d’inconduite fasse l’objet d’un examen et de mesures correctives au besoin. Nous avons le pouvoir, chers collègues, de maintenir, de rétablir et d’accroître la confiance du public envers les forces de l’ordre canadiennes en obligeant les deux principaux organismes d’application de la loi du Canada à démontrer leur engagement continu envers la justice et l’équité.

La commission d’examen et de traitement des plaintes du public — la nouvelle commission qui sera créée — remplacerait l’actuelle Commission civile d’examen et de traitement des plaintes relatives à la Gendarmerie royale du Canada, et son mandat engloberait l’Agence des services frontaliers du Canada, avec une responsabilité accrue et des outils à sa disposition.

(1630)

Par exemple, les plaignants et les tiers admissibles, comme les avocats et les groupes de défense des droits civils, auraient désormais accès à un organisme externe qui pourrait, de manière indépendante, déposer des plaintes, examiner des plaintes et enquêter sur les plaintes liées à la Gendarmerie royale du Canada et à l’Agence des services frontaliers du Canada en ce qui concerne la conduite ou le niveau de service de leur personnel.

En général, la nouvelle commission renverra d’abord les cas aux organismes, en l’occurrence la GRC et l’Agence des services frontaliers du Canada. Ainsi, les administrateurs généraux demeureront responsables des actions prises par leurs employés. Si une personne ou un tiers n’est pas satisfait de la manière dont la plainte a été traitée, il peut demander à la nouvelle commission de l’examiner. À l’issue de son examen, la commission présentera ses conclusions et formulera des recommandations aux deux administrateurs généraux des deux organismes. Le suivi de ces recommandations et de leur mise en œuvre par la GRC et l’Agence des services frontaliers du Canada nous permettra de demander des comptes à ces organismes.

En outre, comme je crois l’avoir déjà mentionné, des tiers pourront porter plainte au nom des plaignants. En effet, les personnes vulnérables sont parfois réticentes à déposer une plainte ou incapables de suivre le processus de plainte, que ce soit à cause des barrières linguistiques, d’une méfiance à l’égard des forces de l’ordre ou d’autres raisons. Dans certains cas, le plaignant pourrait être une personne qui est déjà en détention. Grâce à l’inclusion de tierces parties dans le processus de traitement des plaintes, on garantit une meilleure participation des personnes qui pourraient être réticentes à prendre part au processus ou incapables de le faire.

Grâce à cette modification de la loi, le processus de traitement des plaintes sera accessible à beaucoup plus de personnes qui ont des interactions avec la GRC et l’Agence des services frontaliers du Canada, y compris celles qui sont dans des centres de surveillance de l’immigration, des établissements provinciaux ou tout futur poste d’attente désigné, tel que proposé dans le projet de loi C-69.

Il existe aussi un deuxième type d’examen que la nouvelle commission peut entreprendre dans le cadre de son mandat. Il s’agit de la conduite d’examens d’activités précises, qu’elle peut entreprendre de son propre chef ou à la demande d’un tiers ou du ministre de la Sécurité publique. Il s’agit d’enquêtes systémiques. Les examens d’activités précises permettraient à la commission de cerner les problèmes systémiques et de formuler des recommandations concernant les politiques, les procédures ou les lignes directrices relatives aux opérations de l’ASFC et de la GRC et concernant plus d’un cas. Il s’agit d’une approche systémique. Ces enquêtes fourniraient à la nouvelle commission les outils pour cerner les préoccupations plus vastes liées à l’application de la loi au Canada et de contribuer à la recherche de solutions afin d’y répondre.

Par exemple, si la commission constate une tendance dans de multiples plaintes individuelles qui soulignent le recours excessif à la force et de mauvaises conditions dans les centres de détention gérés par l’ASFC, elle pourrait lancer un examen des activités précises. La nouvelle commission pourrait agir ainsi afin d’examiner collectivement toutes les plaintes connexes plutôt que de les traiter au cas par cas. Grâce à cet examen, la nouvelle commission pourrait mettre au jour des problèmes systémiques tels qu’un financement insuffisant, des lacunes dans la formation des agents, des soins médicaux insuffisants pour les détenus ou le non-respect des normes internationales en matière de droits de la personne. Sur la base de ces constatations, la commission d’examen et de traitement des plaintes du public pourrait alors élaborer des recommandations globales visant à réformer les politiques, les procédures et les lignes directrices afin d’améliorer le traitement des détenus et de prévenir de futurs comportements répréhensibles généralisés.

Chers collègues, comme le projet de loi a fait l’objet de deux versions antérieures et d’une étude approfondie à la Chambre, il nous arrive avec beaucoup plus de mordant et donne à la commission de meilleurs outils pour exécuter sa procédure d’examen et de traitement des plaintes.

Premièrement, il établit la commission en vertu d’un projet de loi distinct afin de renforcer son indépendance par rapport aux deux organismes qu’elle examine. La commission de surveillance actuelle rattachée à la GRC, qui sera intégrée à la nouvelle commission, est enchâssée dans les lois qui régissent la GRC et n’est donc pas complètement indépendante. Par conséquent, il s’agit d’une mesure visant à assurer une plus grande indépendance.

Deuxièmement — et c’est vraiment important —, le projet de loi crée des délais codifiés pour que les dirigeants des deux organismes répondent aux rapports provisoires, aux examens et aux recommandations, ce qui entraîne une reddition de comptes accrue. Par exemple, ces délais codifiés contribueraient à donner suite à certaines des recommandations formulées par la Commission sur les pertes massives d’avril 2020 en Nouvelle-Écosse en ce qui concerne l’établissement de rapports plus rapides et plus transparents par les organismes fédéraux d’application de la loi.

Troisièmement, les administrateurs généraux des deux organismes seraient tenus de présenter un rapport annuel au ministre de la Sécurité publique pour l’informer des mesures qu’ils ont prises en réponse aux rapports et aux recommandations de la commission. Ces rapports annuels seront déposés dans les deux Chambres, ce qui permettra un examen parlementaire et renforcera par conséquent encore davantage le processus de reddition de comptes.

Quatrièmement, afin de cerner et de prendre les mesures voulues pour régler les problèmes systémiques touchant les populations vulnérables, la nouvelle commission serait tenue, en consultation avec les deux agences, de recueillir des données désagrégées, démographiques et fondées sur les caractéristiques ethniques des plaignants, à condition que ces renseignements soient fournis volontairement.

Enfin, ce projet de loi vise à améliorer les interactions des forces de l’ordre avec le public en obligeant la commission à mener des activités de sensibilisation et d’éducation, notamment auprès de communautés autochtones ou racisées pour les informer de leur droit de porter plainte.

Je tiens à vous assurer que, même si cette commission sera indépendante, elle n’agira pas en vase clos. Elle devra entretenir une relation de collaboration avec l’Office de surveillance des activités en matière de sécurité nationale et de renseignement afin de veiller à ce que les questions liées aux plaintes qui ont trait à la sécurité nationale soient traitées avec l’expertise et la confidentialité requises.

De plus, le projet de loi vise à intégrer un cadre législatif dans la Loi sur l’Agence des services frontaliers du Canada pour régir la réponse de l’agence face aux incidents graves, qui sont à l’heure actuelle régis par des politiques internes. Ainsi, l’Agence des services frontaliers sera tenue de mener des enquêtes internes sur les allégations d’incidents graves et d’informer la police locale, le public et la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public lorsque de tels incidents se produisent.

Supposons qu’un incident se produise à un poste frontalier et qu’une personne soit gravement blessée, et qu’on accuse l’agent de l’Agence des services frontaliers d’avoir fait usage d’une force excessive, causant une blessure grave à un voyageur. En vertu du nouveau cadre législatif, l’Agence des services frontaliers serait tenue d’ouvrir une enquête interne sur l’incident dans les plus brefs délais. Ce processus serait régi par des procédures normalisées décrites dans la loi, ce qui garantirait l’uniformité et la rigueur de l’enquête.

En outre, l’agence devra signaler l’incident à la police du territoire où l’acte a eu lieu, mais aussi à la nouvelle commission, et la police pourrait alors déterminer si une enquête criminelle s’impose. La commission aurait pour rôle d’examiner si l’enquête menée par l’Agence des services frontaliers est impartiale. Si elle ne l’est pas, la commission pourra alors lancer son propre examen.

Le projet de loi tel que vous le voyez aujourd’hui a été amélioré tout au long du processus législatif. À la suite de vastes consultations avec les personnes et les collectivités les plus touchées par le travail de la GRC et de l’Agence des services frontaliers, la Chambre a apporté des amendements afin de renforcer le processus pour accroître la responsabilité et la transparence. Il s’agit notamment d’un amendement qui vise à donner au commissaire de la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public une plus grande autonomie pour mener des enquêtes systémiques et, ainsi, être en meilleure position pour cibler les préoccupations fondamentales relatives à l’application de la loi, y compris le racisme systémique.

(1640)

La commission pourra également recevoir et examiner les plaintes concernant les réservistes de la Gendarmerie royale du Canada, et mener des enquêtes sur celles-ci, ce qui n’était pas prévu au départ dans le projet de loi C-20. Cet amendement évitera toute confusion possible quant à savoir qui peut faire l’objet d’une plainte et qui ne le peut pas, car dans de nombreux cas, le public ne peut pas faire la distinction entre un membre et un réserviste de la Gendarmerie royale du Canada.

De plus, une disposition de « prise en compte » a été incluse en réponse aux recommandations visant à assurer la diversité des membres de la nouvelle Commission d’examen et de traitement des plaintes du public. Cette disposition oblige le ministre de la Sécurité publique de tenir compte de la diversité de la société canadienne lorsqu’il recommande des nominations par décret à la commission.

En outre, la commission serait désormais tenue de recueillir et de publier des données démographiques et fondées sur la race sur les plaignants dans un rapport annuel adressé au ministre de la Sécurité publique, ce qui permettrait aux parlementaires de mieux relever les discriminations systémiques et d’exiger des comptes auprès du ministre.

Chers collègues, le projet de loi C-20 ne se limite pas à un simple examen des actions de l’Agence des services frontaliers du Canada et de la Gendarmerie royale du Canada; il s’agit d’une réforme de l’application de la loi et d’une réaffirmation de l’engagement du pays envers les principes de justice, d’égalité et de primauté du droit. La création de la Commission d’examen et de traitement des plaintes du public marquerait une avancée considérable dans notre quête permanente d’une société juste et équitable.

Avant de conclure mes observations — je crois que c’est le plus long discours que j’ai jamais fait —, j’aimerais remercier tous ceux qui ont apporté leur contribution tout au long du processus d’élaboration de ce projet de loi et qui ont fait des recommandations essentielles qui nous ont permis de proposer les mesures à l’étude aujourd’hui. Je tiens à remercier plus particulièrement les nombreuses organisations de la société civile et les avocats, en particulier ceux spécialisés en immigration, qui ont contribué à améliorer ce projet de loi. Tous ces gens à qui j’ai parlé sont favorables à ce que ces institutions fassent l’objet d’un processus de surveillance indépendant. Ils réclament de telles mesures depuis de nombreuses années, et c’est une étape cruciale pour assurer la reddition de comptes et la transparence.

Enfin, honorables collègues, je tiens à souligner que ce projet de loi a été adopté à l’unanimité à l’autre endroit, à l’étape de la troisième lecture. Comme nous le savons, ce n’est pas fréquent, mais cela arrive de temps à autre, et c’est ce qui s’est produit dans ce cas-ci.

Par conséquent, chers collègues, je vous invite à vous joindre à moi pour appuyer ce projet de loi et le renvoyer au comité pour qu’il y soit étudié à l’automne. Merci.

Des voix : Bravo!

(Sur la motion de la sénatrice Martin, le débat est ajourné.)

Projet de loi sur l’assurance médicaments

Deuxième lecture—Débat

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Pate, appuyée par l’honorable sénatrice McBean, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-64, Loi concernant l’assurance médicaments.

L’honorable Pat Duncan : Honorables sénateurs, je prends la parole à l’étape de la deuxième lecture du projet de loi C-64, Loi concernant l’assurance médicaments. Je vous suis très reconnaissante du temps que vous m’accordez, compte tenu de l’heure et de la date particulière de notre calendrier législatif. Sachant que nous souhaitons renvoyer le projet de loi C-64 au comité pour qu’il l’étudie plus en profondeur, je prends la parole pour vous faire part de mon point de vue personnel, dans l’espoir que l’histoire de ma région apportera des éclaircissements et des questions pour l’étude du comité.

Vous savez que j’ai été première ministre du Yukon de 2000 à 2002. À l’époque, il était également d’usage que le premier ministre soit ministre des Finances. C’était aussi une période d’intenses négociations et discussions autour des coûts des soins de santé, en particulier dans le cas du Yukon, parce que le gouvernement Martin avait réduit de manière considérable les transferts canadiens en matière de santé et de services sociaux. Dans le cas du Yukon, c’était particulièrement important, car les petits budgets territoriaux représentaient moins de 1 milliard de dollars.

Au cours de mon mandat, j’ai également participé à des missions commerciales d’Équipe Canada avec le premier ministre de l’époque, M. Chrétien. Pour les collègues qui l’auraient oublié, les voyages d’Équipe Canada étaient des missions commerciales organisées par le premier ministre fédéral et auxquelles participaient tous les premiers ministres provinciaux et territoriaux, ainsi que des chefs d’entreprise et des responsables locaux. C’est en partageant un repas, avec l’objectif commun de promouvoir notre grand pays, que nous nouons des liens.

Deux mesures se rapportant à notre débat d’aujourd’hui peuvent être attribuées aux premiers ministres provinciaux et au premier ministre voyageant ensemble. Tout d’abord, le premier ministre Chrétien a chargé Roy Romanow de présider la Commission sur l’avenir des soins de santé au Canada. L’une des principales recommandations de la Commission Romanow était de proposer un programme limité d’assurance-médicaments pour couvrir les traitements médicamenteux coûteux. Voici une autre de ces recommandations :

L’Inforoute Santé du Canada devrait continuer de coordonner l’établissement d’un cadre national pour les dossiers de santé électroniques, à partir des systèmes provinciaux, en veillant à l’interopérabilité des divers systèmes électroniques actuels d’information sur la santé et en tenant compte de certaines questions telles que l’harmonisation de la politique de protection de la vie privée et les normes de sécurité.

L’Inforoute Santé du Canada est née de la préoccupation exprimée par le premier ministre Chrétien : lorsque des médecins traitaient un de ses anciens collègues dans un hôpital de la Colombie-Britannique, ils auraient dû pouvoir accéder à toutes les données relatives à sa santé par la voie de son dossier médical provincial.

Honorables sénateurs, j’ai continué à siéger jusqu’en 2006 en tant que députée à l’Assemblée législative du Yukon après la défaite de notre gouvernement. Ma retraite en tant que législatrice a marqué le début d’une carrière dans la fonction publique, dans le domaine de l’administration des soins de santé. Pendant les discussions sur les soins de santé, on aurait pu croire que j’avais bien été immunisée. On m’a souvent entendu dire : « J’aurais aimé savoir à l’époque ce que je sais aujourd’hui. »

Lorsque j’étais responsable de l’inscription au régime de soins de santé, je devais, entre autres, m’occuper de l’administration de ce dont il avait été question dans le cadre de ces missions d’Équipe Canada quelques années plus tôt : relever les défis associés à la facturation réciproque interprovinciale; permettre aux Canadiens de conserver leur inscription au régime de soins de santé en cas de déménagement d’une province à une autre; tenir compte du fait que les Canadiens souhaitaient avoir une carte d’assurance-maladie qui fournirait aux prestataires de soins de santé autant d’informations que possible, peu importe où ils avaient reçu des traitements au pays, le tout en protégeant leurs renseignements personnels.

Mes responsabilités incluaient aussi les demandes de règlement — le paiement des médecins qui étaient rémunérés à l’acte. J’ai donc un point de vue particulier sur le débat actuel à propos de l’impôt sur les gains en capital, ainsi que sur l’influence du régime de la rémunération à l’acte des médecins sur les soins médicaux dans notre pays jusqu’à maintenant et encore aujourd’hui. J’ai bien hâte de lire, cet été, le livre de l’ancienne ministre de la Santé Jane Philpott, intitulé Health for All: A Doctor’s Prescription for a Healthier Canada, qui vient juste de sortir.

Je devais aussi gérer le transport médical dans le cadre de mes fonctions. Comme les honorables sénateurs le savent, les Canadiens de régions éloignées sont transportés par avion vers des centres urbains pour recevoir des soins de santé. Pour les personnes qui sont envoyées à l’extérieur du Yukon pour des raisons médicales, que ce soit au moyen d’un avion d’évacuation sanitaire ou d’un avion commercial, le transport est payé par le gouvernement du Yukon.

La Commission Romanow a également demandé la création d’un fonds pour garantir un accès rapide aux soins dans les régions rurales et éloignées. Durant mon mandat comme première ministre, lors de ma première conférence des premiers ministres de l’Ouest, la première conférence organisée par Gary Doer, alors premier ministre du Manitoba, on a affirmé que le Canada devait reconnaître son statut comme quatorzième province à la table des négociations. Le Canada est responsable des coûts des soins de santé pour les peuples autochtones, les membres des Forces armées canadiennes et, dans certains cas, des employés du gouvernement fédéral, comme ceux de la GRC.

Lors de cette conférence des premiers ministres de l’Ouest, le premier ministre Doer a évoqué les coûts élevés du transport des patients du Nord vers le Sud pour des séances de dialyse. En tant que gestionnaire des services aux demandeurs pour le gouvernement du Yukon, je devais régulièrement traiter avec le Canada lorsque le Yukon payait un voyage — par exemple, un vol aller simple de 15 000 dollars pour un membre inscrit des Premières Nations — que le Programme des services de santé non assurés aurait dû couvrir.

Alors, lorsque le transport médical représente une bonne partie du budget des soins de santé, chaque facture de 15 000 $ que vous pouvez soumettre à un autre gouvernement — ici, au gouvernement du Canada, pour le compte du gouvernement du Yukon — est cruciale.

Je mentionne cet exemple et cette anecdote pour attirer l’attention des sénateurs sur les responsabilités du Canada en matière de prestation des soins de santé dans le pays, ce qui doit faire partie des discussions sur tout programme devant être offert à toute la population. La responsabilité du Canada ne se limite pas à tenir le rôle de responsable législatif et de principal bailleur de fonds dans cette discussion.

Il est important de souligner qu’à titre de gestionnaire, je devais aussi travailler en étroite collaboration avec le gestionnaire de l’assurance-santé complémentaire et du régime d’assurance‑médicaments pour le système de santé du Yukon. Ce régime fournissait à l’époque, et fournit toujours aujourd’hui, les médicaments pharmaceutiques destinés aux personnes âgées de plus de 65 ans et aux personnes mariées à une personne âgée de plus de 65 ans. Les demandes sont présentées à un régime d’assurance‑médicaments, si le patient en a un, et le gouvernement paie le solde. Au Yukon, une personne âgée qui n’a pas de régime d’assurance‑médicaments ne doit pas se passer de médicaments sur ordonnance. Ces médicaments sont payés par l’assurance-santé du Yukon. Si le patient est un citoyen des Premières Nations, ces médicaments sont payés par le Programme des services de santé non assurés.

(1650)

Honorables sénateurs, je dois vous raconter une histoire, encore une fois fondée sur mon expérience de travail au sein des services de soins de santé. À l’époque, Avastin, un médicament contre le cancer de la vessie, était utilisé sans approbation officielle pour traiter la dégénérescence maculaire. Nous avons eu un patient qui pouvait obtenir l’Avastin grâce au Programme des services de santé non assurés, mais pas par le régime d’assurance-santé complémentaire du Yukon parce que nos listes de médicaments étaient différentes.

Le Yukon a fini par établir une liste de médicaments équivalente à celle du Programme des services de santé non assurés. Cependant, la liste, l’administration et la lenteur de l’approbation des médicaments pour les enfants des Premières Nations sont quelques‑unes des raisons pour lesquelles une tragédie s’est produite au Manitoba et pour lesquelles nous avons un programme basé sur le principe de Jordan.

De plus, l’objectif déclaré du projet de loi C-64 est « [...] de soutenir l’élaboration d’une liste nationale de médicaments [...] ». Ce ne sera pas facile. Nous avons tous pris connaissance des reportages dans les médias, le plus récent étant celui en Colombie‑Britannique concernant un médicament particulier destiné à traiter la sclérose en plaques. Ce médicament a été approuvé en Alberta, mais le patient de la Colombie-Britannique n’y a pas eu accès en raison de son coût. Je ne connais aucun législateur provincial ou territorial ni aucun fonctionnaire qui n’ait pas eu à répondre aux questions de ses concitoyens concernant l’accès aux médicaments.

Il faut reconnaître que la mise en place d’un cadre pour les médicaments pour le traitement des maladies rares entraîne des coûts extraordinaires pour les petites administrations. Les provinces de l’Ouest discutent et négocient depuis plusieurs années l’achat de médicaments en collaboration, comme l’ont fait individuellement les grandes provinces. En agissant ensemble à l’échelle du pays, nous obtiendrons de meilleurs résultats dans nos discussions avec les sociétés pharmaceutiques.

Voici une dernière remarque sur le Programme d’assurance-santé complémentaire du Yukon. Si vous souffrez d’une maladie chronique ou d’un handicap, il est fort probable que vous puissiez bénéficier de prestations pour couvrir vos dépenses. Par exemple, si votre médecin vous recommande des médicaments sur ordonnance ou des fournitures médico-chirurgicales pour traiter le diabète, vous pouvez obtenir de l’aide dans le cadre du Programme d’aide aux malades chroniques et aux personnes souffrant d’une incapacité. La liste des maladies chroniques est exhaustive, tout comme les mesures d’aide.

Le projet de loi C-64 est un cadre législatif visant à planifier à l’échelle nationale des programmes similaires à ceux mis en place par le Yukon. La sénatrice Pate a présenté le projet de loi C-64 comme :

[...] un plan de collaboration avec toutes les provinces et tous les territoires désireux d’offrir une couverture universelle et à payeur unique pour les médicaments nécessaires, en commençant par un certain nombre de contraceptifs [...]

 — qui ne sont actuellement pas couverts au Yukon —

[...] et de médicaments contre le diabète [...]

qui sont couverts.

Vous m’avez entendu dire à maintes reprises que le fédéralisme pose des défis. Je crois que nous avons tous dit que ce sont les détails qui posent problème. Je suis consciente que certains estiment que les détails et l’administration concrète de la mise en œuvre de la mesure législative ne sont pas nécessairement du ressort ou de la responsabilité de notre auguste assemblée.

Quoi qu’il en soit, de la même façon que nous devons nous assurer que toutes les mesures législatives respectent la Charte et les objectifs nationaux de réconciliation, j’estime que le second examen objectif auquel nous nous livrons suppose que nous devions aussi faire le nécessaire pour que les mesures législatives atteignent ces objectifs. Dans le cas présent, le régime d’assurance‑médicaments prévu dans le projet de loi C-64 est réalisable. De nombreuses autres personnes — à commencer par nos collègues professionnels de la santé — ont su dire avec beaucoup d’éloquence à quel point ce projet de loi est important et je suis d’accord avec eux.

Le comité qui l’étudiera devra se demander comment le plan qui devra être élaboré par le gouvernement fédéral et l’ensemble des territoires permettra d’offrir un régime d’assurance-médicaments aux Canadiens.

J’ai dit plus tôt que ce débat et cette discussion n’ont rien de nouveau. J’ai évoqué un seul des nombreux rapports et études, celui de la Commission Romanow, recommandant la mise sur pied d’un régime national d’assurance-médicaments.

Je vous ai aussi parlé de ce que j’ai vécu au Yukon, que ce soit en première ligne ou sur le plan politique. C’est intentionnellement que j’ai choisi le moment où nous renvoyons ce projet de loi à un comité pour vous raconter tout ça. Le rapport du Comité sénatorial permanent des finances nationales paru le 13 juin dernier disait :

Enfin, votre comité fait observer que le projet de loi C-69 contient de nombreuses mesures dont la mise en œuvre nécessite une collaboration étroite avec les gouvernements provinciaux et territoriaux [...]

Le projet de loi C-64 nécessitera lui aussi une collaboration étroite avec les provinces et les territoires. Avec cet exemple, j’espère avoir convaincu mes collègues qui en feront l’étude de bien tenir compte de l’expérience des provinces et des territoires, mais aussi des responsabilités du Canada.

J’espère qu’au bout du compte, après avoir pris connaissance des nombreux rapports, commissions et allocutions qui recommandent la création d’un régime national d’assurance-médicaments, le comité conclura, quitte à y aller de quelques observations, que ce projet de loi doit entrer en vigueur et que le régime qu’il prévoit verra le jour.

Dans les langues des Premières Nations du Yukon, shä̀w níthän, mahsi’cho, gùnáłchîsh. Merci.

L’honorable Judith G. Seidman : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui, à l’étape de la deuxième lecture, à titre de porte-parole responsable du projet de loi C-64, Loi concernant l’assurance médicaments. Je remercie la sénatrice Pate, la marraine du projet de loi C-64, et les sénatrices Osler, Moodie, Simons, Bernard et Duncan de leurs contributions à cette importante mesure législative.

Je vais maintenant parler du projet de loi.

Chers collègues, le projet de loi C-64 semble proposer deux politiques distinctes. D’une part, le projet de loi C-64 propose un régime national et universel d’assurance-médicaments et énonce les principes essentiels dont le ministre de la Santé doit tenir compte dans le cadre de la mise en œuvre de cette politique.

D’autre part, le projet de loi codifie une structure et des processus qui obligent le ministre de la Santé à effectuer des paiements aux provinces avec lesquelles le gouvernement fédéral a conclu des ententes bilatérales afin d’augmenter toute couverture existante d’un régime public d’assurance-médicaments pour des médicaments sur ordonnance précis et des produits connexes destinés à la contraception ou au traitement du diabète. C’est l’histoire de deux politiques.

Chers collègues, j’examinerai certains des problèmes auxquels nous sommes confrontés dans le projet de loi C-64, à la fois dans le régime national et universel d’assurance-médicaments proposé et dans le plan progressif pour les médicaments et les produits destinés uniquement à la contraception ou au traitement du diabète. Je me pencherai également sur trois préoccupations structurelles globales qui, selon moi, doivent être examinées au comité.

Le cadre du régime national universel d’assurance-médicaments proposé dans le projet de loi C-64 semble prévoir des principes visant à respecter la politique envisagée dans le rapport final du Conseil consultatif sur la mise en œuvre d’un régime national d’assurance-médicaments intitulé Une ordonnance pour le Canada : l’assurance-médicaments pour tous.

Le conseil consultatif a été lancé en juin 2018 et il était présidé par le Dr Eric Hoskins. Son rapport final, qui a été publié en juin 2019 et qui est souvent appelé le rapport Hoskins, encourage : « [...] le gouvernement à adopter un régime national d’assurance-médicaments au moyen d’une nouvelle loi qui englobera les cinq principes fondamentaux établis dans la Loi canadienne sur la santé [...] »

Conformément au rapport Hoskins, des engagements ont été pris à l’égard d’éléments fondamentaux, notamment l’Agence canadienne des médicaments, la liste nationale de médicaments et la Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares.

En 2021, le gouvernement fédéral a investi 35 millions de dollars avec l’Île-du-Prince-Édouard pour le Programme d’amélioration de l’accès abordable aux médicaments sur ordonnance dans le cadre d’une sorte d’étude-pilote pour combler une lacune dans la couverture.

En 2022, un groupe national multidisciplinaire convoqué par l’Agence canadienne des médicaments et des technologies de la santé à la demande de Santé Canada a recommandé la mise en place d’un cadre pour l’élaboration d’une liste nationale et d’un modèle de liste de médicaments.

En mars 2023, la Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares a été lancée avec un investissement maximal de 1,5 milliard de dollars sur trois ans pour améliorer l’accès aux médicaments pour le traitement des maladies rares et pour les rendre plus abordables.

En décembre 2023, l’Agence canadienne des médicaments a été créée grâce à un investissement de 89,5 millions de dollars sur cinq ans à partir de 2024-2025.

Le gouvernement affirme que le projet de loi C-64 est la prochaine étape vers un régime national universel d’assurance‑médicaments. Or, cette proposition particulière de régime national universel d’assurance-médicaments présente des faiblesses considérables et, comme mes collègues m’entendent souvent le souligner à propos de propositions législatives, elle risque d’avoir de graves conséquences involontaires. Voyons un peu de quoi il en retourne.

Premièrement, le régime national d’assurance-médicaments universel envisagé dans le projet de loi C-64 empiète sur les compétences provinciales et complique ou entrave les programmes que les provinces et les territoires ont déjà mis en place.

(1700)

Comme nous le savons tous, au Canada, les gouvernements provinciaux et territoriaux sont responsables de la gestion, de l’organisation et de la prestation des services de santé pour leurs résidants. Le Québec, qui exige que tous les résidants qui n’ont pas d’assurance-médicaments privée s’inscrivent et cotisent au régime public de la province, est la seule province à avoir atteint l’objectif d’une couverture universelle des médicaments. C’est pourquoi le gouvernement du Québec s’oppose au projet de loi C-64.

En février, le cabinet de Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec, a déclaré à la Presse canadienne :

Le gouvernement du Québec a rappelé à plusieurs reprises que la santé est une compétence exclusive du Québec. Si le gouvernement du Canada concrétise son projet d’assurance‑médicaments, le gouvernement du Québec exigera un droit de retrait avec pleine compensation [...]

Le Québec n’est pas le seul à s’opposer à ce projet. Le gouvernement de l’Alberta a exprimé des sentiments similaires.

Tous les gouvernements provinciaux et territoriaux offrent à leurs résidants des régimes d’assurance pour les médicaments sur ordonnance, quoique de types différents. Permettez-moi de vous donner un aperçu de quelques-uns des régimes publics qui, au Canada, couvrent les médicaments sur ordonnance, les dispositifs médicaux et les fournitures médicales. Certains sont basés sur le revenu, d’autres sur l’âge, d’autres encore s’appliquent à des maladies précises qui nécessitent des médicaments coûteux.

L’Alberta dispose d’un régime qui couvre les personnes d’âge adulte issues de ménages à faible revenu qui sont enceintes ou qui ont un besoin aigu et chronique de médicaments sur ordonnance, les enfants issus de ménages à faible revenu, ainsi que les résidents âgés de 65 ans et plus. La province offre également le régime Non‑Group Coverage, qui est administré par la Croix bleue de l’Alberta, assorti de cotisations mensuelles et accessible à tous les Albertains.

La Colombie-Britannique s’est dotée d’un régime qui couvre les bénéficiaires d’aide au revenu et les bénéficiaires d’établissements de soins agréés. Elle a aussi créé le régime Fair PharmaCare, qui aide les familles à payer les médicaments sur ordonnance et qui est fondé sur le revenu : plus les revenus familiaux sont faibles, plus l’aide offerte est élevée.

Le régime d’assurance médicaments du Manitoba offre des prestations calculées à partir du revenu aux personnes pour qui la facture de médicaments sur ordonnance est élevée.

Le Nouveau-Brunswick s’est doté d’un régime qui couvre les personnes de plus de 65 ans, les résidents des établissements pour personnes âgées, les enfants confiés aux soins de la province et les clients de Développement social. Il s’est aussi doté d’un régime de prestations calculées à partir du revenu pour les personnes qui n’ont pas d’assurance privée.

Le régime de Terre-Neuve-et-Labrador couvre les personnes et les familles à faible revenu, ainsi que les personnes de plus de 65 ans qui touchent des prestations de Sécurité de la vieillesse et du Supplément de revenu garanti.

Les Territoires du Nord-Ouest se sont dotés d’un régime qui couvre les personnes admissibles de 60 ans et plus et les personnes atteintes de certaines maladies. Ce territoire a aussi créé un régime pour les Métis autochtones.

Le régime de la Nouvelle-Écosse couvre toutes les personnes qui n’ont pas d’autre régime d’assurance médicaments ou dont les médicaments coûtent trop cher.

Le Nunavut s’est doté d’un régime qui couvre les personnes âgées, celles qui sont atteintes de certaines maladies et les prestataires de l’aide au revenu.

L’Ontario a des régimes qui couvrent les résidants de plus de 65 ans; les résidants bénéficiant de l’aide sociale; les résidants d’établissements de soins de longue durée ou spécialisés; les résidants recevant des soins à domicile; et les résidants dont le coût des médicaments sur ordonnance est élevé par rapport à leur revenu et qui ne bénéficient pas d’une couverture privée ou d’un autre régime provincial. Cette province a aussi un régime qui couvre gratuitement plus de 5 000 médicaments pour toute personne âgée de 24 ans ou moins qui n’est pas couverte par un régime privé.

L’Île-du-Prince-Édouard a un régime qui couvre les familles à faible revenu; les résidants de 65 ans et plus; les résidants de moins de 65 ans qui n’ont pas d’assurance-médicaments; et les résidants qui ont besoin d’aide pour payer les médicaments et les fournitures pour une gamme de conditions médicales spécifiques. En outre, en 2021, l’Île-du-Prince-Édouard a conclu un partenariat avec le gouvernement fédéral dans le cadre d’un programme pilote qui réduit à 5 $ la quote-part des médicaments admissibles — y compris les médicaments contre les maladies cardiovasculaires, le diabète et les troubles mentaux — pour les résidants couverts par certains programmes.

Au Québec, le régime public d’assurance-médicaments couvre tous les résidants qui ne sont pas couverts par un régime privé.

La Saskatchewan a un régime qui couvre tous les résidants à l’exception de ceux qui bénéficient de programmes fédéraux.

Le Yukon a un régime qui couvre les résidants âgés de plus de 65 ans et les enfants des familles à faible revenu, et offre des prestations aux Yukonnais qui souffrent d’une maladie chronique ou d’une incapacité fonctionnelle grave. Notre collègue la sénatrice Duncan a très bien décrit ce régime d’une manière beaucoup plus détaillée.

Selon la conception du programme, un régime national universel d’assurance-médicaments pourrait simplifier le réseau complexe de programmes qui est en place partout au Canada. Cependant, chaque province et territoire a accumulé un savoir organisationnel en matière de prestation de ses programmes respectifs, certains programmes étant adaptés pour répondre aux besoins de nos collectivités. À titre d’exemple, le Québec a près de 30 ans d’expérience avec son programme.

En outre, la plupart des Canadiens sont déjà couverts par une assurance-médicaments, mais les statistiques varient selon les sources consultées. Comme le Conseil consultatif sur la mise en œuvre d’un régime national d’assurance-médicaments le souligne dans le rapport Hoskins :

Nos recherches ont révélé des estimations différentes du nombre de Canadiens qui ne sont pas assurés ou qui sont sous‑assurés : selon certaines études, ce chiffre serait de 5 % de Canadiens, [...] D’autres sondages nous indiquent que près de 20 % des Canadiens [...] ne sont pas assurés ou sont sous‑assurés [...]

Ceux qui ne sont pas couverts par une assurance-médicaments pourraient être admissibles à un programme auquel ils ne sont pas inscrits. Dans une analyse pancanadienne réalisée en 2022 au sujet de la couverture des médicaments sur ordonnance, le Conference Board du Canada estime que plus de 97 % des Canadiens sont admissibles à une forme quelconque de couverture des médicaments sur ordonnance. Cela signifie qu’il reste 2,8 % de Canadiens non admissibles à une couverture. En outre, le Conference Board du Canada signale qu’environ 10 % des Canadiens ne sont pas inscrits à un régime public ou privé d’assurance-médicaments auquel ils sont admissibles.

Deuxièmement, la politique nationale d’assurance-médicaments universelle envisagée dans le projet de loi C-64 pourrait avoir une incidence négative sur la pratique des pharmaciens. Lorsqu’ils ont témoigné devant le Comité permanent de la santé de l’autre endroit, des pharmaciens ont exprimé leurs inquiétudes quant à un régime national d’assurance-médicaments universelle. Joelle Walker, de l’Association des pharmaciens du Canada, a mis en lumière le fardeau administratif que représente le passage des patients d’un régime à un autre :

[...] on ne saurait trop insister sur le risque que cela entraîne de graves perturbations. [...] les modifications apportées à un régime d’assurance médicaments peuvent créer beaucoup de perturbations pour les gens assurés comme pour les pharmaciens.

La réalité est que les régimes d’assurance médicaments publics au Canada sont beaucoup moins complets que les régimes d’assurance-médicaments privés, ce qui veut dire que si, en conséquence du projet de loi, les patients sont transférés de leur régime privé à un régime public, les pharmaciens et les médecins vont probablement devoir passer beaucoup de temps à prescrire de nouveaux traitements à leurs patients, surtout si leurs médicaments ne sont plus couverts par le régime public; ils vont devoir remplir des formulaires pour obtenir des exemptions spéciales, puis vont devoir communiquer ces changements à leurs patients.

Benoit Morin, président de l’Association québécoise des pharmaciens propriétaires, a signalé au Comité permanent de la santé que, selon le principe proposé du payeur public unique, les honoraires des pharmaciens seraient un montant unique négocié pour les médicaments couverts. Il a expliqué que cela aurait une incidence considérable sur les pharmaciens propriétaires québécois, puisque les honoraires des pharmaciens sont plus élevés pour les médicaments couverts par les régimes privés, y compris par le volet privé du régime public d’assurance-médicaments du Québec.

Il a expliqué l’ampleur de cet enjeu comme suit :

Actuellement, le financement des pharmacies québécoises repose principalement sur les honoraires professionnels liés à la distribution des médicaments et à leur surveillance. La variation de ces honoraires peut influencer la capacité des pharmacies à fournir des services aux patients.

C’est précisément la flexibilité du modèle mixte public-privé actuel qui permet aux pharmacies québécoises de se développer, d’être présentes dans toutes les régions et d’offrir une multitude de services aux patients [...] Sans cette souplesse, la santé financière du réseau des pharmacies serait mise à mal, et les répercussions seraient encore plus importantes en région éloignée.

M. Morin souligne également :

Lorsqu’un régime universel a été mis en place en Nouvelle-Zélande, on a vu fermer environ 371 pharmacies.

Effectivement, au Québec, s’il n’y a pas de régime mixte, on craint que cela touche les pharmacies assez durement pour les empêcher d’être rentables, ce qui entraînera des fermetures et les contraindra à s’installer dans les grands centres plutôt que dans les zones rurales.

Le gouvernement fédéral a pris l’habitude de ne pas consulter les pharmaciens au sujet des politiques qui les touchent directement et qui touchent aussi les Canadiens qui ont recours à leurs services. Dans un communiqué publié après le dépôt du projet de loi C-64 à l’autre endroit, l’association s’est plainte qu’aucun pharmacien n’ait été membre du Conseil consultatif Hoskins sur la mise en œuvre d’un régime national d’assurance-médicaments en 2018.

Les soins que les Canadiens reçoivent dans les pharmacies sont irremplaçables. Selon une étude menée pour le compte de l’Association des pharmaciens du Canada par Abacus Data en septembre 2023, 37 % des Canadiens se rendent dans une pharmacie au moins une fois par mois et 23 % discutent avec un pharmacien au moins une fois par mois.

Le champ d’activité des pharmaciens varie d’une région à l’autre du pays, mais il peut comprendre la prescription de médicaments, la substitution thérapeutique et la modification de la posologie, la formulation de médicaments, le régime posologique, etc. Dans toutes les provinces et au Yukon, les pharmaciens peuvent injecter des médicaments et des vaccins. En Alberta et au Québec, ils peuvent même demander et interpréter des tests de laboratoire.

(1710)

Le champ d’action des pharmaciens continue de prendre de l’ampleur. Tandis que de plus en plus de Canadiens déclarent ne pas avoir de médecin de famille, la majorité des personnes interrogées par Abacus s’entendent pour dire que la diversification de la gamme des services offerts dans les pharmacies, y compris les cliniques sans rendez-vous pour les affections courantes, la vaccination, les tests et les services de laboratoire, la gestion des maladies chroniques et la prescription de contraceptifs, améliorerait l’accès aux soins de santé et la qualité de ces derniers.

De telles ambitions pourraient devenir réalité dans un contexte où les pharmacies locales peuvent prospérer. Dans une lettre ouverte publiée dans le Hill Times, Sandra Hanna, une pharmacienne communautaire propriétaire d’une pharmacie à Guelph, et directrice générale de l’Association canadienne des pharmacies de quartier, fait remarquer ce qui suit :

Au cours des dernières années, les pharmacies et leurs équipes ont joué un rôle de plus en plus important en tant que prestataires de soins de santé primaires, en particulier dans les régions rurales et éloignées…

Par contre, elle met en garde qu’un régime d’assurance-médicaments à payeur unique coûterait un milliard de dollars par an au secteur de la pharmacie, ce qui équivaut à la suppression d’environ 20 millions d’heures de travail des pharmaciens.

En ce moment, les Canadiens bénéficient d’un excellent accès aux pharmacies. Selon les données de l’OCDE, en 2021, le Canada comptait 30 pharmacies pour 100 000 habitants, soit plus de pharmacies que la moyenne de l’OCDE. Dans l’écosystème de santé actuel, pouvons-nous nous permettre de mettre en péril le succès des pharmacies et des pharmaciens? Il s’agit là d’une conséquence involontaire potentielle que nous devrions étudier en comité.

Troisièmement, le régime national universel d’assurance-médicaments envisagé dans le projet de loi C-64 pourrait éroder l’accès aux médicaments et exacerber les pénuries de médicaments. Le Comité permanent de la santé, a entendu plusieurs intervenants qui craignent que, selon le contenu final de la liste nationale des médicaments assurés, le régime national universel d’assurance‑médicaments proposé dans le projet de loi C-64 ait un effet délétère sur la disponibilité des médicaments.

Angelique Berg, présidente et cheffe de la direction de l’Association canadienne de la gestion de l’approvisionnement pharmaceutique, a dit au comité :

[...] Parce qu’ils sont très efficaces, les distributeurs n’auront guère le choix que de réduire les services si le financement est réduit. Ils pourraient, par exemple, cesser de transporter des produits non rentables [...] réduire le stock de sécurité [...] ou encore réduire la fréquence des livraisons dans les régions où les coûts sont élevés [...]

[...] Quand le gouvernement attribue un contrat à un seul fabricant, cette entreprise devient en fait un monopole, de sorte que les concurrents sont peu incités à rester sur le marché. La concentration du pouvoir augmente le risque d’approvisionnement limité, d’où notre inquiétude.

L’Association des pharmaciens du Canada partage la préoccupation de Mme Berg à propos des pénuries de médicaments. Mme Walker a dit ceci :

Une chose que nous avons remarquée, c’est que le nombre de médicaments disponibles pour chaque catégorie peut diminuer considérablement, selon le nombre d’entreprises dans le marché, et nous sommes très susceptibles de connaître une pénurie de médicaments s’il y a seulement un ou deux fabricants qui produisent un médicament donné.

Disons qu’il y a une catastrophe d’ampleur nationale dans un pays où sont produits certains des ingrédients pharmaceutiques actifs et que l’entreprise là-bas ne peut plus produire son médicament, et que les autres entreprises ne sont pas préparées à accroître leur production [...] [L]’écosystème est très complexe et [...] il faut en tenir compte dans cette approche pour l’assurance-médicaments.

L’Institut économique de Montréal a également exprimé ses inquiétudes quant à la possibilité d’une perturbation de la distribution des médicaments en cas de mise en place d’un régime national universel d’assurance-médicaments au Canada. Selon l’institut :

[...] si certains médicaments ne sont plus couverts par un régime d’assurance, il est fort probable que les compagnies pharmaceutiques cessent leur distribution sur le territoire canadien. La variété de médicaments en circulation au Canada risque donc de diminuer, empêchant les patients précédemment couverts d’avoir accès à ces médicaments, même s’ils étaient disposés à payer de leur poche.

Les pénuries de médicaments ne sont pas rares au Canada. En décembre 2018, j’ai interrogé le leader du gouvernement au Sénat sur une pénurie pancanadienne de l’antidépresseur Wellbutrin. En février 2020, j’ai posé une question sur une pénurie de tamoxifène, un médicament utilisé dans le cadre d’une hormonothérapie pour traiter le cancer du sein. En juin 2020, j’ai posé des questions sur les pénuries de médicaments pour la thyroïde, d’inhalateurs, de médicaments contre l’hypertension et de gouttes pour les yeux en cas de glaucome. En novembre 2022, j’ai posé une question sur une pénurie d’amoxicilline pédiatrique.

Les pharmaciens gèrent déjà des pénuries de médicaments au Canada. Les audiences du comité devraient examiner attentivement les conséquences imprévues d’une diminution du nombre de médicaments disponibles au Canada.

Les travaux du Sénat

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, comme il est 17 h 15, je dois interrompre les travaux. Conformément à l’article 9-6 du Règlement, la sonnerie se fera entendre afin de convoquer les sénateurs au vote reporté à 17 h 30 sur la troisième lecture du projet de loi C-50.

Convoquez les sénateurs.

(1730)

Projet de loi canadienne sur les emplois durables

Troisième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénateur Yussuff, appuyée par l’honorable sénateur Boehm, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-50, Loi concernant la responsabilité, la transparence et la mobilisation à l’appui de la création d’emplois durables pour les travailleurs et de la croissance économique dans une économie carboneutre.

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, le vote porte sur la motion suivante : L’honorable sénateur Yussuff propose, avec l’appui de l’honorable sénateur Boehm :

Que le projet de loi C-50, Loi concernant la responsabilité, la transparence et la mobilisation à l’appui de la création d’emplois durables pour les travailleurs et de la croissance économique dans une économie carboneutre, soit lu pour la troisième fois.

La motion, mise aux voix, est adoptée et le projet de loi, lu pour la troisième fois, est adopté :

POUR
Les honorables sénateurs

Anderson Hartling
Arnot Jaffer
Aucoin Kingston
Bellemare Klyne
Bernard LaBoucane-Benson
Boehm Lankin
Boniface Loffreda
Burey MacAdam
Busson Massicotte
Cardozo McBean
Clement McNair
Cordy McPhedran
Cormier Mégie
Cotter Moncion
Coyle Moodie
Cuzner Omidvar
Dagenais Osler
Dalphond Oudar
Deacon (Ontario) Pate
Dean Petten
Downe Quinn
Duncan Ross
Forest Saint-Germain
Francis Sorensen
Galvez Varone
Gerba White
Gold Woo
Harder Yussuff—56

CONTRE
Les honorables sénateurs

Ataullahjan Plett
Batters Poirier
Black Ravalia
Carignan Richards
Housakos Seidman
MacDonald Simons
Manning Smith
Marshall Tannas
Martin Verner
McCallum Wallin
Miville-Dechêne Wells—23
Patterson

ABSTENTIONS
Les honorables sénateurs

Deacon (Nouvelle-Écosse) Gignac—2

Projet de loi sur l’assurance médicaments

Deuxième lecture

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Pate, appuyée par l’honorable sénatrice McBean, tendant à la deuxième lecture du projet de loi C-64, Loi concernant l’assurance médicaments.

L’honorable Judith G. Seidman : Honorables sénateurs, je vais continuer de parler de certains aspects problématiques de ce plan et des possibles conséquences imprévues.

Le quatrième point sur lequel j’attire votre attention porte sur la politique d’un régime national et universel d’assurance‑médicaments qui est prévue dans le projet de loi C-64. Elle n’inclut aucun mécanisme d’exception permettant à un patient d’avoir accès à un médicament qui ne figure pas dans la liste de médicaments.

M. John Adams, président du conseil d’administration de la Coalition pour de meilleurs médicaments, a soulevé cette préoccupation lors de sa comparution devant le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes. La Coalition pour de meilleurs médicaments représente 30 organisations de patients, qui représentent des gens atteints de la maladie de Parkinson, d’arthrite, d’hémophilie, la cécité, de cancer et d’autres maladies complexes et rares.

Voici ce qu’il a dit au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes :

[...] les patients ne réagissent pas tous de la même façon à un même médicament. Nous avons besoin d’une certaine variété et d’un certain choix. Le Québec dispose d’un mécanisme qui permet à un médecin de présenter une demande à un comité d’examen scientifique véritablement indépendant de la bureaucratie de la santé pour un médicament dont il sait que le patient a besoin [...]

Le régime national d’assurance-médicaments serait grandement amélioré, sur le plan conceptuel, par l’existence de cette soupape de sécurité pour les patients exceptionnels.

Les audiences du comité devraient permettre d’étudier s’il est justifié d’établir des exceptions par rapport à la liste de médicaments et de se pencher sur les mécanismes potentiels en ce sens.

Je passe au cinquième élément. Les coûts d’un programme national et universel d’assurance-médicaments, tel qu’il est décrit dans les principes du projet de loi C-64, pourraient grimper en flèche.

(1740)

Dans son rapport sur le projet de loi C-64, publié le 15 mai, le Bureau du directeur parlementaire du budget :

[...] suppose que les médicaments actuellement couverts par les gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi que par les assureurs privés, resteront couverts aux mêmes conditions.

Il déclare ceci, et le choix des mots est très important : « Le programme vise à bonifier et élargir, et non pas remplacer [...] »

C’est sur la base de cette hypothèse que le directeur parlementaire du budget a estimé que l’assurance-médicaments universelle nationale augmenterait les dépenses du programme fédéral de 1,9 milliard de dollars sur cinq ans.

À la séance d’information que m’ont offerte les fonctionnaires du ministère, on m’a assurée que le gouvernement, dans ses accords bilatéraux avec les provinces, négociera pour s’assurer que les provinces maintiennent la couverture de leur propre régime public pour le diabète et la contraception. Cependant, le gouvernement fédéral n’a aucun moyen de garantir que les régimes privés d’assurance-médicaments maintiendront leur couverture.

Selon le directeur parlementaire du budget, si les régimes privés d’assurance-médicaments cessaient de couvrir les médicaments et dispositifs de contraception et de traitement du diabète, les dépenses du régime public feraient plus que doubler. Au lieu de coûter 1,9 milliard de dollars sur cinq ans, le régime coûterait 4,4 milliards de dollars sur cinq ans.

Honorables sénateurs, mis à part les principes d’« universalité » énoncés, les propositions réelles du projet de loi C-64 obligent le ministre de la Santé à effectuer des paiements aux provinces et aux territoires avec lesquels le gouvernement fédéral a conclu des accords bilatéraux pour assurer la couverture de médicaments sur ordonnance spécifiques et de produits connexes destinés à la contraception ou au traitement du diabète.

Le paragraphe 6(1) du projet de loi précise que les paiements sont effectués « dans le but d’élargir toute couverture existante d’un régime d’assurance médicaments public ». Les hypothèses présentées dans le rapport du directeur parlementaire du budget sur le projet de loi C-64 s’appuient le libellé de cette disposition.

D’après le paragraphe 6(1), il semblerait que la couverture de certains médicaments sur ordonnance en particulier et de produits connexes pour la contraception ou le traitement du diabète viendrait compléter les couvertures existantes.

Cela semble contredire d’autres dispositions du projet de loi. Êtes-vous embrouillés? On peine à s’y retrouver! Comme l’a dit Stephen Frank, président et chef de la direction de l’Association canadienne des compagnies d’assurances de personnes, au Comité permanent de la santé de la Chambre des communes :

[...] au Canada, 27 millions de personnes ont une assurance médicaments privée. Il s’agit d’une couverture très large, beaucoup plus large que celle offerte par le meilleur système public où que ce soit au Canada, et les gens y accordent une grande valeur — 90 % d’entre eux accordent une grande importance à leur couverture — et ils veulent donc la protéger et s’opposent fortement à ce qu’elle soit menacée. Si vous leur demandez quelle est l’approche qu’ils préfèrent et que vous leur donnez le choix, la très grande majorité préférerait que le gouvernement concentre ses efforts là où il y a un besoin.

Chers collègues, serait-il judicieux de remplacer une couverture à laquelle 90 % des Canadiens accordent une grande importance?

Personne ne sait encore trop comment les régimes privés et le nouveau régime public vont se coordonner une fois à la pharmacie. Si le coût d’un médicament est déjà couvert à 80 % par le régime privé d’un patient, le régime public couvrira-t-il les 20 % restants? Couvrira-t-il plutôt la totalité des coûts, ce qui signifie que ces coûts ne seraient plus assumés par les assureurs privés, mais par les contribuables?

Lorsqu’on leur a posé la question, les représentants du ministère ont répondu que ces « détails administratifs » restaient à définir. Dans le cadre de son étude, j’estime que le comité tâchera d’obtenir la réponse à ces questions fondamentales.

La couverture des médicaments sur ordonnance et des produits connexes servant à la contraception ou au traitement du diabète ne sera pas administrée uniquement par le fédéral, contrairement à ce qui se fait pour la nouvelle prestation dentaire. Elle sera plutôt administrée par les provinces et les territoires, à l’aune des ententes bilatérales qui seront conclues.

Or, qui dit ententes bilatérales dit myriade d’obstacles à surmonter. En mars 2023, par exemple, le gouvernement annonçait, comme je l’ai déjà dit, qu’il consacrerait jusqu’à 1,5 milliard de dollars sur trois ans à la Stratégie nationale visant les médicaments pour le traitement des maladies rares, qui était censée faire partie de ce régime et qui a pour objectif de faciliter l’accès aux médicaments les plus efficaces contre les maladies rares ou les plus prometteurs et d’en faire baisser le prix.

Un an s’est écoulé depuis, et aucune entente bilatérale n’a encore été signée, ce qui veut dire que cet argent attend encore de pouvoir aider les Canadiens atteints de maladies rares.

Mme Durhane Wong-Rieger, présidente et directrice générale de la Canadian Organization for Rare Disorders, a dit ce qui suit au Comité de la santé de la Chambre des communes :

[...] nous avons constaté que la majeure partie de cet argent, soit 1,4 milliard du 1,5 milliard de dollars, doit être affectée dans le cadre d’accords bilatéraux. [...]

Ce que nous savons, c’est que, bien que plus d’un an se soit écoulé, aucun accord n’a été mis en place. Nous ne savons même pas s’il y a eu des discussions à ce sujet. Je ne sais pas s’il s’agit simplement d’une question de bureaucratie, de lourdeur du processus ou de difficulté à obtenir l’accord des provinces. Cependant, ce n’est pas ainsi que les choses doivent se passer.

Mme Wong-Rieger se demandait si les mêmes retards dans le déploiement seraient observés pour des médicaments autres que les médicaments pour les maladies rares. Les enseignements tirés par la Canadian Organization for Rare Disorders seraient utiles pour les audiences du Comité.

Au fil des ans, on nous a dit à quel point il est difficile pour le gouvernement fédéral d’obtenir des provinces des données complètes et comparables même si un accord bilatéral impose la communication de ces données.

Par exemple, à la fin de l’année dernière, quand le Comité des affaires sociales étudiait le projet de loi C-35, Loi relative à l’apprentissage et à la garde des jeunes enfants au Canada, nous avons entendu le témoignage de Gordon Cleveland, le président du Groupe d’experts fédéral sur les données et la recherche sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants du Conseil consultatif national sur l’apprentissage et la garde des jeunes enfants. Voici ce qu’il nous a dit :

[...] le problème, c’est que bon nombre de provinces et de territoires n’ont pas la capacité [...]

 — d’améliorer la collecte des données —

[...] ou n’ont pas rangé cette activité dans leurs priorités. Les rapports qu’ils produisent ne sont pas conformes à ce que prévoyaient les accords. Ils ne fournissent pas d’informations en temps opportun comme nous nous y attendions, et lorsqu’ils le font, il y a des problèmes majeurs de comparabilité.

Si, comme le ministre l’a indiqué, on compte offrir une couverture pour certains médicaments sur ordonnance, des contraceptifs et des produits pour le traitement du diabète dans le cadre d’un projet pilote en vue d’une couverture plus universelle, alors il nous faudra d’excellentes données aux fins d’évaluation. Honorables collègues, au comité, on devrait déterminer si les accords bilatéraux peuvent faciliter la collecte de ces données en prévoyant des exigences à cette fin.

Le gouvernement du Canada lancera des discussions avec les provinces et les territoires au sujet de la liste des médicaments contre le diabète comprise dans un document d’information publié sur le site Web de Santé Canada le 29 février 2024. Dans ce document, le gouvernement a également annoncé son intention de créer un fonds pour travailler avec les partenaires des provinces et des territoires afin de soutenir l’accès de la population canadienne aux fournitures dont les personnes atteintes de diabète ont besoin pour gérer et surveiller leur maladie et administrer leurs médicaments, comme les seringues et les bandelettes de test de glycémie.

De nombreux intervenants ont donné leur avis sur la liste fournie dans le document. L’Association québécoise des pharmaciens propriétaires a fait les observations suivantes :

Si on compare la liste du Québec à celle qui est proposée, bien qu’elle ne soit pas définitive, on constate une perte de plusieurs millions d’ordonnances pour le diabète. [...] on gère des ruptures de stock quotidiennement, en pharmacie communautaire. [...] Il faudrait vraiment s’assurer que cette liste couvre minimalement la liste du Québec, bien que le Québec soit généreux.

En matière de diabète, une vaste couverture est nécessaire [...] Cette [...] grande gamme de médicaments couverts est essentielle pour maintenir la santé des Canadiens.

De plus, le fonds proposé pour des fournitures médicales pour les diabétiques n’est pour l’instant rien de plus qu’un engagement. Il ne figure pas dans le projet de loi C-64. Mike Bleskie, porte-parole pour le diabète de type 1, a déclaré au comité de la santé de la Chambre des communes qu’il devait débourser environ 450 $ par mois principalement pour son dispositif de surveillance du glucose en continu, qui n’est pas couvert en Ontario, et pour le matériel nécessaire à sa pompe à insuline. Le projet de loi C-64 n’aiderait pas les diabétiques à couvrir ce genre de dépenses.

Les audiences du comité devraient inclure les conséquences possibles d’une liste aussi limitée et se pencher sur les listes d’autres administrations, tant au Canada qu’à l’étranger.

Chers collègues, le comité devrait aussi se pencher sur trois autres problèmes de taille concernant le projet de loi C-64. Le premier est l’absence de surveillance de la nouvelle Agence canadienne des médicaments.

Le projet de loi C-64 prévoit un rôle important pour l’Agence canadienne des médicaments. La partie 7 du projet de loi C-64 précise que l’Agence canadienne des médicaments conseillera le ministre sur l’efficacité clinique et le rapport coût-efficacité de médicaments sur ordonnance ou de produits connexes comparativement à d’autres options de traitement; les médicaments sur ordonnance ou les produits connexes qui devraient faire partie d’un régime offrant une couverture pour médicaments sur ordonnance au Canada, ainsi que les conditions qui s’appliquent en lien avec celle-ci; la collecte et l’analyse de données relatives à des médicaments sur ordonnance ou à des produits connexes; les renseignements et les recommandations à fournir aux professionnels de la santé et aux patients sur l’utilisation appropriée des médicaments sur ordonnance ou des produits connexes et les améliorations à apporter au système pharmaceutique, y compris au moyen d’une meilleure collaboration entre les partenaires du système de santé, les patients et les autres intervenants. La liste est longue.

(1750)

L’Agence canadienne des médicaments préparera le formulaire national qui servira de base aux discussions du ministre de la Santé avec les provinces, les territoires, les peuples autochtones et d’autres partenaires et intervenants concernant le régime national universel d’assurance-médicaments. L’Agence élaborera également une stratégie nationale d’achat en gros de médicaments sur ordonnance et de produits connexes.

Le problème, honorables sénateurs, c’est qu’on a créé l’Agence canadienne des médicaments à la demande du ministre de la Santé, et non pas par voie législative. Il convient de se demander sérieusement si l’Agence ne devrait pas plutôt être soumise à la surveillance parlementaire, à la Loi sur l’accès à l’information, à des examens de la vérificatrice générale et à des interventions d’un ombudsman des patients.

Lors de son témoignage devant le Comité permanent de la santé, John Adams, de la Coalition pour de meilleurs médicaments, a apporté des précisions, disant :

Le projet de loi confère au ministre de nouveaux pouvoirs importants. On pourrait l’améliorer en instaurant diverses formes de transparence et de reddition de comptes...

... je pense qu’il s’en remet trop à la boîte noire qu’on appelle l’Agence canadienne des médicaments et qu’il ne prévoit pas de mécanismes de transparence ou de reddition de comptes sur ce qui pourrait devenir un rôle très important dans la réforme du système.

Le deuxième grand problème, c’est que, bien que l’Agence conseille le ministre sur la création du formulaire national, les décisions concernant les médicaments qui y seront inclus seront en fin de compte prises par le ministre. Il s’agit là d’un pouvoir extraordinaire.

Pendant son témoignage devant le comité de la santé, Linda Silas, présidente de la Fédération canadienne des syndicats d’infirmières et infirmiers, a déclaré :

[...] lorsque j’ai rencontré le ministre hier, je lui ai dit que ce n’était pas vraiment son rôle de décider ce qui figure sur le formulaire et quel médicament prescrire pour le diabète, et qu’un groupe d’experts devrait s’en occuper.

Le comité devrait examiner, pendant les audiences, s’il est approprié que le ministre détermine, sur les conseils d’un organisme qui n’est pas surveillé par le Parlement, quels médicaments et dispositifs figureront dans le formulaire national.

Le troisième problème fondamental que pose le projet de loi C-64 tient au manque de définitions. Cette préoccupation a été soulevée par beaucoup de députés et d’intervenants pendant l’étude du Comité de la santé.

Le paragraphe 6(1) du projet de loi charge le ministre d’effectuer des paiements aux provinces ou aux territoires :

[...] dans le but d’élargir toute couverture existante d’un régime d’assurance médicaments public — et d’offrir une couverture universelle au premier dollar à payeur unique — en ce qui concerne des médicaments sur ordonnance et des produits connexes destinés à la contraception ou au traitement du diabète.

Le projet de loi ne définit toutefois pas les termes « universelle », « payeur unique » ou « premier dollar », ce qui entraîne une confusion inutile. Le comité devrait, dans le cadre des audiences, considérer la possibilité d’apporter des amendements pour ajouter des définitions.

Selon la Loi canadienne sur la santé :

La condition d’universalité suppose qu’au titre du régime provincial d’assurance-santé, cent pour cent des assurés de la province ait droit aux services de santé assurés prévus par celui-ci, selon des modalités uniformes.

C’est ainsi que les Canadiens comprennent le terme « universel » depuis 1985.

Même si les Canadiens ont peut-être une idée de ce que signifie « payeur unique », il faut définir le terme. Comme l’explique un article paru en 2017 dans le Journal of General Internal Medicine :

Les régimes à payeur unique sont hétérogènes. Il importe de définir ce qu’on entend par payeur unique et d’établir les caractéristiques variables pour avoir des discussions politiques nuancées sur des propositions de réforme précises.

Le gouvernement devrait être invité à fournir une définition précise de « payeur unique » afin que le terme puisse être défini dans le projet de loi C-64.

Le terme « premier dollar » sème aussi la confusion. Au Comité permanent de la santé, Mme Michelle Boudreau, sous-ministre adjointe déléguée de la Direction générale de la politique stratégique de Santé Canada, a expliqué ceci :

« Premier dollar » signifie que, dès qu’un événement assurable survient — dans ce cas, une ordonnance qui a été remplie —, l’assurance s’appliquerait; c’est-à-dire que la couverture s’appliquerait avant tout autre paiement.

De façon semblable, l’Association médicale canadienne définit la couverture au premier dollar ainsi : « Services de santé entièrement couverts par un régime public d’assurance maladie, sans frais pour les patients et patientes. » Cela semble indiquer qu’il n’y aura pas de coordination des prestations lorsqu’un patient a une assurance privée.

Si la couverture publique s’applique avant la couverture privée, le gouvernement n’a pas prévu de fonds suffisants pour son programme :

Dans le budget de 2024, le gouvernement propose de fournir 1,5 milliard de dollars sur cinq ans, à compter de 2024-2025, à Santé Canada afin de soutenir l’établissement du régime national d’assurance médicaments.

Le directeur parlementaire du budget, quant à lui :

[...] estime que la première phase du régime d’assurance médicaments national universel augmentera les dépenses du programme fédéral de 1,9 milliard de dollars sur cinq ans.

Cependant, il faut se rappeler que l’estimation du directeur parlementaire du budget :

[...] suppose que les médicaments actuellement couverts par les gouvernements provinciaux et territoriaux, ainsi que par les assureurs privés, resteront couverts aux mêmes conditions.

Si les contraceptifs et les médicaments contre le diabète qui sont actuellement couverts par les compagnies d’assurance privées sont plutôt couverts par le régime public, le directeur parlementaire du budget estime que cette phase de l’assurance-médicaments coûtera 4,4 milliards de dollars. Il y aurait donc un déficit budgétaire de 2,9 milliards de dollars.

Le gouvernement doit expliquer ce qu’il entend précisément par « premier dollar », et le comité devrait envisager d’amender le projet de loi pour y inclure la définition de ce terme.

Le rapport Hoskins indique ceci :

Le Canada est le seul pays au monde à offrir des soins de santé universels en omettant la couverture universelle pour les médicaments d’ordonnance.

Cependant, chers collègues, la couverture universelle n’est pas nécessairement synonyme de couverture à payeur unique. On peut appuyer la couverture universelle sans appuyer un régime financé exclusivement par le gouvernement fédéral.

En conclusion, honorables sénateurs, quand le projet de loi C-64 sera renvoyé au comité, il y aura beaucoup de questions à examiner, même en ce qui concerne le fond de ce qui est proposé dans la mesure législative. S’agit-il vraiment d’un régime universel, tel que nous comprenons le concept, ou d’un régime qui vise à combler des lacunes? Il semble qu’il y ait une certaine confusion, même sur ces principes.

Chers collègues, les Canadiens comptent sur nous.

Je vous remercie de votre attention et je me réjouis à la perspective d’examiner le projet de loi au comité.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Chers collègues, je n’avais pas prévu de prendre la parole sur ce projet de loi. J’étais certain que notre porte-parole, la sénatrice Seidman, ferait un excellent travail, et c’est ce qu’elle vient de faire. Cependant, la sénatrice Simons m’a entraîné dans le débat la semaine dernière lors de son discours sur ce sujet. J’aurais préféré ne pas m’abaisser à répondre aux commentaires de la sénatrice Simons, mais je me sens obligé de rectifier le compte rendu, car elle a déformé mes paroles et ma position à l’égard d’une question qui revêt une signification profonde pour moi.

Comme je suis déjà debout, je vais saisir l’occasion pour exprimer quelques-unes de mes réflexions sur ce plus récent mauvais projet de loi du gouvernement néo-démocrate—libéral.

Dans son discours du 12 juin, la sénatrice Simons a cité ma citation d’un article du Washington Post sur le fait que les talibans avaient interdit la prévention des naissances en Afghanistan. Pour que ce soit bien clair, je vais répéter la citation du Washington Post, car elle était puissante, et je maintiens l’intégralité de mes propos. Voici la citation :

En raison de la diminution de leurs perspectives éducatives et économiques, les femmes et les filles sont de plus en plus contraintes à des mariages précoces, les familles ayant recours à la vente de leurs filles en âge d’aller à l’école primaire pour se nourrir. Jusqu’à 9 de ces enfants mariées sur 10 seront victimes de violence contre les femmes, et nombre d’entre elles seront encore plus menacées en raison des obstacles à l’accès aux soins de santé imposés par les talibans. Aujourd’hui, en Afghanistan, une femme meurt toutes les deux heures pendant l’accouchement, et la prévention des naissances est interdite. Ces conditions exacerbent la grave crise humanitaire dans un pays rempli de veuves de guerre.

(1800)

Chers collègues, tous ces comportements sont méprisables et répréhensibles. Ils sont cruels et déshumanisants. Ils ne devraient pas exister.

Pourtant, dans une incroyable manifestation de malhonnêteté intellectuelle, la sénatrice Simons a déformé mes propos en déclarant ce qui suit :

[...] je pense qu’il est bien plus révolutionnaire que ce régime englobe les contraceptifs, y compris la pilule, le timbre, l’implant et le stérilet, ainsi que les « pilules du lendemain » d’urgence telles que Plan B.

La semaine dernière, le sénateur Don Plett lui-même s’est exprimé avec beaucoup de conviction au Sénat sur la nécessité de l’accès à la contraception. Il a cité un article du Washington Post qui expliquait que l’un des moyens utilisés pas les talibans pour opprimer les femmes en Afghanistan, c’est d’interdire la contraception.

Je n’avais pas réalisé que le chef de l’opposition au Sénat était un défenseur aussi farouche qu’éloquent du choix des femmes en matière de procréation. Cependant, je lui suis reconnaissante d’avoir exprimé haut et fort son soutien pour le droit de la femme à être [maître] de son propre corps et de sa propre fertilité.

Chers collègues, tous ceux qui sont ici depuis plus d’une semaine connaissent mes convictions personnelles sur le caractère sacré de la vie, qui va de la conception à la mort naturelle. Cela dit, je respecte le droit des autres à leurs convictions et à leurs opinions, y compris celles de la sénatrice Simons.

Pourtant, avec un incroyable manque de respect, la sénatrice Simons a utilisé un extrait de mon discours, où je dénonçais les actes ignobles des talibans à l’égard des femmes et des jeunes filles afghanes, pour sous-entendre que j’étais favorable à l’interruption de grossesse avec ce que l’on appelle communément la pilule du lendemain.

Pour une ancienne journaliste, cela témoigne soit d’un degré scandaleux d’ignorance quant aux paramètres de l’un des débats publics les plus houleux du dernier siècle, soit d’un manque alarmant d’intérêt pour une présentation honnête des faits. Dans un cas comme dans l’autre, c’est troublant.

Il y a cependant un point intéressant dans le discours de la sénatrice Simons. Comme d’habitude, elle appuiera Justin Trudeau, contre la volonté du gouvernement de l’Alberta. Par contre, pour ce projet de loi, nous connaissons au moins sa position dès le début du débat. Nous n’aurons pas à l’écouter nous expliquer, dans un long discours, pourquoi elle hésite à se prononcer pour ou contre. Nous n’aurons pas à la regarder jouer une pièce de théâtre d’été où elle grincera des dents, feignant l’anxiété et l’incertitude quant à son soutien à la population de l’Alberta, avant de finir par voter comme le souhaite Justin Trudeau.

Vous vous souviendrez peut-être que, dans son discours, la sénatrice Simons a attaqué le gouvernement de l’Alberta pour avoir refusé de participer au régime d’assurance-médicaments néo‑démocrate—libéral. Elle a même imaginé une théorie du complot selon laquelle s’opposer au projet de loi C-64 est le signe d’une adhésion à une idéologie de droite concernant les femmes.

Je suis sûr que les députés de l’Assemblée nationale du Québec, qui ont voté à l’unanimité pour dénoncer le projet de loi C-64, seraient étonnés de l’apprendre. Il y a un certain nombre de sénateurs québécois. Je me demande comment ils voteront sur le projet de loi C-64.

Une fois de plus, on peut constater que l’approche « Ottawa a toujours raison » se porte bien parmi certains politiciens. Ils sont prêts à utiliser n’importe quel argument, même farfelu, pour attaquer les provinces qui sont prêtes à défendre leurs droits : « Vous n’êtes pas d’accord avec l’envahissement de votre champ de compétence par le gouvernement fédéral? C’est parce que vous détestez les femmes. »

La sénatrice Simons est un bon exemple de ces politiciens néo‑démocrates—libéraux qui n’hésitent pas à utiliser les parties de la Constitution qu’ils chérissent, comme la Charte des droits et libertés, mais qui rejettent volontiers d’autres parties, comme les articles 91 et 92 de l’Acte de l’Amérique du Nord britannique sur la séparation des pouvoirs.

N’importe quel étudiant en première année de droit vous dira que la santé est une question provinciale, qu’elle relève de la compétence exclusive des provinces.

Pourquoi le gouvernement Trudeau s’en mêle-t-il? Les provinces l’ont-elles demandé? Non, aucune ne l’a demandé. Elles ont toutes dit qu’elles préféreraient obtenir plus d’argent pour la santé. La majorité des Canadiens l’ont-ils demandé? Non. Ils veulent eux aussi plus d’argent pour la santé.

Nous connaissons tous la réponse : c’est le NPD qui voulait un régime d’assurance-médicaments. En perte de vitesse dans les sondages, ce parti avait besoin d’une étincelle pour rallumer la flamme, peu importe la manière.

Justin Trudeau était tout à fait disposé à lui accorder cela pour garder le pouvoir, même si le Parti libéral s’est opposé pendant des années à ce genre de mesures. Cette coalition néo-démocrate—libérale et ses partisans ont décidé de mettre à nouveau la Constitution de côté pour créer un nouveau programme dans un domaine qui relève exclusivement des provinces.

Bien entendu, les provinces ne veulent pas de cela. Elles savent très bien comment les choses vont se dérouler. Le gouvernement fédéral va imposer des conditions tout en promettant de financer le programme. Ensuite, lorsque les coûts vont grimper, il ne paiera plus sa part et laissera les provinces payer la note. C’est ce qu’il a déjà fait dans le domaine de la santé, et c’est aussi ce qu’il a commencé à faire dans les services de garde.

L’idée que le gouvernement fédéral doive intervenir dans les champs de compétence des provinces est la plus grande menace non seulement pour le trésor fédéral, mais aussi pour l’unité de notre fédération. Cependant, le sentiment de supériorité du gouvernement néo-démocrate—libéral par rapport aux provinces est sans limites. Le chef du NPD est allé jusqu’à écrire au ministre de la Santé du Québec pour demander à le rencontrer afin de pouvoir lui faire la leçon sur les avantages d’un régime d’assurance-médicaments, et ce, même si le Québec a déjà un système qui permet de couvrir tout le monde depuis 1996.

Le 16 avril 2024, Peter Julian a dit ceci devant la Chambre des communes : « On sait très bien que le système actuel au Québec n’a pas bien fonctionné. Ça a laissé des gens de côté. » Ce politicien a beau venir de la Colombie-Britannique, et le parti dont il est le leader parlementaire a beau ne compter qu’un seul député au Québec, il a décidé qu’il savait mieux que les Québécois ce qui est bon pour eux.

La sénatrice Simons est en bonne compagnie quand elle prétend qu’elle sait mieux que moi et que le gouvernement de l’Alberta ce qui est bon pour les Albertains. Il est étrange que les personnes qui affirment que les sénateurs ne doivent pas s’opposer aux mesures législatives adoptées par la Chambre des communes au motif qu’elles ont l’aval des élus n’ont aucun problème à s’opposer aux mesures législatives adoptées par les élus de leur propre province. Pour ces personnes, c’est comme si les gouvernements et les élus des provinces étaient inférieurs à leurs homologues ottaviens.

C’est faux. Ce n’est pas ainsi que fonctionne notre fédération. Les provinces sont maîtres dans les domaines qui relèvent de leurs compétences, et l’assurance médicaments en fait partie. S’il y a un endroit à Ottawa où la réalité constitutionnelle devrait être non seulement comprise, mais défendue, c’est bien au Sénat.

Le Québec et l’Alberta ont fait savoir qu’ils ne seront parties prenantes à aucun régime et que, dans l’éventualité où le régime prévu par les libéraux et les néo-démocrates verrait le jour, ils s’attendent à obtenir une pleine compensation.

Je m’inquiète de voir le gouvernement Trudeau refuser de nous confirmer que les provinces qui refusent d’embarquer dans leurs stratagèmes, peu importe lesquelles, seront entièrement compensées.

Je vous rappelle, chers collègues, qu’en tant que sénateurs, nous devons aussi protéger les droits des provinces. J’espère que tous les sénateurs s’en souviendront quand viendra le temps de se prononcer sur le projet de loi C-64. Il n’y a pas de place pour les arguments simplistes et les théories du complot dans l’analyse que nous faisons des positions des divers acteurs du domaine.

(1810)

Le projet de loi est sur le point d’être renvoyé au comité. J’espère que le Comité des affaires sociales fera la lumière sur les positions de chacune des provinces sur le projet de loi et sur l’engagement du gouvernement Trudeau à accepter de donner une pleine compensation financière en cas de retrait, et que les membres du comité respecteront leur devoir de défenseur des droits des provinces.

J’espère aussi que nous obtiendrons une réponse à cette question : qu’est-ce que le gouvernement fédéral tente d’accomplir avec le projet de loi C-64? Parce que, comme je l’ai dit, personne, à l’exception du NPD, ne voulait de ce projet de loi. Alors pourquoi l’avoir présenté, si ce n’est pour faire plaisir à Jagmeet Singh et conserver son appui? Une hypothèse veut qu’il n’y ait pas d’autre raison. C’est ce que j’appellerais la « théorie de la coquille vide ».

Beaucoup de gens ont affirmé qu’il ne s’agit pas d’un régime d’assurance-médicaments, mais seulement d’un plan visant à discuter avec les provinces de la prise en charge par le gouvernement fédéral d’une partie du coût de certains médicaments contre le diabète et de certains contraceptifs. En d’autres termes, le projet de loi est un exercice de relations publiques. Ce serait l’équivalent législatif d’un ministre de la Santé qui inviterait ses homologues provinciaux et territoriaux à une conférence pour discuter d’une question en sachant que quelque chose pourrait se produire ou non.

Compte tenu des circonstances politiques entourant la conception de ce projet de loi, je pense que ces sceptiques ont peut-être raison. Il y a deux partis qui ont obtenu de mauvais résultats dans les sondages et qui essaient de trouver une idée, n’importe laquelle, pour récupérer des votes. Ils n’ont pas l’argent pour financer un grand programme, mais doivent montrer quelque chose d’assez sexy pour faire croire aux gens que quelque chose va changer. Toutefois, ils doivent être prudents; trop de changements feraient peur aux gens. Ils présentent donc un projet de loi tellement vague qu’il ne veut rien dire, mais qui signifie tout. Ils espèrent que les radicaux verront la révolution promise, alors que tous les autres restent endormis en pensant que rien ne leur arrivera.

Les cerveaux derrière cette opération de relations publiques ont pensé qu’ils pourraient ajouter une accroche : l’idée d’inclure les contraceptifs est clairement conçue pour les femmes, qui quittent le train Justin en grand nombre.

Tel était donc le plan : présenter un projet de loi qui n’engage à rien d’autre qu’à poursuivre les discussions avec les provinces, à ne rien prévoir encore dans le budget, à dresser une liste de ce qui serait couvert, mais en précisant que cela pourrait changer. Le gouvernement a mis cette liste sur Canada.ca, ce qui donne de l’espoir aux Canadiens, qui diront : « Eh bien, voici les médicaments qui seront couverts. » Cependant, il y a des gens qui se demandent : « Pourquoi pas celui-ci? Pourquoi pas celui-là? »

Par exemple, les sénateurs savent que le médicament Ozempic ne figure pas sur la liste. Comme réponse, le gouvernement se contente de dire que ce n’est pas la liste définitive. Selon la théorie de la coquille vide, les libéraux vont tourner autour du pot jusqu’aux prochaines élections, rejetant le blâme sur les gouvernements conservateurs provinciaux pour le retard. Ainsi, les libéraux ne touchent pas à la couverture de la grande majorité des Canadiens, et ils mettront à profit cet enjeu dans leur plateforme électorale en 2025.

Ce projet de loi serait un autre de ces projets de loi « Seinfeld » que le gouvernement Trudeau aime tellement — un projet de loi qui ne porte sur rien; une coquille vide. Par contre, ce projet de loi pourrait aussi cacher autre chose, et c’est là que cela devient dangereux. C’est la théorie du cheval de Troie.

Selon l’entente néo-démocrate—libérale, les deux parties doivent « [c]ontinuer de progresser vers la mise en œuvre d’un régime universel d’assurance-médicaments en adoptant une Loi sur l’assurance-médicaments du Canada ». Donc, le but ultime serait ce programme universel. Le député libéral Chandra Arya a dit dans son discours à la Chambre que le projet de loi C-64 est « un nouveau chapitre de notre contrat social », rien de moins. Donc, peut-être que c’est une grande chose, mais quoi exactement?

Plus de 97 % des Canadiens sont déjà admissibles à une forme quelconque de couverture des médicaments sur ordonnance, ce qui laisse environ 1,1 million de Canadiens sans couverture pour leurs médicaments. Pourquoi le gouvernement ne s’est-il pas plutôt concentré à offrir une couverture à ces 1,1 million de Canadiens?

Comparons cela au plus de 27 millions de Canadiens qui sont couverts par un régime privé offert par leur employeur. Devront-ils abandonner complètement leur régime? Qu’advient-il des 27 millions de Canadiens qui disposent déjà d’un régime?

Comme d’habitude, le gouvernement Trudeau affirme une chose et son contraire. Le secrétaire parlementaire Mark Gerretsen a déclaré :

Il s’agit d’accepter et de comprendre que nous méritons tous exactement la même couverture, peu importe qui nous sommes, où nous travaillons et le revenu que nous gagnons.

Donc selon lui, il n’y aurait donc plus de régimes privés — nous aurions tous la même couverture. Mais attention : le ministre Holland, du même gouvernement, a dit :

[...] pour à tout le moins confirmer aux 70 % à 80 % de Canadiens qui ont une assurance privée qu’ils ne perdront pas cette couverture.

Encore une fois, attention : la marraine du projet de loi au Sénat, qui a été désignée par le gouvernement, la sénatrice Kim Pate, a publié un communiqué indiquant que le projet de loi C-64 reflète un processus par étapes :

L’élargissement progressif de la couverture des contraceptifs et des médicaments contre le diabète vers un système d’assurance-médicaments public et universel nécessitera la puissance d’achat d’un système à payeur unique qui achètera les médicaments de 40 millions de Canadiens par l’intermédiaire de processus fondés sur des données probantes et rendant des comptes au public [...]

C’est donc clair pour la marraine : ultimement, l’objectif consiste à retirer leur couverture aux 27 millions de Canadiens qui jouissent d’un régime privé. Je cite encore une fois le communiqué :

« Nous commençons par insister sur le fait que l’accès à l’assurance-médicaments ne varie pas d’une personne à l’autre », a déclaré Kim Pate, marraine du projet de loi C-64 au Sénat. « L’assurance-médicaments doit remédier à la situation fragmentaire de l’assurance-médicaments au Canada, qui compte littéralement des milliers de régimes privés et publics indépendants. Il doit s’agir d’un système cohérent qui rassemble et garantit le pouvoir d’achat du Canada lors de la négociation des prix et des garanties d’approvisionnement avec les multinationales pharmaceutiques. Il doit aider les ménages et les employeurs en les soulageant des coûts de la prise en charge des médicaments. »

Au début du mois, le co-chef de la coalition néo-démocrate—libérale a déclaré :

Nous croyons en un programme universel à payeur unique. Nous avons inclus ce libellé dans le projet de loi. Ce projet de loi n’est pas parfait, mais il pose les bases.

Permettez-moi ensuite de citer le Hill Times du 8 juin :

« La formulation [du projet de loi] est fatalement défectueuse en raison de son ambiguïté », a déclaré le Dr Steve Morgan, professeur à l’Université de la Colombie-Britannique et expert reconnu en matière d’assurance-médicaments, qui plaide depuis de nombreuses années en faveur d’un programme à payeur unique. « [Les produits pharmaceutiques sont] une composante essentielle et massive du système de santé; pourtant, ce projet de loi ne définit pas les termes. Par exemple, que signifie “payeur unique”? Que signifie “universel”? Que signifie “premier dollar”? Que signifie “public”? »

Aucun de ces termes n’est défini dans le projet de loi, qui est le résultat de l’entente de soutien et de confiance entre les libéraux et le Nouveau Parti démocratique. Au lieu de cela, les définitions se limitent à ce qui suit : « peuples autochtones », « ministre », « régime d’assurance médicaments » et « produit pharmaceutique ».

Pourquoi le gouvernement a-t-il élaboré un projet de loi aussi vague? Pourquoi certains défenseurs affirment-ils qu’il s’agit de la première étape d’une refonte complète du processus de distribution des médicaments au Canada, tandis que le ministre continue de nous dire de passer à autre chose et qu’il n’y a rien à voir?

On pourrait penser qu’une telle incertitude quant aux répercussions d’un projet de loi aussi important que le projet de loi C-64 aurait conduit le gouvernement à clarifier ses intentions au cours des travaux du comité de la Chambre, mais non, il a refusé les amendements visant à clarifier ce qu’il adviendrait des assurances privées. N’est-ce pas étrange — un gouvernement qui insiste pour que le programme soit universel, mais qui refuse de définir ce terme?

(1820)

J’espère que lorsque le projet de loi nous reviendra pour la troisième lecture, nous obtiendrons des éclaircissements à ce sujet. Sinon, nous devrons conclure que le projet de loi C-64 est effectivement un cheval de Troie et que l’objectif ultime du gouvernement est ce que la sénatrice Pate et Jagmeet Singh ont déclaré : se débarrasser de toute couverture privée au profit d’un seul programme géré par le gouvernement.

Si c’est le cas, le gouvernement doit avoir le courage de le dire. Si Mark Holland veut annuler toutes les conventions collectives par lesquelles les syndicats et leurs membres ont obtenu une couverture supérieure pour les médicaments, qu’il ait le courage de le dire. J’espère vraiment que le sénateur Yussuff y veillera.

Les libéraux devraient également avoir le courage de nous informer du coût de leur régime d’assurance-médicaments. Comme d’habitude, le gouvernement Trudeau induit les Canadiens en erreur à propos du coût de ses mesures. Mark Holland a dit ceci :

Nous ne pouvons pas nous permettre de mettre en place un programme extrêmement coûteux. Nous ne sommes pas à une époque où le cadre financier peut absorber d’énormes coûts. C’est donc un facteur qu’il faut absolument prendre en considération […]

En octobre 2023, le directeur parlementaire du budget a affirmé qu’un régime d’assurance-médicaments universel à payeur unique coûterait aux gouvernements fédéral et provinciaux 11,2 milliards de dollars la première année et 13,4 milliards de dollars dans cinq ans. Alors, que faut-il comprendre? Est-ce qu’un montant de 11 milliards de dollars n’est plus considéré comme un énorme coût pour le gouvernement, ou est-ce que le ministre Holland dissimule la vérité? Une fois de plus, c’est une question qui devrait être adressée à notre comité.

Enfin, j’espère que le comité précisera la couverture dont les Canadiens bénéficieront une fois que nous aurons un régime national unique. Le 3 mars, Emmanuelle Faubert, une experte de la question, a écrit dans le National Post que, si une couverture semblable au régime public d’assurance-médicaments du Québec devait être appliquée à tout le pays, cela compromettrait la qualité de la couverture de 21,5 millions de Canadiens si un monopole du gouvernement était imposé et que la fin de la couverture risquait de se traduire par une perte d’accès aux médicaments.

Je vous rappelle que, même les partisans du projet de loi C-64 admettent que le modèle québécois est trop coûteux. Le comité et le Sénat devraient examiner attentivement ce qui s’est passé en Nouvelle-Zélande, où certains médicaments ne sont plus disponibles à cause des contraintes du régime public. Est-ce là ce que le projet de loi C-64 réserverait aux Canadiens : plus d’argent, moins de choix et une couverture de qualité inférieure? Est-ce là ce que ce cheval de Troie renferme?

En conclusion, chers collègues, nous avons devant nous un projet de loi mal rédigé dont les objectifs demeurent flous. Est-ce une coquille vide ou est-ce un cheval de Troie qui réduira la couverture dont 21 à 27 millions de Canadiens bénéficient actuellement? Nous ne le savons pas. Le gouvernement, fidèle à son habitude, a précipité l’étude de ce projet de loi à la Chambre. Le comité n’a pu consacrer que 10 heures aux témoignages, sans compter que le ministre passait son temps à changer son fusil d’épaule.

Les Canadiens en ont assez de leur système de santé. Pourquoi devrions-nous imposer un régime d’assurance-médicaments à payeur unique similaire, caractérisé par l’absence de choix, le rationnement des soins et des résultats plus médiocres? Pour citer les paroles célèbres de l’ancien président Ronald Reagan : « [...] les neuf mots les plus terrifiants de la langue anglaise sont : je suis du gouvernement et je viens vous aider ». Je dirais que les mots « Je suis Justin Trudeau et je vais mettre en place un nouveau programme pour remplacer ce qui existe actuellement » sont tout aussi terrifiants.

Nous devons savoir où le gouvernement veut en venir, et le comité a beaucoup de travail à faire sur le projet de loi. J’imagine que la sénatrice Pate voudra tout autant que moi clarifier de quoi il retourne avec le projet de loi C-64 car, jusqu’à présent, nous ne savons pas ce qui sera couvert, nous ne savons pas qui sera couvert, nous ne savons pas comment la couverture sera assurée et nous ne savons pas combien cela coûtera. Le gouvernement veut quand même que nous nous contentions d’adopter le projet de loi en quatrième vitesse.

Nous ignorons quelles seront les conséquences pour les 97 % de Canadiens qui disposent déjà d’une assurance-médicaments. J’espère sincèrement que le comité sénatorial obtiendra des réponses de la part du gouvernement. Je pense que les Canadiens n’ont plus confiance en Justin Trudeau et en ses ministres incompétents. Quand le ministre Holland dit de lui faire confiance au sujet du projet de loi, c’est inacceptable.

Merci.

L’honorable Marilou McPhedran : Le sénateur Plett accepterait-il de répondre à une question?

Le sénateur Plett : Non. Le sénateur Plett est fatigué et il a un autre discours à prononcer sur le projet de loi C-59; il va donc économiser sa salive.

Merci.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

Une voix : Avec dissidence.

(La motion est adoptée et le projet de loi est lu pour la deuxième fois, avec dissidence.)

Renvoi au comité

Son Honneur la Présidente : Honorables sénateurs, quand lirons-nous le projet de loi pour la troisième fois?

(Sur la motion de la sénatrice Pate, le projet de loi est renvoyé au Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie.)

Projet de loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2023

Troisième lecture—Report du vote

Consentement ayant été accordé de revenir aux affaires du gouvernement, projets de loi, troisième lecture, article no 2 :

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Moncion, appuyée par l’honorable sénatrice McBean, tendant à la troisième lecture du projet de loi C-59, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023.

L’honorable Pierre J. Dalphond : Honorables sénateurs, je vais parler brièvement d’un aspect du projet de loi C-59 — un des projets de loi omnibus d’exécution du budget du gouvernement. J’aimerais faire part de préoccupations soulevées par de nombreux intervenants au sujet d’une modification ajoutée à la section 6 de la partie 5 du projet de loi C-59, qui porte sur la Loi sur la concurrence.

Le projet de loi C-59 porte exécution de certaines dispositions du budget déposé le 28 mars 2023 et de l’Énoncé économique de l’automne de 2023. Cependant, ce projet de loi perpétue la mauvaise habitude du gouvernement d’inclure de nombreuses mesures non financières. Par exemple, la partie 5, intitulée « Mesures diverses », compte plus de 130 pages, dont deux nouvelles lois : la Loi concernant l’Agence canadienne de l’eau et la Loi sur le ministère du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités. Elle modifie également plus de 10 lois existantes, y compris la Loi sur la concurrence.

Le projet de loi C-59 propose des mesures concernant les affaires privées devant le Tribunal de la concurrence, par opposition aux procédures engagées par le Bureau de la concurrence. Il modifie aussi la Loi sur la concurrence afin d’ajouter une nouvelle pratique susceptible d’être examinée concernant les déclarations environnementales trompeuses relatives aux produits. Cette nouvelle interdiction visera les déclarations ou les garanties fausses ou trompeuses à propos d’avantages environnementaux d’un produit. Cette mauvaise pratique est appelée l’écoblanchiment.

Par exemple, pensons à Keurig, le fabricant de dosettes de café. En 2022, l’entreprise a dû payer un montant aux États-Unis et au Canada dans le cadre d’un recours collectif concernant des allégations selon lesquelles Keurig aurait fait de la publicité trompeuse en disant que ses dosettes K-Cup étaient recyclables. Keurig a donc dû payer 10 millions de dollars et doit maintenant suivre des restrictions en matière de publicité.

(1830)

Conformément au paragraphe 236(1) du projet de loi C-59, le Bureau de la concurrence Canada — et éventuellement des acteurs privés — pourront engager des procédures au Canada devant le Tribunal de la concurrence en cas d’écoblanchiment de produits.

En cas de poursuite devant le Tribunal de la concurrence, il incombera au fabricant de prouver que les déclarations faites au sujet d’un produit se fondaient sur des épreuves suffisantes et appropriées.

Les amendements proposés par le gouvernement à la déclaration des avantages d’un produit pour l’environnement ont suscité de vives inquiétudes parmi les acteurs économiques, y compris la Chambre de commerce du Canada, l’Association de l’aluminium du Canada et l’Alliance Nouvelles voies, un consortium des plus grandes entreprises exploitant des sables bitumineux. Ces acteurs ne soutiennent pas qu’ils n’ont pas été consultés lors du processus prébudgétaire, mais plutôt qu’il s’agit d’un changement majeur dans le cadre réglementaire régissant la vente de leurs produits.

À mon avis, ils se plaignent des décisions politiques prises par le gouvernement après des années de consultation, comme l’a souligné plus tôt aujourd’hui la sénatrice Moncion dans son discours. J’accepte de telles décisions, y compris l’inversion du fardeau de la preuve pour le fabricant d’un produit qui doit démontrer qu’il a effectué les épreuves appropriées. Toutefois, ces mesures auraient dû faire partie d’un projet de loi distinct se rapportant exclusivement à la Loi sur la concurrence. Au lieu de cela, elles font partie d’un projet de loi omnibus, ce qui prive le Parlement du temps nécessaire pour examiner en profondeur les amendements proposés.

Ce qui est plus inquiétant, c’est l’ajout par la Chambre des communes d’une autre pratique interdite importante qui n’a pas été envisagée par le gouvernement et qui a été ajoutée un peu à la hâte au Comité permanent des finances de l’autre endroit. C’est ce qui s’est passé quand le projet de loi C-59 a été amendé par les partis de l’opposition lors de l’étude article par article au comité pour cibler les déclarations ou indications au sujet d’une entreprise ou d’une marque dans son ensemble concernant les avantages pour l’environnement.

Cet amendement propose de créer une nouvelle forme de comportement susceptible d’examen, défini comme suit :

[...] ou bien des indications sur les avantages d’une entreprise ou de l’activité d’une entreprise pour la protection ou la restauration de l’environnement ou l’atténuation des causes ou des effets environnementaux et écologiques des changements climatiques si les indications ne se fondent pas sur des éléments corroboratifs suffisants et appropriés obtenus au moyen d’une méthode reconnue à l’échelle internationale, dont la preuve incombe à la personne qui donne les indications; [...].

Cet amendement trouve son origine dans un malentendu au sujet d’observations formulées par le commissaire de la concurrence devant le Comité des finances de l’autre endroit. Le Bureau de la concurrence l’a confirmé dans une lettre adressée au Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l’économie :

[Français]

La réalité est qu’une partie importante des plaintes reçues par le Bureau au sujet de l’écoblanchiment ne concernent pas les déclarations au sujet des produits, mais portent plutôt sur des déclarations environnementales plus générales ou prospectives concernant une entreprise ou une marque dans son ensemble (p. ex. des indications concernant le fait d’être « net zéro » ou la « carboneutralité d’ici 2030 »).

En conséquence, le Bureau de la concurrence a recommandé ce qui suit aux décideurs politiques :

Étudier si l’approche adoptée au paragraphe 236(1) concernant l’écoblanchiment pourrait être élargie pour englober toutes les déclarations environnementales faites pour promouvoir un produit ou un intérêt commercial.

Cela continue. C’est le Bureau du commissaire qui parle, et je cite :

Bien que nous ayons recommandé une étude plus approfondie, nous respectons la décision du Comité permanent des finances de la Chambre des communes d’apporter des modifications au paragraphe 236 sur cette question importante. Comme nous l’avons mentionné plus haut, il a pris cette décision après avoir entendu les différents intervenants. Les modifications ont finalement été adoptées à l’unanimité par la Chambre des communes en troisième lecture le 28 mai 2024.

[Traduction]

En d’autres termes, nous avons devant nous un projet de loi qui contient une modification importante de la Loi sur la concurrence qui n’a pas été présentée par le gouvernement et qui a été adoptée sans aucune consultation préalable des parties prenantes, alors que le commissaire invitait en fait les députés à étudier attentivement cette question et peut-être à y apporter une réponse.

Sans surprise, le Comité sénatorial des finances nationales, ainsi que le Comité des banques, ont reçu des mémoires au sujet de cette modification imprévue et ils ont entendu de nombreuses organisations qui se sont dites inquiètes de ce nouveau comportement susceptible d’examen et du caractère imprécis de l’expression « méthode reconnue à l’échelle internationale ». À cela s’ajoutent le fardeau de la preuve imposé aux entreprises et le risque lié aux parties privées.

Pendant l’étude article par article au Comité des finances nationales, la sénatrice Ross a proposé d’abroger les mots « obtenus au moyen d’une méthode reconnue à l’échelle internationale ». Après un débat respectueux, le comité a décidé de rejeter l’amendement et de plutôt inclure dans son 17e rapport, daté du 13 juin 2024, des observations pertinentes que je vais souligner et que je désire par la même occasion porter à l’attention du Bureau de la concurrence :

Le Comité souligne qu’une proportion significative d’acteurs industriels actifs au Canada ont fait de réels efforts pour soutenir le passage à une économie zéro émission nette et pour différencier leurs produits et leurs entreprises sur cette base. Ces efforts légitimes ne doivent pas être découragés ou entravés par crainte des conséquences involontaires de la poursuite d’actions d’écoblanchiment.

Votre comité estime qu’il est important que le Bureau de la concurrence procède à une consultation sérieuse afin d’établir des lignes directrices claires dans ce domaine, et que tout droit d’action privé soit éclairé par ces lignes directrices quant à ce qui peut être considéré comme trompeur dans le domaine de la protection de l’environnement.

En outre, bien que la section 236 (1) du projet de loi C-59 souligne l’importance d’une méthodologie internationalement reconnue pour justifier de telles affirmations, le Comité estime que l’analyse devrait aussi inclure les meilleures pratiques qu’elles soient fédérales, ou de partout ailleurs au Canada, telles que celles définies par Environnement et Changement climatique Canada.

Aujourd’hui, chers collègues, on nous demande d’adopter le projet de loi C-59 dans son ensemble, même s’il contient des changements importants à la Loi sur la concurrence pour lesquels il n’y a pas eu de consultation préalable par le gouvernement dans son processus prébudgétaire, ni par le Bureau de la concurrence. J’invite toutefois le ministre Champagne — qui est responsable de la Loi sur la concurrence —et le gouvernement à envisager des moyens de donner suite à nos observations, y compris d’éventuelles modifications législatives après de sérieuses consultations auprès des parties intéressées.

Enfin, j’exhorte le Bureau de la concurrence à respecter l’engagement pris dans sa lettre du 31 mai 2024, qui consiste à adopter une approche fondée sur des principes pour l’application des nouvelles dispositions. Cette approche devrait s’inspirer des observations formulées par le Comité sénatorial permanent des finances nationales et être élaborée à la suite d’un véritable processus de consultation auprès de toutes les parties prenantes.

(1840)

Chers collègues, je vous remercie de votre attention. Meegwetch.

L’honorable Donald Neil Plett (leader de l’opposition) : Honorables sénateurs, je prends également la parole aujourd’hui au sujet du projet de loi C-59, Loi portant exécution de certaines dispositions de l’énoncé économique de l’automne déposé au Parlement le 21 novembre 2023 et de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 28 mars 2023, également connu sous son titre abrégé « Loi d’exécution de l’énoncé économique de l’automne 2023 ».

Dans le discours qu’elle a prononcé à l’étape de la deuxième lecture, la sénatrice Marshall a donné une excellente vue d’ensemble des nombreux problèmes que pose ce projet de loi. Comme vous le savez, elle n’a pas eu assez de temps pour couvrir tous les problèmes. Je suis sûr que si elle disposait d’un temps de parole illimité, elle l’utiliserait à très bon escient.

Cependant, je dois admettre que cela me laisse toujours perplexe de voir les sénateurs applaudir le discours et ensuite appuyer de toute façon le projet de loi, même quand le leurre est dévoilé et que l’on voit que les arguments du gouvernement sont totalement bidon.

Je m’attends tout à fait à ce que le sénateur Dalphond vote contre le projet de loi C-59 lorsqu’il sera mis aux voix, mais nous verrons ce qui se passera.

Cette situation se répète presque chaque semaine : les sénateurs entrent dans cette enceinte et dans les salles de réunion des comités avec leur idée apparemment toute faite. Aussi convaincants que soient les arguments ou les preuves, le résultat est toujours le même : les preuves sont ignorées, les arguments sont balayés du revers de la main et le gouvernement obtient un laissez-passer. Des représentants du gouvernement affirment qu’un projet de loi dépasse sa portée, mais nous l’adoptons quand même.

Les exemples sont nombreux, mais pour illustrer mes propos, permettez-moi de rappeler le cheminement du projet de loi C-234, Loi modifiant la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre. Vous vous rappelez peut-être que ce projet de loi créait des exemptions supplémentaires à la taxe sur le carbone. Tous les secteurs de l’industrie agricole appuyaient cette mesure législative.

Or, on a averti les sénateurs que, s’ils changeaient quoi que ce soit, le gouvernement ferait de l’obstruction et torpillerait le projet de loi.

Malgré cet avertissement, la majorité des sénateurs, se jugeant plus avisés, ont voté en faveur des amendements proposés par les sénateurs Dalphond et Woo.

Aujourd’hui, le projet de loi croupit à la Chambre des communes, comme nous l’avions prévu. Les agriculteurs l’attendent encore. Par trois fois, le projet de loi s’est hissé en haut du Feuilleton. Chaque fois, les libéraux ont fait traîner les choses pour qu’il ne soit pas mis aux voix. En amendant le projet de loi, les sénateurs ne l’ont pas amélioré, ils l’ont torpillé. Ce sont les agriculteurs qui en font les frais.

Je trouve que cette tendance à ignorer les faits et les arguments est très troublante et quelque peu déroutante, mais j’accepte que ce soit là la réalité actuelle et je ne voudrais pas que vous pensiez que mes observations visent à vous faire changer d’avis sur ce projet de loi. Je suis bien conscient qu’une telle tentative serait un exercice futile, comme le vote à l’étape de la deuxième lecture en est la preuve. Si je prends la parole, c’est plutôt dans le but de donner une voix à la majorité croissante de Canadiens qui sont très inquiets de ne pas se sentir représentés par le gouvernement libéral ni par les sénateurs qu’il a nommés.

Bon nombre de Canadiens ont presque perdu tout espoir envers notre pays et nos institutions. Ils regardent impuissants, leur rêve d’un avenir meilleur se dissiper lentement alors que le gouvernement malmène l’économie, exacerbe l’inflation, augmente la dette nationale, engrange les recettes fiscales, fait grimper en flèche le prix de l’énergie, rend inatteignable l’accès à la propriété abordable, sape la confiance des entreprises, ne tient pas compte de la chute de la productivité et flirte avec des décisions politiques qui risquent d’endommager les liens avec les partenaires commerciaux clés.

Chaque jour, je reçois des courriels et des appels de Canadiens inquiets à mon bureau. Les Canadiens sont les témoins impuissants et ahuris de la destruction systématique du pays qu’ils adorent à cause du gouvernement au pouvoir, un gouvernement qui réprimande tous ceux qui osent penser le contraire.

D’ailleurs, le leader du gouvernement réprimande constamment les sénateurs qui expriment leur point de vue à la période des questions.

Ce sont les personnes qui se sentent invisibles et réduites au silence : celles qui ont été considérées comme des conspirationnistes simplement parce qu’elles ne peuvent pas croire que quelqu’un qui a à cœur les intérêts de notre pays ferait ce que le gouvernement est en train de faire; celles qui peinent à garder espoir et à se faire entendre.

Voilà les gens pour qui je m’exprime aujourd’hui, chers collègues, et voilà les gens qui souhaitent que vous entendiez ce que je vais dire.

Chers collègues, le projet de loi que nous examinons aujourd’hui a été déposé au Parlement le 30 novembre de l’année dernière. Il met en œuvre certaines des mesures contenues dans l’Énoncé économique de l’automne 2023 et certaines des mesures contenues dans le budget de mars 2023.

Le document de 526 pages que nous examinons aujourd’hui met donc en œuvre des politiques qui ont été annoncées pour la première fois il y a 7 à 15 mois et envisagées bien avant. La plupart de ces politiques étaient malavisées à l’époque, et elles sont encore pires aujourd’hui.

Normalement, quand on sait qu’on va dans la mauvaise direction, on change de cap, mais ce n’est pas le cas du gouvernement actuel. Au cours des neuf dernières années, les libéraux ont mis en place des politiques qui ont constamment entraîné le pays dans une position économique dangereuse, et ils ne montrent aucun signe de relâchement.

Nous en avons des preuves accablantes partout. Permettez-moi de vous donner quelques exemples.

Premièrement, il y a les chiffres records de la fréquentation des banques alimentaires. L’année dernière, les banques alimentaires ont servi 2 millions de visiteurs en un seul mois et on s’attend à atteindre 3 millions de visites en un mois en 2024. L’autre semaine, Nanos a publié les résultats d’un sondage qui indiquait que près d’un Canadien sur cinq affirme avoir eu recours aux services d’une banque alimentaire au cours des 12 derniers mois ou connaître quelqu’un qui y a eu recours.

Deuxièmement, il y a la montée en flèche des coûts du logement. Le coût du logement a doublé — oui, sénateur Gold, doublé — au cours des huit dernières années, ce qui fait qu’il est beaucoup plus difficile pour les Canadiens de se loger. Il s’agit aussi bien des prix d’achat que des coûts de location, sénateur Gold.

Troisièmement, il y a l’augmentation des paiements hypothécaires. Ces derniers ont augmenté de 150 % depuis que le gouvernement actuel est entré en fonction. Cette flambée des coûts contribue à la pression financière subie par les ménages canadiens. La Banque du Canada a prévenu qu’ils devraient encore augmenter, le paiement mensuel médian augmentant de plus de 60 % pour ceux qui ont un prêt hypothécaire à taux variable.

Quatrièmement, il y a l’écart d’abordabilité dans le secteur du logement. Le coût du logement a augmenté 40 % plus vite que les revenus, créant le pire écart d’abordabilité du G7 et le deuxième en importance chez les 40 pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques.

Cinquièmement, il y a l’épargne pour les mises de fonds. Il faut désormais 25 ans pour économiser en vue d’un versement initial pour une maison moyenne pour une famille type à Toronto, ce qui représente une augmentation significative par rapport aux années précédentes.

Sixièmement, le taux d’inflation reste élevé. Malgré les avertissements d’experts financiers, les dépenses du gouvernement continuent d’alimenter l’inflation et d’éroder le pouvoir d’achat des Canadiens. Des taux d’inflation élevés signifient que le gouvernement s’enrichit alors que les Canadiens s’appauvrissent.

Septièmement, il y a les taux d’intérêt et les risques hypothécaires. La Banque du Canada a souligné le risque d’une crise de défauts de paiements hypothécaires, car 900 milliards de dollars en prêts hypothécaires devront être renouvelés au cours des trois prochaines années à des taux beaucoup plus élevés. Cette situation crée un risque financier grave pour de nombreux propriétaires. Le Bureau du surintendant des institutions financières signale que de nombreux Canadiens subiront un choc lorsqu’ils renouvelleront leur prêt hypothécaire à des taux beaucoup plus élevés au cours des deux prochaines années, ce qui pourrait toucher jusqu’à 76 % des Canadiens ayant un prêt hypothécaire en cours. Par voie de conséquence directe, le Bureau du surintendant des institutions financières prévoit que ces hausses des mensualités mèneront à une augmentation du nombre de Canadiens dans l’incapacité de rembourser leur prêt hypothécaire.

(1850)

Vient ensuite la proximité de la faillite. Plus de 50 % des Canadiens sont désormais à 200 $ tout au plus de l’insolvabilité, ce qui montre la précarité financière généralisée au sein de la population. Le Bureau du surintendant des institutions financières a fait remarquer ce qui suit :

[...] les paiements hypothécaires accrus grugent une part plus grande du revenu des ménages, ce qui fait augmenter le nombre d’emprunteurs qui n’ont pas les moyens de faire des versements sur leurs autres dettes ou emprunts.

En fait, selon Desjardins, les ménages canadiens sont les plus endettés du G7, et de loin.

La dette est écrasante. L’endettement des ménages sur le marché du crédit a atteint le chiffre ahurissant de 2,9 billions de dollars, ce qui signifie que, à la fin de l’année dernière, l’endettement des ménages correspondait à 179 % du revenu disponible des Canadiens.

Les faillites d’entreprise ont augmenté de 87 % rien qu’au cours de l’année écoulée, un signe du contexte économique difficile et de son incidence sur le secteur des affaires. Il y a eu une augmentation de 39 % des crimes violents, ce qui contribue à un sentiment croissant d’insécurité parmi les Canadiens.

Nous constatons une augmentation du taux de pauvreté. Banques alimentaires Canada a publié aujourd’hui un rapport qui laisse entendre que le taux de pauvreté augmente et que 25 % des Canadiens ont probablement un niveau de vie sous le seuil de pauvreté. Imaginez, chers collègues, que dans notre pays, 25 % des Canadiens ont probablement un niveau de vie sous le seuil de pauvreté.

Les campements de sans-abri sont devenus courants dans presque toutes les grandes villes, ce qui témoigne d’une augmentation considérable de l’itinérance et de la précarité du logement.

Le Canada est moins apte à soutenir la concurrence mondiale. En effet, notre pays qui, en 2007, se classait au 4e rang selon l’indice de la facilité de faire des affaires de la Banque mondiale a dégringolé au 23e rang en 2020. Ce déclin s’accompagne d’une diminution de sa part du PIB mondial et d’un faible taux d’innovation intérieure.

Actuellement, avec un PIB par heure correspondant à 42,5 % de celui du meilleur pays, l’Irlande, le Canada se classe au 18e rang en matière de productivité. Le Canada est l’un des seuls pays développés qui n’a pas retrouvé son PIB par habitant d’avant la pandémie. Pour ce qui est du PIB réel par habitant, l’OCDE prévoit d’ailleurs qu’il se classera bon dernier des pays membres jusqu’en 2060.

Honorables sénateurs, les conservateurs pleins de bon sens ont fréquemment averti Justin Trudeau que ses dépenses effrénées obligeaient la Banque du Canada à maintenir ses taux d’intérêt à un niveau élevé. Or, le projet de loi dont nous sommes saisis prévoit quand même de nouvelles mesures qui nous éloigneront encore de près de 21 milliards de dollars de l’équilibre budgétaire, s’il faut en croire le directeur parlementaire du budget.

Le gouverneur de la Banque du Canada a confirmé que les dépenses de Trudeau ne l’aident pas à abaisser les taux d’intérêt. De son côté, la première sous-gouverneure de la Banque du Canada, Carolyn Rogers, a déclaré que la productivité économique du Canada est si faible qu’il s’agit selon elle d’une urgence.

Pourtant, malgré tout cela, Justin Trudeau a décidé d’accumuler 23,9 milliards de dollars de nouvelles dépenses dans l’énoncé économique de l’automne et 61 milliards de dollars de nouvelles dépenses dans le budget d’avril 2024. Ensemble, ces mesures réduiront notre solde budgétaire de 60 milliards de dollars au cours de la période allant de 2023-2024 à 2028-2029.

Il y a six mois — lorsque l’énoncé économique de l’automne a été présenté —, le directeur parlementaire du budget nous a mis en garde contre ce qui suit :

Depuis le budget de 2021, le gouvernement a projeté une nouvelle marge de manœuvre financière totale de 212,8 milliards de dollars. Pratiquement toute cette marge de manœuvre financière a été épuisée sous l’effet de l’augmentation des dépenses (sur une base nette); seulement 0,5 milliard de dollars ont été utilisés pour réduire le déficit (sur une base cumulative).

Il y a à peine un mois, le directeur parlementaire du budget a publié son rapport intitulé Budget 2024 : enjeux pour les parlementaires, dans lequel il a encore une fois sonné l’alarme :

Le budget de 2024 est le troisième plan financier consécutif dans lequel les nouvelles mesures du gouvernement, même après la prise en compte des examens d’accroissement des recettes et des dépenses, ont dépassé la marge de manœuvre financière supplémentaire découlant de l’évolution de la situation économique et financière. En effet, les 39,3 milliards de dollars (nets) de nouvelles mesures annoncées dans le budget de 2024 ont plus qu’épuisé les 29,1 milliards de dollars de nouvelle marge de manœuvre financière pour la période allant de 2023-2024 à 2028-2029.

Autrement dit, alors que notre économie a du mal à se remettre sur pied, le gouvernement est déterminé à l’envoyer encore et encore au tapis.

Pris isolément, le projet de loi C-59 peut sembler anodin. Toutefois, si vous prenez un peu de recul, que vous regardez d’où nous venons et que vous vous projetez dans l’avenir, vous verrez que le projet de loi C-59 continue de nous pousser dans une direction que nous ne voulons pas prendre.

Ce projet de loi est truffé de faux pas et d’erreurs de jugement qui pèseront sur les Canadiens, entraveront nos progrès et exacerberont les problèmes existants. Permettez-moi de souligner brièvement quatre d’entre eux.

Premièrement, il y a les répercussions économiques et l’inflation. Comme je l’ai dit précédemment, ce projet de loi propose plus de 20 milliards de dollars de nouvelles dépenses. Nous pouvons discuter de l’incidence inflationniste de ces 20 milliards de dollars, mais le fait qu’ils auront des répercussions est indubitable.

Pour ceux qui l’ignorent, le gouvernement ne dispose pas d’une réserve d’argent sans fond dans laquelle il puise comme par magie chaque fois qu’il annonce de nouvelles dépenses, même si c’est certainement l’impression que donne Justin Trudeau. Lorsque le gouvernement a besoin de plus d’argent, il doit soit le retirer de l’économie en augmentant les impôts, soit l’extraire des marchés financiers en empruntant davantage.

Il en résulte une pression à la baisse sur la croissance économique, une pression à la hausse sur l’inflation et les taux d’intérêt, ou une combinaison des deux. Comme mes collègues et moi l’avons souligné à maintes reprises, ce mini-budget peut se résumer très simplement : hausse des prix, hausse des taux, hausse de la dette, hausse des impôts. Le gouvernement a complètement ignoré les avertissements et a adopté une politique financière irresponsable.

Le gouvernement libéral et les sénateurs aux idées libérales peuvent trouver facile de rejeter ces critiques lorsqu’elles émanent du Parti conservateur, mais je vous rappelle que ces avertissements ont été repris par la Banque du Canada et le secteur financier, qui ont déclaré sans équivoque que les dépenses du gouvernement contribuent au haut taux d’inflation de notre pays.

Pourtant, malgré ces appels à la modération, le gouvernement poursuit son programme inflationniste, et la majorité des sénateurs dans cette enceinte le soutiendra dans ses efforts.

Cela explique pourquoi Justin Trudeau dépensera plus d’argent l’année prochaine pour le service de sa dette qu’il en dépensera pour les transferts en santé. Ce fait n’est pas seulement une indication de son irresponsabilité financière, mais un présage des sacrifices que les Canadiens seront obligés de consentir à mesure que ces coûts augmenteront encore plus en raison de l’incapacité du gouvernement à maintenir à un faible niveau la dette liée à la COVID.

On pourrait toutefois s’empresser d’attirer l’attention sur les derniers chiffres de l’indice des prix à la consommation qui montrent une baisse de l’inflation — comme le sénateur Gold l’a fait aujourd’hui — et sur la décision correspondante de la Banque du Canada de réduire le taux d’intérêt de 25 points de base. C’est une bonne nouvelle, mais nous devons...

(1900)

Son Honneur la Présidente : Sénateur Plett, je dois malheureusement vous interrompre.

Honorables sénateurs, il est maintenant 19 heures. Conformément à l’article 3-3(1) du Règlement, je dois quitter le fauteuil jusqu’à 20 heures, heure où nous reprendrons nos travaux, à moins que vous souhaitiez ne pas tenir compte de l’heure.

Vous plaît-il, honorables sénateurs, de ne pas tenir compte de l’heure?

Des voix : D’accord.

Le sénateur Plett : Merci, chers collègues. Je vais donc continuer.

C’est une bonne nouvelle, mais nous devons la replacer dans son contexte, chers collègues.

Tout d’abord, un gouvernement qui a toujours poussé l’inflation à la hausse avec ses politiques budgétaires imprudentes n’est pas en mesure de s’enorgueillir lorsque l’inflation évolue dans la direction opposée. Le gouvernement actuel n’a rien fait pour réduire l’inflation; il n’a fait que l’aggraver. Toute baisse de l’inflation a coûté très cher aux Canadiens en raison des sacrifices qu’ils ont consentis et des difficultés qu’ils ont endurées, alors que la Banque du Canada a utilisé la politique monétaire pour lutter contre une politique budgétaire insensée.

Deuxièmement, nous devons nous rappeler qu’à mesure que l’inflation diminue, les prix, eux, ne diminuent pas. Le gouvernement actuel se vante de la baisse de l’inflation comme s’il en était en quelque sorte responsable et que la vie était sur le point de revenir à la normale — période que nous avons connue juste avant que Justin Trudeau ne devienne premier ministre. C’est faux, chers collègues. Le mal est fait, et je soupçonne qu’il y en aura davantage tant que ce premier ministre incompétent et son gouvernement seront au pouvoir.

Troisièmement, nous ferions bien de noter que la Banque du Canada a averti que les risques qui planent sur les perspectives d’inflation demeurent. La Banque du Canada a indiqué :

[...] nous continuerons à surveiller de près l’évolution de l’inflation fondamentale. Nous restons attentifs à l’équilibre entre l’offre et la demande, aux attentes d’inflation, à la croissance des salaires et aux pratiques d’établissement des prix des entreprises.

La Banque Scotia a également fait part de ses préoccupations :

[...] les risques d’inflation restent quand même une source d’inquiétude, au vu de la hausse des salaires et de la baisse de la productivité, ainsi que de la surprenante vigueur de la consommation, de l’hyperstimulation répétée des gouvernements fédéral et provinciaux et de la reprise potentielle du marché immobilier.

Bref, les choses avancent très peu, et il est inquiétant que le gouvernement ne réussisse pas à harmoniser sa politique financière à sa politique monétaire. La Banque du Canada essaie de comprimer les dépenses, mais la ministre des Finances n’en tient pas compte.

Le projet de loi C-59 nous fait aussi faire fausse route parce qu’il augmente les impôts. Il instaure des mesures qui pénalisent indûment les gens de la classe moyenne en exacerbant la crise du coût de la vie. La taxe sur les services numériques en est un bon exemple. Cette taxe vise les grandes entreprises, mais en réalité, elle sera refilée aux consommateurs. Par conséquent, le coût des services numériques et d’autres biens augmentera alors que les Canadiens tirent déjà le diable par la queue.

Le Conseil canadien du commerce de détail s’est dit inquiet de cette nouvelle taxe. Selon lui, elle aura des conséquences plus importantes que prévu sur l’écosystème du commerce au détail. Il signale à juste titre que cette taxe imposera d’importantes contraintes administratives, qu’elle pourrait entraîner une double imposition et qu’elle fera augmenter les prix, ce qui nuira aux consommateurs canadiens. Par ailleurs, la Chambre de commerce du Canada a déclaré ceci :

Le moment ne pourrait pas être plus mal choisi : l’accessibilité financière est actuellement au cœur des préoccupations de presque tous les Canadiens, et les préoccupations liées aux coûts constituent six des dix principaux obstacles commerciaux prévus...

Elle a prévenu que la taxe aura au moins cinq répercussions négatives sur la vie quotidienne des Canadiens et sur l’économie : les services numériques de tous les jours coûteront plus cher, les programmes de fidélisation des clients seront moins avantageux, la croissance des entreprises et l’innovation diminueront, les jeunes entreprises et les petites entreprises seront les plus touchées, et les relations commerciales du Canada seront ébranlées.

La nature rétroactive de la taxe sur les services numériques exacerbe encore plus le problème en minant la confiance des entreprises et en risquant d’attiser les tensions commerciales avec notre principal partenaire commercial, les États-Unis.

Je n’exagère pas. L’année dernière, l’ambassadeur des États-Unis David Cohen a dit :

[...] si le Canada décide de faire cavalier seul, les États-Unis n’auront d’autre choix que de prendre en conséquence des mesures de rétorsion dans le contexte commercial, potentiellement dans le contexte du commerce numérique.

Le comité des voies et moyens de la Chambre des représentants des États-Unis et le comité des finances du Sénat américain ont tous deux exprimé des inquiétudes et exhorté la représentante au Commerce à prendre des mesures de rétorsion si le Canada procédait unilatéralement à l’application de cette taxe. Le comité des voies et moyens a écrit ce qui suit :

En tant que membres du comité des voies et moyens, nous tenons à exprimer notre désaccord par rapport à la décision du Canada d’aller de l’avant avec une taxe sur les services numériques [...] qui, si elle était imposée, nuirait considérablement à des entreprises et à des travailleurs états‑uniens. Malgré les efforts de la presque totalité des 140 économies de l’Organisation de coopération et de développement économiques [...] pour en arriver à une entente sur la modernisation des règles fiscales internationales et pour imposer un moratoire sur les [taxes sur les services numériques] pour une période d’un an, jusqu’au 31 décembre 2024, nous sommes déçus que le Canada ait malheureusement décidé d’aller à l’encontre de ce consensus mondial en imposant une [taxe sur les services numériques] punitive qui devrait entrer en vigueur l’année prochaine. Nous vous exhortons à faire comprendre à vos homologues du Canada que cette approche unilatérale est discriminatoire et qu’elle pourrait avoir des conséquences importantes si elle était adoptée.

Malgré cela, le gouvernement libéral a décidé de rester dans son monde imaginaire en allant de l’avant sans écouter qui que ce soit pour tenter désespérément d’aller chercher quelques dollars de plus dans les poches des contribuables afin de nourrir son penchant malsain pour les dépenses.

Troisièmement, en plus des dépenses inflationnistes et de l’alourdissement du fardeau fiscal, le projet de loi C-59 a aussi une incidence sur le prix de l’énergie. Les règles de restriction des dépenses excessives d’intérêts et de financement qui sont proposées visent à prévenir les déductions déraisonnables à l’égard des intérêts et d’autres frais de financement. Cependant, ces règles ont une portée tellement vaste qu’elles s’appliqueront aux sociétés énergétiques canadiennes, ce qui fera augmenter le prix de l’énergie pour les consommateurs.

Comme M. Francis Bradley, président et chef de la direction d’Électricité Canada, l’a expliqué au Comité des finances nationales, les entreprises de services publics ont l’obligation de refiler les coûts fiscaux aux clients. C’est donc dire que les règles concernant la restriction des dépenses excessives d’intérêts et de financement, ou RDEIF, feront grimper les factures de services publics, ce qui accentuera la pression financière sur les ménages déjà confrontés à la hausse des coûts. Dans certaines provinces, les consommateurs paieront les coûts liés à la RDEIF sur leur facture de gaz, mais pas sur leur facture d’électricité, ou l’inverse. On se retrouvera donc avec divers gagnants et perdants en matière d’abordabilité.

Alors que bon nombre de nos pairs au sein de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’OCDE, y compris les États-Unis, l’Irlande et le Royaume-Uni, ont exempté les services publics de l’application de ces règles, le gouvernement libéral s’y refuse. Lorsque les conservateurs ont proposé un amendement afin de faciliter une telle exemption pendant l’étude du comité de la Chambre des communes, il a été rejeté.

Le quatrième domaine dans lequel ce projet de loi laisse à désirer concerne la politique en matière de logement. Les mesures que propose le projet de loi C-59 pour remédier à la grave pénurie de logements sont tout à fait insuffisantes. Le projet de loi créerait un nouveau ministère du Logement, de l’Infrastructure et des Collectivités, ce qui ne ferait qu’ajouter une nouvelle couche de bureaucratie, un domaine dans lequel les libéraux excellent. Il manque actuellement 1,8 million de logements, et les mesures prévues dans le projet de loi C-59 ne feront rien pour résoudre cette crise. La politique emblématique de ce minibudget a été d’injecter 15 milliards de dollars dans un fonds qui permet de construire à peine 1 500 logements par année, alors que nous avons besoin de 5,8 millions de nouveaux logements d’ici 2030 pour répondre à la demande.

C’est un cas classique de « trop peu, trop tard ».

Il y a quelques semaines, des constructeurs ont déclaré au Comité permanent des ressources humaines, du développement des compétences, du développement social et de la condition des personnes handicapées, un comité de la Chambre des communes, qu’il était impossible que le gouvernement atteigne ses objectifs en matière de mises en chantier. La députée Tracy Gray a posé la question suivante :

(1910)

Dans le budget libéral de 2024, on prétend que 3,87 millions de logements seront construits d’ici 2031 [...]

[D]ans quelle mesure est-ce réaliste?

Richard Lyall, président du Conseil de la construction résidentielle de l’Ontario, a répondu : « Ce ne l’est absolument pas. » C’est parce que les mises en chantier sont actuellement en baisse, et non en hausse, en raison des coûts de financement et des droits d’aménagement élevés. M. Lyall a ajouté ceci :

[...] [N]ous ralentissons. Nous avons des centaines d’équipes de charpentiers qui attendent à la maison. Le processus suit son cours.

Il a aussi dit ceci :

Les changements apportés à la fiscalité des logements construits à des fins locatives sont très utiles pour maintenir certains projets en marche, mais nous nous dirigeons vers un énorme recul.

Il a également dit :

Nous sommes en situation de crise.

Honorables collègues, les Canadiens ont dû se battre pour survivre à ce raz-de-marée de politiques irresponsables du gouvernement qui détruit tout sur son passage. Pendant que les contribuables se battent pour survivre, le gouvernement ne cesse de changer les critères qu’il utilise pour évaluer son rendement.

En 2015, le gouvernement libéral de Justin Trudeau s’est engagé à respecter sa première règle budgétaire : équilibrer le budget avant l’exercice financier 2019-2020. Cela aurait dû être facile, car, selon le premier ministre, nous savons tous que le budget s’équilibre par lui-même. Pourtant, cet engagement n’a même pas survécu une seule année. On l’a remplacé par un deuxième engagement à réduire la dette fédérale en proportion de l’économie. On a abandonné cet engagement avant même que la pandémie n’éclate, le ratio dette‑PIB ayant augmenté en 2019-2020 et ayant ensuite continué d’augmenter en flèche durant la pandémie.

Puis, en 2020, dans son premier énoncé économique de l’automne à titre de ministre des Finances, la ministre Freeland a introduit un nouveau garde-fou budgétaire, conçu pour lier les dépenses gouvernementales aux résultats du marché du travail. Ce garde-fou était censé indiquer quand réduire les dépenses de relance économique après la pandémie de COVID-19. Cependant, le marché de l’emploi s’étant redressé plus rapidement que prévu, on a rapidement abandonné cet objectif.

Dans le budget de 2022, le gouvernement a rétabli la diminution du ratio dette-PIB comme objectif budgétaire, et pourtant, une fois de plus, il a fait exploser les dépenses en 2022-2023, puis en 2023-2024. Le directeur parlementaire du budget prévoit que le gouvernement refera la même chose au cours de l’exercice 2024-2025.

Voici ce qu’a fait remarquer le Conseil canadien des affaires :

Le bilan de Trudeau-Freeland en matière de garde-fous ou de points d’ancrage budgétaires en dit long. Depuis 2020, le gouvernement fédéral n’a jamais atteint un objectif budgétaire qu’il s’était imposé.

Voilà ce que pense le Conseil canadien des affaires, sénateur Gold, et non le Parti conservateur du Canada. En outre, le conseil considère qu’il est très improbable que le gouvernement actuel atteigne l’une ou l’autre de ces cibles.

Chers collègues, le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd’hui n’est qu’une autre illustration de l’incompétence irresponsable du gouvernement. Le projet de loi C-59 comporte de graves lacunes dans son approche pour relever les défis auxquels notre pays fait face sur le plan économique, social et réglementaire. Le projet de loi propose une augmentation des dépenses, ce qui fera augmenter l’inflation et les taux d’intérêt; des hausses de taxes, ce qui aggravera le fardeau de la classe moyenne; des politiques énergétiques qui feront augmenter les coûts pour les consommateurs; et des mesures inadéquates pour le logement. En un mot, c’est un échec. La seule réponse appropriée dans ces conditions, c’est de rejeter ce projet de loi.

Chers collègues, certaines personnes dans cette enceinte ont acquis une certaine expertise dans le secteur financier. D’autres sénateurs ont une expérience dans le secteur bancaire. J’aimerais savoir comment ils réagiraient devant un client qui viendrait les consulter pour obtenir un prêt bancaire, et s’ils lui accorderaient le financement. Nous allons voir comment ils voteront sur cette question, car ce sera une bonne indication de la façon dont ils s’y prendraient pour gérer une banque.

J’exhorte tous les sénateurs à envoyer un message au gouvernement pour lui faire comprendre que ce qui est proposé n’est pas suffisant. Chers collègues, nous pouvons rejeter ce projet de loi et cela ne fera pas tomber le gouvernement. Agir de manière responsable, faire ce qui s’impose, c’est rejeter ce projet de loi. Si vous le faites, chers collègues, les Canadiens d’un bout à l’autre du pays nous remercieront. Merci.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix : Oui.

Son Honneur la Présidente : Que les sénateurs qui sont contre la motion veuillent bien dire non.

Des voix : Non.

Son Honneur la Présidente : À mon avis, les oui l’emportent.

Et deux honorables sénateurs s’étant levés :

Son Honneur la Présidente : Je vois deux sénateurs se lever. Y a-t-il entente au sujet de la sonnerie?

Le vote est reporté. Conformément à l’article 9-10(1) du Règlement et à l’ordre adopté le 21 septembre 2022, le vote est reporté à 16 h 15 demain, et la sonnerie retentira à compter de 16 heures.

Le Sénat

Adoption de la motion concernant les délibérations du projet de loi C-69

L’honorable Marc Gold (représentant du gouvernement au Sénat), conformément au préavis donné le 17 juin 2024, propose :

Que, nonobstant toute disposition du Règlement, tout ordre antérieur ou toute pratique habituelle, et sans affecter les dispositions de l’ordre du 5 juin 2024 relativement aux délibérations sur le projet de loi C-69, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 16 avril 2024 :

1.si le Sénat reçoit le projet de loi et l’adopte à l’étape de la deuxième lecture, il soit renvoyé au Comité sénatorial permanent des finances nationales;

2.le comité soit autorisé à se réunir aux fins de son étude du projet de loi C-69, même si le Sénat siège à ce moment-là, l’application de l’article 12-18(1) du Règlement étant suspendue à cet égard;

3.le comité soit autorisé à faire rapport du projet de loi à tout moment au cours d’une séance du Sénat, à l’exception de la période des questions;

4.si le comité fait rapport du projet de loi sans amendement, le projet de loi soit inscrit à l’ordre du jour pour une troisième lecture plus tard au cours de cette séance, à condition que si le rapport est présenté après le moment où le Sénat aurait normalement traité du projet de loi à l’étape de la troisième lecture, le projet de loi soit pris en considération à l’étape de la troisième lecture immédiatement, ou, si une autre affaire est à l’étude au moment où le rapport est présenté, le projet de loi soit inscrit à l’ordre du jour pour une troisième lecture en tant que l’affaire suivante;

5.si le comité fait rapport du projet de loi avec amendement ou avec une recommandation que le Sénat abandonne l’étude du projet de loi :

a)le rapport soit inscrit à l’ordre du jour pour étude plus tard au cours de cette séance, à condition que si le rapport est présenté après le moment où le Sénat l’aurait normalement étudié, il soit pris en considération immédiatement ou, si une autre affaire est à l’étude au moment où le rapport est présenté, il soit inscrit à l’ordre du jour pour étude en tant que l’affaire suivante;

b)une fois que le Sénat a pris une décision sur le rapport, le projet de loi, s’il est encore devant le Sénat, soit pris en considération à l’étape de la troisième lecture immédiatement.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

La Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social
La Loi sur l’assurance-emploi

Projet de loi modificatif—Troisième lecture

Consentement ayant été accordé de passer aux autres affaires, projets de loi d’intérêt public du Sénat, troisième lecture, article no 3 :

L’ordre du jour appelle :

Reprise du débat sur la motion de l’honorable sénatrice Bellemare, appuyée par l’honorable sénateur Dalphond, tendant à la troisième lecture du projet de loi S-244, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social et la Loi sur l’assurance-emploi (Conseil de l’assurance-emploi), tel que modifié.

L’honorable Rose-May Poirier : Honorables sénateurs, je prends la parole aujourd’hui à titre de marraine du projet de loi S-244, Loi modifiant la Loi sur le ministère de l’Emploi et du Développement social et la Loi sur l’assurance-emploi (Conseil de l’assurance-emploi), à l’étape de la troisième lecture. J’aimerais profiter de l’occasion pour remercier la sénatrice Bellemare pour son travail inlassable et ses activités de sensibilisation à l’amélioration du programme d’assurance-emploi, ainsi que pour la féliciter du projet de loi S-244.

(1920)

Comme vous vous en souvenez peut-être, chers collègues, le projet de loi S-244 propose de créer un conseil pour établir un dialogue social entre le gouvernement, les employeurs et les employés dans le cadre du programme d’assurance-emploi de notre pays.

Au cours de son étude, le Comité sénatorial permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie a étudié le projet de loi pendant trois réunions, y compris l’examen article par article. Il a entendu les deux commissaires à l’assurance-emploi — Nancy Healey, qui représente les employeurs, et Pierre Laliberté, qui représente les travailleurs —, ainsi que les syndicats — le Congrès du travail du Canada et Unifor — et les parties prenantes qui représentent les employeurs — la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante et la Chambre de commerce du Canada.

Tous sont favorables au projet de loi. Ils estiment que l’établissement de consultations en bonne et due forme grâce au dialogue social leur permettra de mieux se faire entendre et de proposer des programmes plus adaptés à leurs membres respectifs. À mon avis, leur appui au projet de loi indique également que la patience des travailleurs et des employeurs est à bout. Ils veulent que des changements substantiels soient apportés au programme d’assurance-emploi dès maintenant.

Tout le monde sait que le programme d’assurance-emploi du Canada ne fonctionne plus. Pourtant, le gouvernement se repose sur ses lauriers au lieu de faire entrer ce programme dans le XXIe siècle, comme il avait promis de le faire.

Quant aux fonctionnaires, ils ont clairement exprimé leurs préoccupations concernant le projet de loi S-244. Je cite les propos d’une de ces personnes :

[…] Encore une fois, je ne suis pas une spécialiste. Ce n’est pas nous qui avons rédigé ce projet de loi précis. Je ne peux donc pas dire que j’ai une certaine expertise de la politique qui le sous-tend. À la lecture, il est possible — en l’absence de plus de clarté et de précisions — que le rôle consultatif et les fonctions de rapport du nouveau conseil consultatif élargi aient des conséquences inattendues sur la gouvernance actuelle du programme.

Comme vous le voyez, chers collègues, le projet de loi suscite encore quelques inquiétudes. J’ai tendance à partager les inquiétudes des représentants du gouvernement sur la façon dont le conseil changera la dynamique du processus décisionnel de l’assurance-emploi. Il est important de prendre note de ces préoccupations et de les répéter à l’étape de la troisième lecture.

Honorables collègues, durant mon discours à l’étape de la deuxième lecture, j’ai exprimé les préoccupations suivantes, qui sont toujours d’actualité. Il existe toujours une lacune dans la représentation au sein du Conseil de l’assurance-emploi. Comme le prévoit le projet de loi, le conseil est formé des deux commissaires à l’assurance-emploi, d’au moins cinq membres représentant les organisations ouvrières les plus représentatives, et d’au moins cinq membres représentant les organisations patronales les plus représentatives.

Deux personnes pourraient aussi être invitées à assister aux réunions du conseil à titre d’observateurs, à savoir des représentants des gouvernements des provinces et des territoires responsables des politiques et des programmes du marché du travail, ainsi que des représentants autochtones et des représentants d’organisations autochtones.

Honorables sénateurs, comment seront représentées les personnes qui travaillent dans des économies saisonnières, celles qui exercent plusieurs emplois dans l’économie des petits boulots et celles qui ne sont pas syndiquées? Comment leurs voix seront-elles entendues? Ma crainte reste la même. En amplifiant les voix des grands syndicats, qui sont concentrés dans les régions les plus peuplées, on pourrait très bien diminuer les voix du Canada rural, des travailleurs de l’économie saisonnière et des travailleurs non syndiqués. Ils cotisent tous au régime d’assurance-emploi, et leurs réalités ne devraient pas être laissées de côté dans le processus de prise de décision.

Le gouvernement libéral actuel a eu plus de neuf ans pour enfin apporter une réforme significative et nécessaire au régime d’assurance-emploi, mais il continue de se traîner les pieds pour réformer celui-ci afin de l’adapter aux réalités de l’économie d’aujourd’hui.

Je considère le projet de loi S-244 comme un symbole de la frustration et de la déception des Canadiens face à l’inaction du gouvernement dans ce dossier. On dit souvent que les Canadiens méritent mieux, mais, pour une réforme d’une telle portée, il est important de le répéter : les Canadiens méritent mieux.

Le marché du travail évolue, et le gouvernement libéral ne veut toujours pas adapter l’assurance-emploi au XXIe siècle — et pas seulement au XXIe siècle, car des problèmes du siècle précédent persistent. Je dois aussi mentionner la fameuse période du « trou noir » pour les travailleurs saisonniers.

Dans le dernier budget, il n’y avait qu’un seul élément lié à l’assurance-emploi : le renouvellement d’un programme pilote de 5 semaines pour les travailleurs saisonniers afin de couvrir le « trou noir ». À titre de rappel, le « trou noir » est une période de l’année où les travailleurs saisonniers n’ont plus d’heures assurables, mais où leur emploi saisonnier n’a pas encore commencé. Chers collègues, est-ce ainsi que les travailleurs saisonniers devraient être traités par leur gouvernement? Chaque année, ils vivent dans l’incertitude, en se demandant si le gouvernement va maintenir le projet pilote ou s’il va enfin combler le fossé.

Chers collègues, imaginez une famille de quatre personnes qui dépend d’un projet pilote pour joindre les deux bouts parce que le travail saisonnier n’a pas encore commencé. Ce cycle doit cesser, et je profite de l’occasion pour rappeler au Sénat leur histoire et leur combat, car le gouvernement fédéral les a certainement oubliés et préfère poursuivre une approche fragmentée intenable plutôt que de procéder à une réforme significative.

Bien que j’émette des réserves au sujet du projet de loi S-244 en ce qui concerne les personnes sous-représentées au sein du conseil de l’assurance-emploi, si ce projet de loi devait être adopté, j’exhorterais le conseil à commencer par faire de la place en son sein aux voix du Canada rural, des travailleurs saisonniers et des travailleurs non syndiqués.

J’encourage également la Chambre des communes à se pencher attentivement sur cette question lorsqu’elle examinera le projet de loi. Le programme d’assurance-emploi reste, à ce jour, un programme financé par les travailleurs et les employeurs. Donner la priorité aux voix des plus grands syndicats et à celles des plus grands représentants des employeurs pourrait avoir pour conséquence d’exclure les voix des travailleurs non syndiqués, des travailleurs saisonniers et des travailleurs des régions qui ont des besoins différents de ceux des travailleurs des grands centres urbains qui jouissent d’une plus grande représentation.

Pendant toutes les années où j’ai servi à titre de législatrice provinciale, et maintenant à titre de sénatrice, j’ai toujours cru à la consultation et au dialogue efficace entre le gouvernement et ses citoyens. C’est pour cette raison que j’ai tendance à soutenir le projet de loi, à condition que le conseil n’exclue pas les personnes qui ont besoin du filet de sécurité sociale du programme d’assurance-emploi. Je vous remercie, chers collègues.

Son Honneur la Présidente : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée et le projet de loi modifié, lu pour la troisième fois, est adopté.)

[Français]

Le Sénat

Adoption de la motion tendant à dénoncer la condamnation à mort de Toomaj Salehi

Consentement ayant été accordé de passer aux motions, article no 213 :

L’honorable Julie Miville-Dechêne, conformément au préavis donné le 17 juin 2024, propose :

Que le Sénat :

a)dénonce la condamnation à mort du musicien iranien et critique affiché du régime iranien, Toomaj Salehi;

b)exhorte le gouvernement du Canada à imposer des sanctions ciblées aux 31 juges, procureurs et enquêteurs des tribunaux révolutionnaires islamiques d’Iran figurant sur la liste « TOOMAJ », qui sont responsables des simulacres de procès, de torture et du traitement inhumain des manifestants et des dissidents politiques iraniens;

c)condamne l’apartheid fondé sur le sexe, les violations des libertés civiles, les assassinats, l’intimidation et les actes de violence commis par la République islamique à l’encontre du peuple iranien;

d)réaffirme son appui inconditionnel aux Iraniens qui défendent les droits de la personne et la démocratie dans le cadre du mouvement « Femmes, vie, liberté ».

Son Honneur la Présidente : Les sénateurs sont-ils prêts à se prononcer?

Des voix : Le vote!

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(La motion est adoptée.)

(1930)

[Traduction]

Audit et surveillance

Douzième rapport du comité—Ajournement du débat

Le Sénat passe à l’étude du douzième rapport (provisoire) du Comité permanent de l’audit et de la surveillance, intitulé Mise en œuvre du plan d’audit interne axé sur les risques, présenté au Sénat le 17 juin 2024.

L’honorable Marty Klyne propose que le rapport soit adopté.

 — Honorables sénateurs, je propose aujourd’hui l’adoption du 12e rapport du Comité permanent de l’audit et de la surveillance, qui porte sur la mise en œuvre du plan d’audit interne axé sur les risques. Comme le mentionne le rapport, le Comité permanent de l’audit et de la surveillance a adopté un plan triennal d’audit interne axé sur les risques. Il s’agit de la dernière étape de notre parcours en vue de mettre en place une fonction d’audit interne robuste pour le Sénat.

Comme vous vous en souviendrez peut-être, le Comité permanent d’audit et de surveillance a été créé en octobre 2020. La première tâche du comité a été de recruter, dans le cadre d’un processus équitable et transparent, deux candidats hautement qualifiés occupant des postes de direction pour siéger en tant que membres externes du comité, une première dans l’histoire du Sénat. Mme Hélène Fortin et M. Robert Plamondon ont été nommés membres externes du comité le 8 juin 2021, lorsque le Sénat a adopté le cinquième rapport du comité.

Le comité s’est ensuite attelé à la mise en place de sa structure de gouvernance. Cette démarche a abouti à l’adoption, par le Sénat, de la Charte d’audit et de surveillance du Sénat. La charte définit le cadre de gouvernance, les pratiques administratives et les responsabilités du comité. Elle est entrée en vigueur le 23 juin 2022, en même temps que les changements conséquents apportés au Règlement et au Règlement administratif du Sénat, qui comprennent notamment un processus budgétaire indépendant pour le Comité permanent d’audit et de surveillance, tel qu’il est indiqué en détail dans le sixième rapport du comité.

La prochaine étape, pour le comité, consistait à recruter un dirigeant principal de l’audit pour s’occuper de la fonction d’audit interne. En octobre 2023, Amipal Manchanda a été engagé, avec pour tâche principale d’élaborer un plan pluriannuel d’audit interne axé sur les risques. Conformément aux pratiques exemplaires, ce plan a été préparé à la suite d’une analyse détaillée des principaux comptes corporatifs du Sénat et d’une série de consultations auprès des sénateurs et des représentants de l’Administration du Sénat.

Chers collègues, le rapport dont vous êtes saisis constitue la prochaine étape qui permettra au comité et au dirigeant principal de l’audit de mettre en œuvre la première année du plan. Idéalement, le rapport devrait être adopté avant la relâche estivale afin de permettre au comité de faire avancer les choses pendant l’été en entamant le processus d’embauche de deux ressources additionnelles et en lançant le processus d’approvisionnement concurrentiel pour les deux audits prévus cette année.

Chers collègues, le comité qui, dans un esprit d’intégrité, d’indépendance, de transparence et de responsabilisation, est chargé en vertu de l’article 12-7(4) du Règlement d’agir de sa propre initiative sur certaines questions, notamment pour retenir les services d’auditeurs internes et externes ainsi que pour diriger ces audits, et de faire rapport de ses observations et recommandations au Sénat à intervalles d’au plus un an, fait maintenant rapport de ce qui suit :

Votre comité soutiendra les prochaines étapes de la mise en œuvre du plan d’audit interne axé sur les risques, dans le but de s’assurer que le travail de l’audit interne est positionné de manière à fournir une évaluation et une analyse de l’existence, de l’efficacité et de l’adéquation des processus de gestion des risques, de contrôle et de gouvernance au sein du Sénat.

Pour l’exercice en cours, votre comité a approuvé l’exécution de deux audits, sous la responsabilité du dirigeant principal de l’audit. Le premier audit porte sur l’examen des données contractuelles. L’objectif est d’identifier les tendances en matière d’approvisionnement auprès des marchés et d’analyser ces activités à l’aide de l’analyse de données. L’audit portera sur les activités d’approvisionnement au sein du Sénat et de l’Administration du Sénat de 2019 à 2024, et examinera les tendances en matière de dépenses contractuelles, de contrats à fournisseur unique, d’amendements et de contrats multiples attribués à des fournisseurs individuels. Cette mission procurera une assurance (limitée) liée aux missions d’examen.

Le deuxième audit porte sur le cadre de contrôle de la gestion financière du Sénat. L’objectif est d’évaluer la conception et l’efficacité du cadre de contrôle de la gestion financière des dépenses des sénateurs, des bureaux des sénateurs et de l’Administration du Sénat. L’audit portera sur toutes les dépenses, y compris celles des sénateurs, de leurs bureaux et de l’Administration du Sénat, à l’exception de celles liées au personnel (salaires, avantages, etc.) et aux partenaires parlementaires. Les procédures comprendront le rapprochement du cadre de contrôle des dépenses et un échantillon de dépenses pour tester la conception et l’efficacité du cadre de contrôle. La mission procurera une assurance (élevée) liée aux missions d’audit.

Le budget de votre comité s’élève à 313 124 $ pour l’exercice financier se terminant le 31 mars 2025, tel qu’octroyé dans le cadre du processus du budget principal des dépenses du Sénat. De cette enveloppe, 120 000 $ sont alloués à la rémunération des deux membres externes du comité, conformément au Premier rapport, adopté par le Sénat le 9 décembre 2021. Un montant additionnel de 28 600 $ est alloué au contrat pour l’audit externe des états financiers du Sénat. Le comité a également autorisé le transfert de 50 000 $ au Bureau du dirigeant principal de l’audit, pour la rémunération d’un employé occasionnel et de 1 277,40 $ à des fins de formation. Votre comité a l’intention de transférer le solde de 113 246 $ du budget alloué pour cet exercice au Bureau du dirigeant principal de l’audit, pour entreprendre le travail d’audit tel que prévu.

Le rapport se poursuit ainsi :

Parallèlement, votre comité demande l’autorisation de créer deux nouveaux postes équivalents temps plein (ETP), soit un gestionnaire de l’audit et un auditeur principal. Votre comité estime que ces deux postes sont essentiels à la mise en œuvre et à la viabilité de la suite du plan d’audit. En intégrant à la fois des services contractuels et du personnel permanent, votre comité vise à maintenir un niveau élevé de qualité et d’efficacité en matière d’audit, tout en garantissant une surveillance et une conformité dans l’ensemble de l’organisation.

Par conséquent, afin de favoriser une fonction d’audit et de surveillance efficace, capable de mener à bien le plan triennal d’audit interne axé sur les risques, tel qu’il a été approuvé par votre comité, et de veiller à ce que la fonction d’audit interne du Sénat soit dotée d’un personnel adéquat, votre comité présente les recommandations suivantes :

1. Que deux nouveaux postes permanents ETP (un gestionnaire de l’audit et un auditeur principal avec une classification anticipée aux niveaux MMG01 et SEN10, respectivement) soient créés, au-dessus du plafond d’ETP approuvé par le Comité permanent de la régie interne, des budgets et de l’administration (CIBA), au Bureau du dirigeant principal de l’audit, avec un financement comme suit :

a) pour l’exercice en cours (2024-2025), un montant estimé à 90 000 $ provenant des excédents budgétaires anticipés des bureaux des sénateurs [...]

Le rapport continue comme suit :

b) pour les années suivantes, pour les deux nouveaux postes, un financement permanent estimé à 249 152 $ (à confirmer par les résultats du processus de classification), à demander dans le cadre du processus du budget principal des dépenses 2025-2026.

2. Que le budget de la rémunération au rendement pour le nouvel ETP de niveau gestionnaire (MMG01) soit alloué au compte corporatif à un montant estimatif de 4 670 $ (notation « a atteint + » à 7 % pour 6 mois) pour l’exercice en cours (2024-2025), à financer à partir des excédents budgétaires anticipés des bureaux des sénateurs et avec un financement permanent estimé à 9 340 $ pour les années suivantes, à demander dans le cadre du processus du budget principal des dépenses 2025-2026 [...]

L’annexe du rapport contient un sommaire de l’estimation des fonds nécessaires à la mise en œuvre de la première année du plan d’audit interne axé sur les risques. Sur la base de l’expérience acquise lors de l’exécution de la première année du plan, le comité évaluera si des fonds supplémentaires seront nécessaires pour les deuxième et troisième années.

Chers collègues, votre Comité permanent de l’audit et de la surveillance et son dirigeant principal de l’audit sont prêts à entreprendre les démarches au cours de l’été, c’est-à-dire à émettre les demandes de propositions pour la sous-traitance des deux premiers audits et le recrutement de deux nouveaux auditeurs permanents.

Au nom de votre Comité permanent de l’audit et de la surveillance, je vous demande respectueusement d’adopter le rapport. Lançons les opérations. Merci.

Son Honneur la Présidente : Sénateur Deacon, avez-vous une question? Sénateur Klyne, acceptez-vous de répondre à une question?

Le sénateur Klyne : Je vais répondre à une question.

L’honorable Colin Deacon : Pouvez-vous rappeler au Sénat à quel moment le vérificateur général a recommandé que le Sénat crée une fonction de surveillance indépendante de ses activités? Était-ce en 2015?

Le sénateur Klyne : Je crois qu’il s’agissait d’une ferme recommandation du vérificateur général à la suite de l’audit interne, je suppose que nous l’appellerons ainsi. Je vois déjà de nombreux frémissements.

Le Sénat a approuvé et suivi cette recommandation. Le Comité permanent de l’audit et de la surveillance a été créé, et il a procédé à la préparation de son cadre de gouvernance et d’une charte de travail, qui ont eux aussi été approuvés par le Sénat. Ce dernier a également approuvé la nomination de deux membres externes au comité, ce qui a été très utile. Le Sénat a ensuite demandé au comité de produire d’autres rapports, qu’il a tous approuvés jusqu’à présent. Maintenant, le comité lui demande d’approuver le présent rapport.

[Français]

L’honorable Éric Forest : Je prends la parole, car j’aimerais partager certaines inquiétudes que j’ai. Je partage totalement les objectifs du Comité de l’audit. Je pense que les recommandations sont pertinentes et claires. Cependant, on gère des fonds publics et il s’agit de notre budget. On dit souvent que le gouvernement n’arrive pas à gérer adéquatement les fonds publics, mais il s’agit de notre budget et on fait beaucoup d’efforts pour le gérer de la manière la plus responsable possible.

(1940)

Je pense que ce sont des demandes fort pertinentes.

Là où je suis inconfortable, c’est qu’à l’heure actuelle, le Comité de l’audit a un budget de 534 268 $. Avec ce rapport, on demande une augmentation de 65 %, ce qui le chiffrerait à 881 768 $, et de 50 % pour pérenniser les années précédentes à 797 420 $.

À titre de président du Sous-comité du budget des dépenses du Sénat et des budgets de comités, je peux affirmer qu’on a fait des efforts. Par exemple, on a coupé le service de serviettes et les repas, on a limité à deux le nombre de lignes téléphoniques et on a limité les ordinateurs. On fait énormément d’efforts.

Les objectifs sont pertinents, mais est-ce qu’ils ne sont pas trop ambitieux pour un début? Sur le plan des ressources, je me dis que le fait d’avoir deux employés de plus est pérennisé, et il y a aussi les locaux et tout le travail que cela va demander. Je suis inconfortable avec ce rapport et je vais voter contre son adoption.

L’honorable Raymonde Saint-Germain : Je souhaite participer au débat. Je me souviens très bien que le rapport du vérificateur général qui a été déposé en 2015 recommandait que le vérificateur général ait compétence sur le Sénat. Nous avons considéré à l’époque — je suis membre du Comité de la régie interne depuis 2017 — qu’un Comité de l’audit et de la surveillance plus indépendant serait mieux adapté dans le contexte. En tout respect, le Comité de la régie interne a entendu le nouveau vérificateur interne lors de sa dernière séance à huis clos. Nous lui avons posé des questions pour lesquelles nous attendons des réponses. Il serait important d’avoir ces réponses avant de voter sur cette proposition de rapport. C’est pourquoi je demande l’ajournement du débat pour le reste de mon temps de parole.

Son Honneur la Présidente : Vous plaît-il, honorables sénateurs, d’adopter la motion?

Des voix : D’accord.

(Sur la motion de la sénatrice Saint-Germain, le débat est ajourné.)

[Traduction]

Les travaux du Sénat

L’honorable Patti LaBoucane-Benson (coordonnatrice législative du représentant du gouvernement au Sénat) : Honorables sénateurs, avec le consentement du Sénat et nonobstant l’article 5-13(2) du Règlement, je propose :

Que la séance soit maintenant levée.

Son Honneur la Présidente : Le consentement est-il accordé, honorables sénateurs?

Des voix : D’accord.

(À 19 h 43, le Sénat s’ajourne jusqu’à 14 heures demain.)

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